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Quand la précarité précipite les jeunes vers les dangers de l’océan: Le récit poignant de ces familles vulnérables...

Même si les causes sont multiples, le phénomène migratoire est indiscutablement lié à la pauvreté, à la précarité. En témoigne cet extrait du grand reportage du quotidien « Le Témoin » sur cette triste réalité qui depuis des semaines, avec son lot de morts, domine quotidiennement les débats.


Rédigé par leral.net le Mercredi 11 Novembre 2020 à 13:12 | | 0 commentaire(s)|

Quand la précarité précipite les jeunes vers les dangers de l’océan: Le récit poignant de ces familles vulnérables...
A Mbour, notamment aux lieux-dits Tefess et Golf, quartiers essentiellement peuplés de pêcheurs, il ne se passe pratiquement plus un seul jour sans que des jeunes pêcheurs n’embarquent à bord de pirogues pour tenter de rejoindre les îles Canaries.

Selon ces jeunes pêcheurs, principalement, leur activité ne les fait plus vivre dignement. Les causes sont multiples. Mais un seul constat s’impose : ils font face à une pauvreté qu’ils ont du mal même à expliquer.

Ici, la pauvreté qui a frappé ces jeunes, n’épargne guère la cellule familiale. C’est donc la précarité dans les familles qui précipite ces jeunes, pourtant encore éligibles sur le marché de l’emploi, à vouloir tenter leur chance loin des leurs.

Au quartier Golf, chez la famille Sèye, deux membres de la famille ont pris les pirogues en l’espace de trois jours. Les parents qui nous accueillent sont d’un âge avancé. Le père est septuagénaire tandis que la mère de famille, entourée de quelques-uns de ses petits-enfants, affiche la soixantaine révolue.

C’est une famille de dix bouts de bois de Dieu dont sept filles. La seule source de revenus, c’est la pêche. Le père, pêcheur de son état, n’exerce plus depuis sept ans maintenant. La famille ne dispose même pas de pirogue. Les trois fils du patriarche sont tous des pêcheurs, mais ne gagnent pratiquement plus rien pratiquement de leur activité, nous confesse le vieux Matar Sèye.

Dans l’autre quartier épicentre de la recrudescence de l’émigration clandestine, c’est comme si la vie s’était arrêtée soudainement. A Tefess, l’on ne se cache plus. C’est en plein jour que des jeunes parlent de leur projet de voyage, pourtant censé être clandestin !

Une autre famille, une autre histoire. Nous voilà au domicile des Dieng. Ici, seule la mère de famille nous accueille, le père de famille n’est plus de ce monde, nous informe Aïssatou, 40 ans tout juste. Veuve depuis deux ans, elle n’a pas encore pu se remarier et doit entretenir toute seule une famille de cinq enfants dont une fille aînée de 21 ans. Le garçon le plus âgé n’a que dix-huit (18) berges.

Mangoné est parti dix jours auparavant après que sa mère a perçu sa part de la tontine du coin, à quoi se sont ajoutées quelques économies tirées de son petit commerce de micro-mareyage qu’elle exerce au quai de pêche.

« Honnêtement, je me suis toujours opposée à cette aventure périlleuse mais je dois vous dire que je n’avais plus le choix. J’ai remis 300.000 francs à mon fils sachant que je vais serrer le pagne car je suis persuadée que c’est la meilleure solution pour nous. Il n’y a plus de boulot ici pour les jeunes et ceci nous plonge dans la pauvreté. Voyez-vous, nous vivons presque dans le dénuement.

Cette bâtisse qui nous sert de domicile, peut s’écrouler à tout moment. Je sais que trouver de l’emploi en Europe ne sera pas chose aisée pour des clandestins, qui devront s’atteler d’abord à avoir des pièces administratives afin de régulariser leur séjour, mais je ne doute point qu’il y parviendra. De toute façon, mon fils qui est bien arrivé en Espagne, va préférer cette situation à celle qu’il vivait ici
», laisse entendre la jeune maman.






Le Témoin