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Stratégies de réélection de Macky Sall : La transhumance, un couteau à double tranchant

A la quête d’un second mandat, Macky Sall n’exclut rien. Il neutralise de potentiels adversaires, fusionne avec des mouvements ou partis politiques et «blanchit» les transhumants. Cette méthode «hideuse» dénoncée dans son propre camp est-elle plus efficace qu’un bilan reluisant pour sa réélection en 2017 ?


Rédigé par leral.net le Vendredi 3 Avril 2015 à 14:16 | | 0 commentaire(s)|

Stratégies de réélection de Macky Sall : La transhumance, un couteau à double tranchant
La mode est au marron chez les transhumants. Depuis quelque temps, tous les chemins mènent à l’Apr du Président Macky Sall. Les transhumants, comme des «animaux» pressés de quitter leurs damnés pâturages, se bousculent au portillon du gratiné parti présidentiel. Où le Président Macky Sall, sourire large, procède à des «recrutements» tous azimuts de responsables politiques de l’opposition. L’Apr a absorbé, depuis 2012, des mouvements, des partis politiques et accueilli beaucoup de responsables politiques, surtout libéraux et «rewmistes». Elu avec 65% d’espoir, Macky Sall ne semble pas accorder beaucoup d’importance à un bilan reluisant pour sa réélection, mais plutôt à l’arrivée des transhumants. Abdou Diouf et Me Abdoulaye Wade ont fait les frais de cette pratique. Dans cette «chasse» aux transhumants, Macky Sall ne cherche pas seulement des militants, mais aussi il vise à affaiblir l’opposition. Mais certains traînent des casseroles qui pourraient se révéler comme un désavantage pour Macky Sall. C’est à quitte ou double pour l’ancien maire de Fatick.

La «traque» aux transhumants. Le Parti démocratique sénégalais (Pds) et le Rewmi auront souffert de la «traque» aux transhumants, déclenchée par Macky Sall, depuis son accession à la magistrature suprême. Au début, son discours de «rupture» laissait croire que cette pratique relève du passé. «Je ne protégerai personne (contre la justice, Ndlr)», a averti Macky Sall. Mais quelque temps après, de grands responsables politiques ont déposé leurs baluchons au Palais de l’Avenue Léopold Sédar Senghor, souvent, sur invitation du Président de l’Apr. C’est tout un contingent de responsables politiques de différents partis de l’opposition, mais surtout du Pds, qui a transhumé vers le parti au pouvoir. Certains ne sont pas toujours d’accord avec cette façon de faire du président de la République. Ibrahima Faye, frère de la Première Dame, Marième Faye Sall, reste persuadé que, «pour prétendre à un deuxième mandat, le Président Sall ne doit ni aller chercher ni accepter les transhumants. Il n’y a pas de porteurs de voix ni de report de voix au Sénégal. Une très grande majorité des Sénégalais qui votent, détestent cette manière de faire la politique», a-t-il averti dans une interview à «L’Obs». Le leader du mouvement Convergence libérale patriotique (Clp), Serigne Mbacké Ndiaye, «n’exclut pas de soutenir Macky Sall» pour sa réélection. Un clin d’œil mal apprécié par certains observateurs et militants de l’Apr.

La guerre contre les transhumants. Même s’il ne fait pas de la politique, la sortie d’Ibrahima Faye, frère de la Première Dame, en dit long. «C’est difficilement compréhensible qu’il (Macky Sall, Ndlr) aille chercher des transhumants. Le summum a été atteint quand il a accepté Awa Ndiaye. En additionnant des sommes négatives, le résultat ne peut être que négatif», a pesté Ibrahima Faye. Beaucoup de responsables «apéristes» sont contre la pratique de leur leader et le font savoir publiquement. Patrice Sané, un cadre de l’Apr, a pris sa plume, dans une contribution, pour déplorer la transhumance qu’il qualifie comme la «voie de l’immoralité». «Le bétail transhumant est toujours guidé par un berger, les hommes qui transhument le sont par leur moralité. En contrepartie de son adhésion et de son soutien, le transhumant échappe à une condamnation certaine pour faute de gestion», a dénoncé Patrice Sané. Les «arrivistes» ne se laissent, toutefois, pas faire. Ils essayent de voguer dans l’océan marron. Me Nafissatou Diop Cissé a déploré le comportement des militants de l’Apr qui «font preuve de beaucoup d’ostracisme» avec les transhumants. Certaines personnes qui ont fusionné leurs mouvements politiques avec l’Apr sont encore laissées à quai, comme Pape Diouf, Thierno Lô… Si au plan politique Macky Sall réussit à débaucher de grands responsables politiques, son bilan reste mitigé après trois ans de gouvernance. Les réformes tardent, le front social est en ébullition, le taux de chômage reste encore élevé. Certaines mesures salutaires prises ne semblent pas effectives, telles que les baisses du loyer et des prix des denrées de première nécessité.

Enchevêtrement des idéologies. Au Sénégal, l’on accepte toutes les collusions idéologiques. Tout est flou. L’échiquier politique n’est pas encore défini. Les alliances n’obéissent pas aux idéologies politiques. On noue des alliances dans le seul dessein d’arriver au pouvoir, faisant fi des contradictions idéologiques. Ainsi, les libéraux s’allient avec les gauchistes, deux extrémités, soit pour s’opposer, soit pour gouverner ensemble avec des convictions différentes. Certains politiques ont appelé à la clarification du jeu politique sénégalais avec la formation des «familles» politiques en fonction des idéologies. Mais ce vœu reste encore irréalisable au vu de la configuration actuelle du landerneau politique. Cette situation semble favoriser la transhumance.

L'Observateur