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Vente de fraises «made in Sénégal»: Un business fructueux mais fragile

La vente au détail de fraises n’est pas chose facile. Le quotidien des femmes qui s’y activent, est très mouvementé. Reportage...


Rédigé par leral.net le Mercredi 30 Juin 2021 à 19:45 | | 0 commentaire(s)|

Samedi 19 juin 2021. Il est 10 heures et la circulation est fluide sur l’avenue Hassan II, ex-Albert Sarraut. L’endroit ne grouille pas de monde comme on a l’habitude de le voir en milieu de semaine. Plusieurs véhicules sont garés sur le parking d’un célèbre supermarché. Ils appartiennent aux clients venus faire leurs courses. De grosses lunettes de soleil bien posées sur le visage, la tête nouée avec un foulard, Mariama Fall tient un carton bien garni de barquettes de fraises. Elle surveille, comme du lait sur le feu, les clients qui sortent de cette grande surface, pour leur proposer sa marchandise. Elle court parfois derrière eux, les suppliant presque d’acheter une boîte. « Ce travail n’est pas fait pour une fainéante, il faut être endurante et avoir une bonne technique de vente pour convaincre le client à acheter », révèle Mariama, qui revient sur ses pas après avoir vainement suivi une dame jusqu’à son véhicule.

Elle n’est pas la seule vendeuse de fraises dans cet endroit. Elles sont cinq et viennent toutes de la banlieue. Fatou Ndiaye et Oumou Faye en font partie. La chance leur a souri. Elles ont déjà écoulé leurs produits et se reposent sous l’ombre d’un arbre. Oumou est la doyenne du groupe. La quarantaine, cette mère de famille résidant à Yarakh s’active dans le commerce des fraises depuis cinq ans. « Je m’y suis lancée quand j’ai constaté que c’est un fruit bien prisé par les étrangers qui vivent ici. Avant, je vendais des raisins et des feuilles de menthe », explique-t-elle.

D'après "Le Soleil", la vente au détail de la fraise n’est pas chose aisée. Ces bonnes dames se lèvent à 5 heures du matin pour rallier le centre-ville, plus précisément le marché Kermel, où elles trouvent leur fournisseur. Après s’être ravitaillées, elles nettoient les produits avant de les mettre dans des barquettes, qui seront par la suite mises sur le marché. En fin de saison, elles vont dans les champs pour espérer avoir le produit. « Nous achetons le kilo à 3000 FCfa pour le revendre entre 3500 et 4000 FCfa. Tout dépend du client. Le prix initial de la barquette est de 1000 FCfa. Mais, quand le marché est inondé de fraises, on peut la vendre à 750 FCfa », renseigne Oumou Faye. À l’en croire, elles peuvent gagner jusqu’à 4000 FCfa par jour.

Taille élancée, Fatou Sow, moulée dans un jean assorti d’un tee-shirt gris, vend deux barquettes à son client, Franck, un Français résidant au Sénégal. Ce dernier aime s’approvisionner auprès de la dame, depuis plus d’un an maintenant. « La qualité des fraises est bonne. C’est pourquoi je les achète ici », justifie-t-il, avant de s’engouffrer dans sa rutilante voiture. En effet, cela fait quatre ans que Fatou Sow est dans le business des fraises. N’ayant pas percé dans les études, elle y trouve son compte. À l’instar des autres vendeuses, elle gagne parfois jusqu’à 5000 FCfa la journée. Sans compter les pourboires. « Ce que je gagne ici me permet d’aider mes parents et de satisfaire mes besoins. Je contribue au paiement du loyer », dit-elle avec fierté. Son ambition : avoir un grand magasin où elle pourra stocker ses produits.

La fraise, un fruit très périssable

Cependant, ce n’est pas tous les jours que ces vendeuses se frottent les mains. Parfois, elles vendent à perte. « Il y a des jours où les clients se font rares. On ne vend même pas cinq boites. La fraise est un fruit fragile ; elle périt vite. Nous devons écouler au quotidien la quantité que nous possédons, sinon la conservation peut poser problème. C’est la raison pour laquelle nous rentrons des fois vers 22 heures », a fait savoir la vendeuse Fatou Ndiaye.

Dans toute activité, il faut de l’organisation. Et les vendeuses de fraises en sont très conscientes. C’est pourquoi elles ont mis en place une stratégie qui fonctionne. Au lieu de se regrouper toutes dans un seul lieu, elles servent par secteur. « Nous sommes une soixantaine de femmes qui s’activent dans ce commerce. Nous nous sommes organisées par groupe. Ici, c’est notre secteur à nous cinq. Les autres sont dans d’autres endroits où il y a des supermarchés. Mais, nous avons un groupe WhatsApp pour échanger », révèle l’aînée du groupe. Elle ajoute qu’elles ont également une tontine où elles cotisent, chacune, 5000 FCfa chaque mois. La somme totale encaissée est remise à une bénéficiaire. Une forme d’épargne à l’africaine.

Ousmane Wade