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« QU’IMPORTE MA MORT SI LE TRAVAIL CONTINUE », Alioune Fall

La RTS immortalise ses héros
Quelqu’un a dit que le temps est le pire ennemi du genre humain, parce qu’il nous prend notre jeunesse, notre vigueur, notre beauté et surtout nos souvenirs. Il passe inexorable, jetant sur toute chose le noir manteau de l’oubli.


Rédigé par leral.net le Vendredi 23 Mars 2012 à 19:18 | | 1 commentaire(s)|

« QU’IMPORTE MA MORT SI LE TRAVAIL CONTINUE », Alioune Fall
D’autres penseurs soutiennent au contraire que l’oubli est le plus beau cadeau que Dieu (SWT) ait accordé aux humains puisque sans cet effacement de la mémoire, nous passerions notre vie à pleurer ceux qui nous ont quittés et les moments de bonheur que nous avons vécu en leur compagnie.
Mais Dieu nous a également dotés nous les humains, d’une âme et d’un esprit inventif et nous avons pu ainsi trouver le moyen de convoquer régulièrement, par l’image, le son et l’esprit, le souvenir des jours heureux et des visages aimés.
Les photos, les films, les enregistrements sonores font partie de ces inventions, mais avant ces produits de la technologie, il y’a eu les récits historiques, les contes et légendes et aussi l’érection de panthéons, destinés à immortaliser ceux qui ont marqué de leur empreinte l’histoire de leur nation.
En organisant la cérémonie de baptême de ses studios, la RTS s’inscrit dans la lignée de ces institutions qui ont décidé de faire vivre pour l’éternité, dans la mémoire collective, les noms de collègues arrachés à notre affection, qui ont de manière significative, contribué à la naissance, au développement et au rayonnement de cette Maison qui est aujourd’hui, sans aucun conteste, le plus grand outil de communication de masse au Sénégal.
Je me souviens d’une boutade que nous lancions à une époque où cet établissement manquait de véhicules et même de papier pour rédiger le journal : « Le possible est déjà fait ; l’impossible sera fait dans un instant ; pour les miracles, prière de prévoir un délai. »
C’est dans cette atmosphère d’austérité financière, mais d’enthousiasme et d’émulation que nous avons pratiqué le métier, dirigés, j’allais dire couvés par un homme d’exception, qui était avant tout l’un des nôtres puisqu’étant lui-même journaliste, l’un des premiers formés au Studio-école de l’Office de la Coopération Radiophonique française, l’OCORA.
Alioune FALL, puisque c’est de lui qu’il s’agit, est né le 10 décembre 1929 à Diourbel. Il a fait ses études à l’école primaire de la Médina puis au lycée Van Vollenhoven (actuel lycée Lamine Guèye). Il a ensuite suivi en France, pendant 7 ans, une formation à l’Ecole Supérieure d’Orientation de Paris, puis il a intégré la section supérieure de Journalisme de l’Ecole Nationale des Langues Orientales, à l’Institut des Hautes Etudes Internationales de la rue de Rennes. Il a terminé ses études au studio-école de l’OCORA en 1956, mais soucieux d’exceller dans tous les médias, il a fait des stages dans des radios et organes prestigieux comme France-Soir, Le Monde, Témoignage Chrétien, l’Agence France-Presse, la Radiotélévision Française, la British Broadcasting Corporation (BBC), Europe 1 et Radio Monte Carlo.
Alioune Fall a très tôt assumé des responsabilités. Dès 1957, alors qu’il n’avait que 28 ans, il a été Chef de la Section-reportage de l’OCORA, à Paris. Au niveau du continent africain, il a également occupé des postes importants. En effet, dès les premières années de la décolonisation, l’expertise d’Alioune Fall a été sollicitée par différents Etats africains pour manager leurs médias. Ainsi, il est devenu successivement Rédacteur en Chef de Radio Soudan (actuel Mali), Directeur des Programmes de Radio Brazzaville, Directeur-adjoint de Radio Congo et membre fondateur de l’URTNA (Union des Radiodiffusions et Télévisions Nationales d’Afrique).

Revenu au Sénégal en 1961, il a gravi rapidement les échelons à Radio-Sénégal, en devenant Chef de la division des Informations et des Programmes, Directeur-adjoint, puis Directeur. A la création de l’Office de Radiodiffusion Télévision du Sénégal en 1974, il a été nommé Président-Directeur général, fonction qu’il occupera jusqu’à sa mort en 1975 à Paris, à l’âge de 45 ans.

Des anecdotes, parfois hilarantes sur ses accrochages avec les agents, aux capacités managériales d’Alioune Fall en passant par son soutien constant à ses employés en situation difficile, leur défense face au très exigeant président Senghor, tout concourt à magnifier le premier PDG de l’ORTS. Alioune Fall a "guidé, orienté, encadré et recruté." Il n’aimait pas les incompétents, c’est vrai ! Ni le travail mal fait. Avec lui, pas de jour de repos. Il vous appelait quand il avait besoin de vous. En fait, il était à la fois craint et aimé parce qu’il était exigeant avec ses collaborateurs mais aussi avec lui-même. D’ailleurs il allait en reportage comme tout le monde.

Pour lui, l’homme de radio véritable devait d’abord comprendre que l’Afrique était un chantier immense où presque tout était à réaliser et son travail devait être une tâche noble, variée, immense, exaltante qui méritait d’être entreprise avec cœur, avec patience, avec passion.
« L’homme de radio, disait-il, doit être capable de se renouveler sans cesse, d’avoir une imagination qui touche parfois au rêve. »

L’ancien Président-Directeur général du « Soleil », Bara Diouf, se souvient dans l’hommage posthume qu’il lui a consacré, d’ « un homme d’action, d’un bâtisseur de nation. » Selon lui, "Alioune Fall était de ce petit nombre qui a mis, au service d’un Sénégal à bâtir, en même temps que les formidables possibilités de l’outil qui lui avait été confié, les ressources de son talent, de son imagination et de son cœur. Il est mort à la tâche, en patriote, seul avec la souffrance mais lucide et clairvoyant."

J’ai eu le privilège d’avoir été recruté à l’ORTS par lui le 13 Février 1974. J’ai eu l’honneur de couvrir la cérémonie de son inhumation, le 09 mars 1975 au cimetière musulman de Yoff et le dernier message que j’ai livré de lui aux auditeurs de Radio Sénégal a été un extrait de la lettre envoyée peu avant son décès à son ami Abdoul Ba. Il y disait ceci : « Dans quelques jours, peut être même dans quelques heures, si Dieu le Tout-Puissant ne modifie pas le cours de mon destin, j’aurai cessé d’être de ce monde. Mais qu’importe ma mort si le travail continue. »
Ahmadou Ba « Francis Cheikhna Ba »
En Mars 2005, trente ans et quatre jours après Alioune FALL, une autre icône nous a quittés. Ahmadou BA, recruté en Juillet 1974, cinq mois après mon arrivée à l’ORTS était le prototype parfait du communicateur populaire. Véritable self-made-man, Ahmadou Ba avait l’animation dans le sang. D’ailleurs, il fréquentait la radio depuis plusieurs années déjà, participant régulièrement dès 1966 à la célèbre émission, « Inter jeunes Variétés » d’Ousseynou DIOP alias Bob Yves, qui nous a hélas quittés lui aussi.
Ahmadou Ba fut plus tard diplômé du Centre de formation de l’ORTS puis envoyé en stage en France, à l’Institut National de l’Audiovisuel.
Mais l’acquisition de ces nouvelles connaissances ne lui faisait pas renier ses anciennes amours et l’animation restait sa priorité.
Animateur, producteur et reporter de talent, Ahmadou Ba nous émerveillait par son aisance à l’antenne et son inspiration permanente. Avec lui et d’autres jeunes animateurs tels que Demba Dieng, Daba Aw, Arame Diop, Bintou Dieng et Abou Alassane Niang entre autres, l’ORTS a pu réaliser ce que le quotidien « Le Soleil » a qualifié en 1979 de révolution des jeunes, à la radiodiffusion nationale.
Ahmadou Ba que les auditeurs connaissaient plus sous son nom d’animateur « Francis Cheikhna Ba » était infatigable lorsqu’il s’agissait de concocter une nouvelle programmation musicale ou d’animer une cérémonie. Il était incontournable pour ceux qui voulaient faire passer de la publicité. Les moins jeunes se souviendront sans doute de quelques-unes de ses productions phares telles que : « La guitare et son maître »,« A micro ouvert » « Inter 12/14 » ou « 7/8 » sans compter « midi musique » qui a permis à beaucoup d’ASC d’organiser à l’époque des bals en plein jour.
Ahmadou Ba était un animateur talentueux et les étoiles montantes de la musique sénégalaise de l’époque, telles que Youssou Ndour, Baba Maal, Ismaël Lo, Thione Seck et Oumar Pène sollicitaient souvent la RTS, pour que leurs tournées internationales et à l’intérieur du pays, soient couvertes par cette grande vedette de la radio.
Sa renommée était si grande, son succès était tel, que la télévision Nationale en quête de talents, lui demanda d’animer une grande production musicale intitulée « la nuit des étoiles ».
Mais la Radiodiffusion nationale avait besoin de ses compétences pour assurer le développement des stations régionales, former et encadrer les jeunes nouvellement recrutés.
Ahmadou Ba fut envoyé à Diourbel pour démarrer la nouvelle station qui devait y être installée. Ses qualités naturelles d’organisateur alliées à ses racines religieuses lui permirent de réussir pleinement sa mission, de telle sorte que, lorsqu’il fut rappelé à Dakar pour assurer les fonctions de chef de la chaîne Inter, la Direction de la RTS dut user de beaucoup de diplomatie pour convaincre les autorités religieuses locales de le laisser partir.
Au demeurant, ce séjour à Diourbel avait permis à notre collègue d’opérer une sorte d’introspection spirituelle avec comme résultante, un renforcement spectaculaire de sa foi et même une sorte de plongée vers le soufisme. Ahmadou ne supportait plus le nom de « Francis » et regrettait amèrement d’avoir pu un jour, troquer cette appellation contre le nom glorieux que ses parents lui avaient donné.
Il nous a quittés le 13 Mars 2005, à l’âge de 56 ans, plongeant la RTS et tous ceux qui appréciaient son talent, sa gentillesse et sa simplicité dans l’amertume, la peine et le désarroi.
Mamadou Diop « Modou »
Amertume, surprise et désarroi ont également les maîtres mots le Mardi 21 Février dernier, à la nouvelle du décès de Mamadou Diop, victime ce jour-là, dans les locaux de la RTS, d’un malaise auquel il ne survivra pas. Il est tombé au combat, dans cette maison qu’il n’a jamais réellement quittée, malgré son admission à la retraite en 2003 et les nouvelles responsabilités qui lui avaient été confiées depuis lors au sein de la Commission Nationale de lutte contre la corruption et la concussion. Je dis « tombé au combat » parce que, comme vous le savez tous, il avait été sollicité pour coordonner la couverture officielle de la campagne électorale par la RTS. Il assurait cette responsabilité depuis près de vingt ans avec compétence et dévouement, et le Directeur Général qui le connaissait et l’estimait pour ses qualités humaines et professionnelles n’hésitait jamais à faire appel à ce meneur d’hommes.
Mamadou Diop adorait la télévision qui était pratiquement sa raison de vivre. Depuis son recrutement le 1er Décembre 1973, il lui avait consacré tout son immense talent. La Télévision Nationale lui rendait cet amour et lui a, de son côté, fait connaître la notoriété et les honneurs. Elle lui a permis de voyager dans le monde entier et de participer à de nombreux colloques et séminaires, au cours desquels ses interventions ont été fortement applaudies.
Diplômé du CESTI, Mamadou Diop a très vite gravi les échelons dans sa carrière professionnelle. Avantagé sans doute par ses origines rurales, puisqu’il est né à COKI au cœur du Ndiambour, il est rapidement devenu un spécialiste de l’information sur l’environnement, parcourant dans ses moindres recoins le Sénégal des profondeurs, pour faire connaître à tous, les richesses du terroir. Il a donc été nommé Chef de la Division de la Télévision éducative rurale. Parmi ses grandes productions, « La randonnée de Malaw », un documentaire sur la déforestation, et puis « Dakar étouffe », « les grands dossiers du monde rural », « la recherche océanographique », autant de reportages salués et souvent primées par des Institutions comme l’URTNA, l’Union des Radiotélévisions Nationales d’Afrique, ou le CIRTEF, le Conseil International des Radiotélévisions d’expression Française.
Ses compétences avérées dans la conception et la réalisation lui ont valu une promotion méritée et saluée par tous lorsqu’il est devenu ensuite Chef de la Division des programmes, une fonction qui lui a permis d’enrichir de manière significative l’offre de programmes de la Télévision Nationale. A ce poste, il a conduit pendant près de dix ans, toutes les missions de couverture par la RTS des grands évènements survenant au Sénégal. En particulier, il a coordonné chaque année la couverture du Gamou de Tivaouane et du Magal de Touba. L’une de ses meilleures productions est d’ailleurs ce grand documentaire, intitulé « Le wird Tidiane », qui fait la fierté de la RTS.
Afin d’utiliser au mieux cet homme pétri de qualités dans presque tous les domaines, La Direction Générale l’a nommé quelques années plus tard Chef de la Division Management et qualité de la Télévision Nationale et, en 2002, Conseiller Spécial du DG de la RTS.
Modou, comme l’appelaient ses amis, c'est-à-dire pratiquement tout le monde était un homme de Télévision au véritable sens du terme. Sa disparition marque forcément une rupture. Il était l’un des derniers hommes- orchestre, à l’aise aussi bien au reportage, et à la rédaction, qu’à la réalisation et à la présentation, sans compter l’organisation et le management des hommes.
Voilà brièvement retracée, la carrière de nos trois collègues dont la RTS a décidé d’honorer la mémoire en donnant leurs noms à des studios. Ils ne sont pas les seuls disparus. Mais ils ne sont pas moins méritants que nos autres défunts collègues. Et tout simplement, comme le dit l’adage, on ne peut pas compter jusqu’à mille sans passer par un.
Assane Ndiaye et Tidiane Daly Ndiaye, anciens DG, Alé Ndaw, Philippe Ndiogoye, Cheikh Mbacké Guissé, Malick Guèye, Clédor Diagne, Lamine Samb, Adama Ndiaye, Tidiane Hanne, Abdouba Ndongo, Dominique Carvalho dite « Takia », Moussa Touré, Pape Madiop Fall, Emmanuel Essouh, Sokhna Dia, Abdoulaye Nar Samb, Mansour Seck, Adama Fall, Coumba Sow, Khady Diop, Christian Lalou, Djibril Wade et tous nos autres collègues, journalistes, techniciens, animateurs, chauffeurs, cadres et agents administratifs, aujourd’hui disparus méritent également d’avoir leur nom inscrit au fronton de cet établissement pour avoir été parmi les artisans de sa marche vers le succès ; et je ne désespère pas de voir un jour la naissance d’un musée retraçant l’épopée glorieuse de la Radiotélévision nationale et les exploits de ces hommes et femmes qui ont travaillé dans l’honneur, la loyauté et la dignité, dans des conditions qui n’ont rien à voir avec celles d’aujourd’hui. Et peut-être que ma famille et tous ceux qui m’aiment, auront un jour, l’honneur et le plaisir de voir mon nom aussi, figurer sur cette liste.
« Inalilahi, wa ina ileyhi raajihoune »


El Hadji Amadou Mansour SOW
Journaliste
Ancien Directeur de Radio Sénégal





1.Posté par macky poulo ardo le 24/03/2012 02:36 | Alerter
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