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Visite d’état du président de la République du Sénégal en Chine : Le nouvel élan d’une coopération (Kalidou DIALLO)

Rédigé par leral.net le Vendredi 14 Février 2014 à 17:58 | | 0 commentaire(s)|

Visite d’état du président de la République du Sénégal en Chine : Le nouvel élan d’une coopération (Kalidou DIALLO)
Pour mesurer l’ampleur du  renforcement  de la coopération économique et commerciale  entre la Chine et l’Afrique dans le cadre du  forum  de la coopération sino africaine et du sommet des chefs d Etat, il faut remonter à l’an 2000 et se rappeler que la première conférence ministérielle entre la Chine et l’Afrique s’est tenue à Beijing du 08 au 10 octobre de la même année  avec deux thèmes : « comment contribuer à l’instauration d’un nouvel ordre  politique et économique au 21éme siècle » ; « comment  renforcer lacoopération économique et commerciale entre la Chine et l’Afrique ? ».
Des mécanismes avaient été définis et un comité de suivi mis en place à cette occasion. Quatre chefs d’Etat africains seulement avaient participé à cette rencontre. Le Sénégal n’y était pas parce qu’ayant suspendu ses relations diplomatiques avec Beijing depuis février 1996.
La deuxième conférence ministérielle s’est tenue à Addis-Abeba les 15 et 16 décembre 2003.  Le nombre de participants au niveau présidentiel est passé à six  en plus du Président de la Commission de l’Union Africaine de l’époque, dirigée par Alpha Oumar Konaré,  de même qu’un représentant de  Koffi  Annan alors Secrétaire général des Nations Unies. Le thème  cette conférence tenue pour la première fois en Afrique était : «  coopération pragmatique et actions à entreprendre entre les pays africains et la chine. » Elle s’est tenue parallèlement à la première conférence des entrepreneurs chinois et africains.
Le volume de la coopération entre la Chine et l’Afrique avait augmenté de 75% entre 2000 et 2003. La conférence d’Addis-Abeba  avait défini un plan d’action pour 2004-2006. Il est   fondé sur l’accroissement de l’aide, le renforcement de la coopération et l’ouverture de la Chine au marché africain, les pays africains bénéficiant d’un statut de  destination privilégiées pour le tourisme chinois.
Tout ceci a été suivi par une tournée marathon du président Hu Jintao en Afrique en 2004 et 2005. L’ensemble de ces actions  explique, si besoin en était, la réussite du sommet Chine/Afrique de novembre 2006  qui a vu la participation d’une quarantaine de chefs d’Etat et de Gouvernement.  
Le Président Abdoulaye WADE était présent, étant donné que le Sénégal avait normalisé ses relations diplomatiques avec la Chine le 25 octobre 2005. Les échanges commerciaux connaissent dès lors un Grand Bon en Avant.  Le volume de la coopération a été ainsi multiplié par trois entre 2003 et 2006. Si on partait de 1994,  il a été multiplié par dix ! C’est à dire de 2,64 milliards de dollars us en 1994, 6,48 en  1999, 10,6 en 2000, 18 en 2003, 37 en 2005 et 39 en 2006. Huit mesures en faveur de l’Afrique sont prises par l’ancien Président HU JINTAO : création d’un fonds de développement sino-africain, l’annulation de la dette des pays pauvres très endettés et moins avancés.  L’ouverture du marché chinois aux pays africains avec l’augmentation du nombre de produits bénéficiant d’un tarif douanier zéro est passée de 190 à 440 produits. Il faut y ajouter le doublement de l’aide en 2009,  la construction du siège de l’union africaine, la formation des étudiants, la création de 3 à 5 zones de coopération économique etc. Selon son Excellence Monsieur XIA HUANG, ambassadeur de Chine au Sénégal dans un entretien récent, en 2012, le volume des échanges commerciaux sino-africains a atteint 198,4 milliards d’US dollars, un chiffre 19 fois plus important que celui de l'an 2000, avec un excédent de 27,9 milliards de dollars en faveur de l'Afrique. A la fin de l’an 2012, le stock des investissements directs chinois en Afrique s’est élevé à 21,2 milliards de dollars, et ce continent représente aujourd’hui la quatrième destination des capitaux chinois.
Le Sénégal n’est pas en reste dans ce vaste programme de coopération tant au niveau bilatéral que dans le cadre de la solidarité sud-sud et du forum sur la coopération sino-africain
Les relations d’amitiés entre le Sénégal et la République Populaire de Chine remontent à avril 1961 avec la participation de l’ambassadeur de Chine en république populaire de Guinée au 1er anniversaire de l’indépendance du Sénégal, alors que les deux pays n’avaient pas encore noué de relations diplomatiques. Sous l’impulsion de certains chefs d’Etat dont le Président Léopold Sédar Senghor, le groupe africain a joué un rôle important lors de la 26e session de l’assemblée générale des Nations Unies du 25 octobre 1971qui reconnut la Chine comme seule et unique représentant de ce pays à l’ONU, à la place Taiwan, par 76 voix dont 26 venant des pays africains.
Suspendues en janvier 1996 sous le régime socialiste, les relations diplomatiques entre la Chine et le Sénégal ont été reprises de nouveau le 25 octobre 2005. Les choses sont allées très vite. Le rythme des visites d’Etat dès le début de part et d’autre est le premier indicateur de la profondeur de cette amitié : visite officielle du Président de la République du Sénégal Maître Abdoulaye WADE en juillet 2006, précédée de celle du Premier Ministre de l’époque, Macky Sall accompagné d’une  forte délégation au mois de mai 2006. Ce furent ensuite plusieurs délégations au niveau ministériel sans compter les chercheurs, les chefs de service et le patronat. Au niveau de l’université de Dakar, le Recteur avait fait en 2006 trois semaines en Chine après le doyen de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines. C’est à l’issue de ces missions que la décision d’ouvrir un département de langue chinoise à l’Université Cheikh Anta Diop a été prise.
Dans le cadre d’une nouvelle ligne diplomatique en direction de l’Asie et de l’Amérique du sud, des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine) notamment, l’axe Dakar/Beijing s’est aussi très fortement renforcé. Le volume des échanges commerciaux passe de 196 millions de dollars à 846 millions de dollars en 2012. Le Sénégal bénéficie lui aussi du traitement douanier préférentiel zéro pour 95 % de ses produits à l’exportation (halieutiques, agricoles, miniers, cuir, peaux, bois, coton, artisanat, produits de mer, tourisme, textile et confection, télé service etc.) aujourd’hui une trentaine d’entreprises chinoises sont installées au Sénégal avec plusieurs autres petites installations commerciales dans les villes surtout à Dakar (Centenaire et Pétersen).  Le Grand théâtre national qui fait aujourd’hui la fierté de notre pays dans le domaine culturel et le musée de civilisations noires en construction sont un don de l’Etat chinois.
Les 11 stades régionaux, l’hôpital des enfants Dalal Jabot de Diamniadio, le centre de lutte contre le paludisme sont devenus une réalité à côté de la coopération sanitaire et agricole trentenaire (barrage d’afignam, 15 missions sanitaires en Casamance). Il faut ajouter entres autres,  le projet de l’arène nationale de lutte, du Boucle de Dakar, un réseau de transmission et de distribution électrique, le projet d’autoroute Thiès-Tivaouane-Touba).
La visite d’Etat prévue le 19 février 2014 du président Macky Sall en Chine comme premier dirigeant africain invité du Président XI JINPING va donner  un nouvel élan aux relations politiques et diplomatiques, et ouvrir un nouveau chapitre de renforcement de la coopération économique et culturelle entre les deux pays et raffermir l’amitié des deux peuples.
 
Kalidou DIALLO
Professeur au Département d’Histoire
FLSH, UCAD  
Ancien Ministre de l’Education Nationale
Président de l’Alliance des Leadership pour l’Emergence et le Développement (ALED)