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ABLAYE MBAYE, ARTISTE MUSICIEN "YOUSSOU NDOUR ET MOI. . ."

Rédigé par leral.net le Samedi 8 Novembre 2014 à 14:45 | | 0 commentaire(s)|

ABLAYE MBAYE, ARTISTE MUSICIEN "YOUSSOU NDOUR ET MOI. . ."


Quelques kilos de moins, c’est peut-être ce qui a changé en Ablaye Mbaye. Mais il est toujours jeune, plein de vie et très taquin. Trouvé chez lui à Fass, il parle de ses relations avec Youssou Ndour, revendique encore sa place dans le landerneau musical et promet de revenir très bientôt. Non pas pour faire ce que tout le monde fait mais, dit-il, pour proposer aux mélomanes de la vraie et bonne musique.

Vous êtes absent de la scène musicale et du marché du disque. Qu’est ce qui explique cette situation ?

Je suis là. Je fais de la musique comme toujours. Je ne peux être dans autre chose. La musique, c’est mon métier et ma passion. Je gagne ma vie grâce à la musique. Je me dis qu’au Sénégal, les gens font un amalgame sur la présence sur la scène musicale et la sortie d’albums. Il est vrai que cela fait longtemps que je n’ai pas sorti de nouvelles productions. Mais ce n’est pas pour autant que les mélomanes ne me voient pas. J’ai fait des duos avec des artistes de renom comme Pape et Cheikh ou encore Yoro Ndiaye et ce sont des duos réussis. Je peux comprendre l’absence du marché du disque mais pas de la scène musicale. Pour ça, je ne suis pas d’accord avec ceux qui le disent.

Pourquoi vous n’avez toujours pas sorti votre album ?

La première explication est que j’étais dans un projet de confection d’un album international. L’album est sorti en France. Et depuis deux ou trois ans, je travaille sur mon nouvel album. Il est prêt à 90%. Au début, une autorité de ce pays avait promis de me produire. J’attendais jusque-là qu’il le fasse. Il me donnait des dates et des échéances qu’elle ne respectait pas. Cela m’a pris deux ans. C’est après que j’ai commencé la conception avec mes propres moyens. J’y vais doucement. Je travaillais là-dessus avec l’instrumentiste et compositeur patron du label 1000 mélodies Baba Hamdy. Il a eu des problèmes au niveau de son studio et a même perdu quelques fichiers. Cela fait aussi partie de ce qui a retardé la sortie de l’album. L’autre chose est que c’est moi qui dois le terminer maintenant avec mes propres moyens. Alors je me dis que comme je suis resté longtemps sans sortir de nouvel opus, autant sortir un produit de haute facture. Je prends mon temps.

Qui vous avait promis de vous produire ?

Je ne veux pas encore dire son nom. C’est une autorité de ce pays. Il ne faut jamais dire jamais dans la vie. Donc, là à cet instant, je ne suis pas encore prêt à dévoiler son nom. Peut-être le ferai-je plus tard. Mais vraiment pas aujourd’hui car je ne sais pas ce qu’il pourra faire demain. J’ai de très bons rapports avec lui. Je ne pense pas qu’elle ne veuille pas le faire. C’est plutôt parce qu’elle était trop occupée. Et ça, je le comprends. Moi, je ne pouvais plus attendre et il y a des gens qui ne cessaient de me demander de sortir une nouvelle production.

N’êtes-vous pas en recul dans l’évolution de votre carrière musicale ?

Non, non pas du tout. Pour moi, tant que je vis, ma carrière n’est pas plombée. Avant que je n’entame ma carrière de musicien, je n’avais rien et personne ne me connaissait. J’ai réussi à acquérir une certaine notoriété et du respect. Si je crois en ça, je peux me dire que je peux aussi réussir aujourd’hui.

Donc, vous n’êtes pas d’avis que vous avez régressé au sein des leaders ?

Puisque vous le concevez ainsi, disons que c’est cela. Mais vous savez, cela ne sert à rien d’être bavard. Mieux vaut maîtriser ce que l’on dit que de parloter à gauche et à droite. Aussi, mieux vaut se battre pour rester aux premiers rangs quand on y arrive que de se battre juste pour l’atteindre. Dans une cité, on peut trouver de belles bâtisses. Mais le plus important est de savoir laquelle d’entre elles est la plus solide. Dieu merci, il est vrai que la sortie de ce présent album tarde mais dans le passé, j’étais très régulier. Je n’ai sorti deux produits en deux années consécutives qu’une seule fois. Pour tout le reste, il y avait au moins un intervalle de deux années. Pour la première fois, je suis resté presque dix ans sans composer de nouvelles chansons. Même entre-temps, j’ai pu réussir à sortir un album international qui n’est certes pas sorti au niveau national mais qui est disponible en France. Dieu merci, les duos que j’ai faits marchent bien. Ce ne sont pas mes produits mais mes collègues qui m’ont choisi ont eu confiance en moi et je crois ne pas avoir déçu. La musique, c’est un plus et chacun peut apporter quelque chose à l’autre. Ces gens qui ont porté leur choix sur moi espèrent peut-être que ma technique ou ma voix peut apporter quelque chose de plus. Quelqu’un qui a accusé du retard dans son évolution, à mon humble avis, ne peut être choisi dans ce cas de figure. Et là, je me produis ce dimanche par exemple à la Villa Krystal, le lundi je suis au Casino du Cap-Vert. Le 14 novembre, vendredi prochain, je suis à la "terrasse" du Terrou-bi. Le 26, logiquement je dois faire un concert ici à Fass. Je dois jouer aussi pendant la francophonie. Ça commence à tomber.

Les jeunes musiciens sénégalais qui ont tenté une carrière internationale en délaissant leur base locale n’ont pu réussir. Vous et Boy Marone en êtes les parfaites illustrations. Vous ne pensez pas que c’était une erreur ?

Je vous ai dit que quand je faisais mon album international, ce sont des Blancs qui sont de la même génération que moi et qui partagent ma vision qui l’ont conçu. Cet album n’est pas sorti ici. Mais il y a des titres qui passent au niveau des radios. Le tube indicateur du "wax sa xalaat" de la RFM, c’est une de mes chansons intitulée "na rafet". Il y a un clip qui a été fait mais je n’ai pas aimé la façon dont il a été tourné, c’est pourquoi je ne l’ai pas donné aux chaînes de télés locales. J’ai beaucoup de respect vis-à-vis des mélomanes. Je veux m’investir dans la qualité. Même si je ne gagne pas d’argent, ce qui m’intéresse, c’est le respect et la reconnaissance dans ce que je fais. La preuve, la manière dont est utilisée le titre "na rafet" par la RFM, je ne pensais pas à cela lors de sa conception. Et c’est un plus. Mon album est terminé. Il ne reste qu’un titre à faire.

Vous ne travaillez plus avec ces Français ?

Je n’étais pas dans un label. Ces gens sont mes amis. On avait une vision qu’on a voulu concrétiser. On l’a fait et on l’a sorti en se disant que cela pourrait intéresser quelqu’un. Après sa sortie, on a eu beaucoup de sollicitations. Mais on s’est dit qu’on allait attendre. On est un groupe et il faut un consensus. On attend d’être sur la même longueur d’ondes.

L’album est fin prêt, qu’attendez-vous ?

Je l’ai fait avec mes propres moyens. La sortie d’un album ne nécessite pas seulement les frais de studios. Cela demande énormément de moyens. Et actuellement au Sénégal, pour sortir et avoir la promotion qu’il faut, il te faut le soutien d’un support médiatique. Je suis en train de discuter avec deux médias. Il me reste à comparer ce que chacun d’eux me propose. Finir cet album ne pose pas problème. C’est ce qui suit qui peut être lourd.

Quels sont ces supports médiatiques ?

Est-ce important que je les nomme vu que je n’ai pas encore fait mon choix. J’attends de choisir pour donner le nom du groupe avec lequel je compte marcher.

Etes-vous prêt à travailler avec Prince arts ?

Vous savez moi, je crois qu’une personne doit être digne mais pas orgueilleuse. Je me dis à chaque fois que si Dieu enlève en moi la dignité, qu’il me tue à la minute qui suit. Si l’on est vraiment professionnel, on doit l’être jusqu’au bout des ongles. Si Prince Arts m’appelait aujourd’hui ou que je les appelle, si on s’accorde sur des modalités, je vais travailler avec eux. C’est vrai que j’aurais préféré avoir une chose qui m’appartienne personnellement. Je n’y arrive pas encore donc, si j’ai un partenaire qui peut le faire, tant mieux. Il y a des erreurs que je faisais il y a dix ou quinze ans que je ne répéterai pas aujourd’hui. Donc, je sais ce qu’est un partenariat win win. Je n’ai vraiment pas de problèmes sur ce planlà. Je suis un professionnel et je sais faire la part des choses.

Quel regard portez-vous sur l’évolution actuelle de la musique ?

Pour moi, les musiciens sénégalais ont accepté le diktat des mélomanes. Ces derniers aiment la musique rythmée. C’était à nous musiciens de dire non. Si on l’avait fait, ils allaient finir par nous rejoindre sur ce terrain. Au lieu de nous laisser leur proposer de la vraie musique puisque c’est notre profession, c’est eux qui nous exigent leurs rythmes. C’est pourquoi pour moi, on n’a presque plus de musique de recherche. Que ceux qui se retrouvent dans mes propos me pardonnent, mais c’est la vérité. Constatez par vous-même. Même pour avoir une musique consommable, il faut des reprises comme "la maladie d’amour de Sardou". Une chanson reprise par Alioune Mbaye Nder. Pour moi, on entend à peu près la même chose. Chacun privilégie la danse et les rythmes. On ne pense qu’à la vente.

On peut dire alors que vous ne comptez pas suivre la mouvance dans votre nouvel album ?

Il y a un peu de mbalax dedans, je l’avoue. On ne peut pas faire une rupture du tac au tac. Il y'a du mbalax mais aussi de la musique.

Vous aviez des rapports assez étroits avec Youssou Ndour, qu’en est-il aujourd’hui ?

Youssou Ndour, on a de très bons rapports. Cela me surprend que les gens disent que j’ai des problèmes avec lui. Le Sénégalais part souvent de certains faits pour faire des déductions non fondées. Peut-être que cela fait un moment qu’ils ne nous ont pas vu ensemble qu’ils se disent qu’il y a des problèmes. Mais il n’en est rien. Entre Youssou Ndour et moi, il ne peut y avoir de problèmes. Car j’aime Youssou Ndour et c’est grâce à lui que je suis devenu chanteur. La preuve, on me dit souvent que quand je chante, j’ai la même tonalité que lui. Il fait partie de ceux qui m’ont influencé. On n’a jamais eu de problèmes et on n’aura jamais de problèmes. Je le considère comme mon frère, mon père. J’ai beaucoup de respect pour lui. Il faut que les Sénégalais arrêtent de véhiculer des rumeurs qui ne sont pas fondées. A la TFM comme à la RFM, on fait passer mes chansons. Si je téléphonais tout de suite à Youssou Ndour, il me répondrait.

Comment vivez-vous votre handicap ?

Je le vis bien. Ce qui me dérange c’est la conception que la société sénégalaise a du handicap. Quand un Sénégalais voit un handicapé, il a tout de suite de la pitié pour lui. Et cela ne le rend pas fort mais au contraire l’affaiblit. On pense tout le temps que le handicapé ne peut rien faire. Alors que quand Dieu te prive de certaines choses, il t’en donne d’autres forcément. On peut toujours gagner notre vie à la sueur de notre front. On va réussir ou pas, cela dépend de Dieu. L’essentiel est d’essayer. Il est normal, quand on voit un aveugle se diriger vers un trou, de le réorienter par exemple. Mais il ne faut pas le plaindre. Il faut qu’on arrête de prendre les handicapés pour des incapables.