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Khalifa Sall, la survie politique - Par Cheikh Oumar Sow

Rédigé par leral.net le Mercredi 24 Février 2016 à 08:57 | | 0 commentaire(s)|

Le temps presse pour lui et il a encore tant d’obstacles à surmonter, notamment avec le pouvoir central, avec le Parti socialiste son propre parti et avec lui-même. Certes, le temps est le meilleur juge et le temps n’attend pas. Mais aussi, il y a ce qui relève de la responsabilité personnelle et du déterminisme pour mieux asseoir ses ambitions les plus légitimes. Mais l’homme ne parle pas, ne se détermine pas, il semble perdu dans un silence assourdissant et peut être dans des calculs de circonstance qui rendent ridicule les démarches de ses mouvements de soutien. Sur ce, autant se référer aux propos du Secrétaire général du Parti socialiste, Ousmane Tanor Dieng, qui dit que Khalifa n’a jamais déclaré sa candidature. Du coup, « pourquoi vouloir être plus royaliste que le roi », se demande-t-il, et de bonne guerre, en parlant des nombreux souteneurs de la candidature à la présidentielle du maire de Dakar. Et pourtant, il n’est plus si jeune, il n’a que deux élections présidentielles à faire au maximum. Le Parti socialiste n’est plus un parti au pouvoir et il n’a pas encore intégré cette donne dans sa volonté de reconquête démocratique du pouvoir, si cette volonté existe toujours, d’ailleurs. En clair, le Parti socialiste n’a pas encore fait sa mue de parti au pouvoir en parti d’opposition, en adaptant ses textes aux réalités du moment et du contexte pour la reconquête démocratique du pouvoir.

Khalifa Sall a été élu en 2009 à la Ville de Dakar et réélu en 2014 après plusieurs réalisations faites sous son magistère au profit des Dakarois. L’édile socialiste est un allié aux allures et au discours d’un opposant au pouvoir central, du moins, il agit en républicain qui est sur ses gardes et remplit sa mission de manière rigoureuse au profit de ses administrés. Mieux, il ne cède à aucune de ses prérogatives. Le Parti socialiste dont il fait partie est allié au président de la République, Macky Sall, président de l’Alliance pour la République (Apr). Malgré quelques désavantages imputés à la mise en œuvre de l’acte 3 de la décentralisation, Khalifa Sall a su sauvegarder les acquis d’une collaboration franche et pragmatique avec l’ensemble des élus de Dakar qui ont fait partie de la coalition « Taxawu Dakar » et qui forment le Conseil municipal de la Ville de Dakar. Ainsi, avec les différents partenaires de la Ville de Dakar, Khalifa Sall a su créer les conditions de contournement des difficultés et contraintes qui sapent le bon déroulement de sa mission et la réalisation des grands projets phares de son magistère. Un exemple de gouvernance qui a fini de convaincre les acteurs politiques conscients du fait que Dakar n’appartient à personne, à aucun parti politique, si ce n’est à celui qui fait des réalisations palpables au profit et aux yeux des Dakarois. Cela a d’une certaine manière une connotation politique au regard des grandes ambitions de Khalifa Sall qui sont déclinées par ses mouvements de soutien.
Mais, la réaction de Khalifa Sall à propos de la réduction du mandat du président de la République, après l’avis ou décision du Conseil constitutionnel, montre que le maire de Dakar commence à se réveiller. Comme qui dirait, désormais ce sera œil pour œil dent pour dent. Les relations entre le président de la République et le maire de la capitale semblent exécrables. Ils ne semblent pas toujours être sur la même longueur d’onde et ils ne partagent pas la même vision dans la gestion des affaires de Dakar. Il n’y a pas un dialogue fraternel autour des questions d’intérêt commun qui engagent la bonne gestion de la capitale. La question des marchands ambulants de la capitale est un dossier, parmi tant d’autres, qui devrait interpeller sur la même table le pouvoir central, les autorités municipales et les acteurs du secteur informel. Il y a un tapage par personnes interposées qui fait que les pistes se brouillent sur l’autel d’une élection ou réélection à la présidentielle de 2019.

La nomination de M. Abdoulaye Diouf Sarr au ministère de la Gouvernance Locale, du Développement et de l’Aménagement du Territoire, n’est pas neutre, au regard des ambitions de ce dernier de mettre la main sur la capitale. L’homme est un affidé du président Macky Sall et membre de l’APR, le parti au pouvoir. Il est tout aussi clair, que le ministère du Renouveau Urbain, de l’Habitat et du Cadre de vie, créé après les élections locales de 2014, ne doit son existence qu’à la volonté du chef de l’Etat de reprendre en main Dakar, en tirant les conséquences politiques de sa défaite à Dakar lors des dernières élections locales. Les réalisations relatives à l’amélioration du cadre de vie des Dakarois ont certainement convaincu le président Macky Sall et son Premier ministre, de la création d’un ministère en charge de ces questions et le bras de fer qu’il y a eu, ces derniers temps, sur la réhabilitation de la Place de l’Indépendance, était à la fois perceptible et prévisible. Il n’est pas à écarter que d’autres dossiers opposent Khalifa Sall au gouvernement. Cette divergence tient moins d’un conflit de compétences que d’un manque de dialogue, de concertation et de consensus autour des priorités de l’heure, sur fond de politique politicienne pour le contrôle de Dakar. C’est le soubassement conflictuel qui oppose les deux parties, une prolongation insidieuse des élections locales et municipales.

Cheikhou Oumar SOW
Journaliste
nourou1@live.fr