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La transhumance, une tare bien sénégalaise ( Par Silima Nieube Diouf)

Rédigé par leral.net le Mardi 7 Janvier 2014 à 19:38 | | 0 commentaire(s)|

Selon le dictionnaire Larousse, la transhumance est le déplacement saisonnier d'un troupeau en vue de rejoindre une zone où il pourra se nourrir, ou déplacement du même troupeau vers le lieu d'où il était parti. Aussi, le déplacement des ruches (abeilles) d'un lieu à l'autre pour suivre la floraison.


Dans le cas spécifique de la politique sénégalaise, le troupeau est constitué par les politiciens et la saison, le temps de l’exercice du pouvoir constitutionnel d’un parti ou d’une coalition, à savoir 5 ans au minimum et 10 ans au maximum. Et nos politiciens, ne sont nullement gênés ni indignés par la signification de la transhumance qui fait allusion à un animal domestique. Ils se plaisent même dans cette situation qui a fini de tuer le ridicule et qui frise maintenant la provocation. Car avec nos maigres ressources, on se permet d’entretenir des individus qui ne nous sont d’aucune utilité et nous confine dans un univers rétrograde.
Nous avons entendu Monsieur Abdou FALL, qui fut longtemps une référence politique, rejoindre la mouvance présidentielle, pour semble t-il, une raison aussi fallacieuse qu’aider Thiès à sortir de sa léthargie depuis 10 ans. En fait, le problème réside plutôt dans son incapacité à reprendre la Cité du rail des mains d’Idrissa Seck pendant toute cette période. Avec Abdoulaye WADE, il avait tous les moyens et a tout tenté en vain. Il en est de même des anciens ministres, DG ou PCA de Wade très nuancés dans leur propos et prompts à rejoindre la mouvance présidentielle.
Le modèle créé par les transhumants est très simple : au lendemain de la perte du pouvoir, on crée un mouvement pour se démarquer de son parti, ensuite on investit l’espace médiatique, pour enfin rejoindre la majorité au bout de quelques mois. L’objectif visé est d’obtenir un strapontin pour survivre à la dèche provoquée par la perte du pouvoir. Car, nos politiciens, pour la plupart, ne travaillent pas. On ne leur reconnait aucune expertise sinon d’être à côté du Président de la République comme ministre conseiller, chargé de mission ou PCA. L’opposition signifie pour eux un chemin de croix. Ils sont habitués à un standing de vie qui ne peut être satisfait qu’avec la proximité du pouvoir. C’est pathétique de rencontrer un politicien sénégalais qui se retrouve dans l’opposition : mal rasé, mal habillé, non véhiculé, incohérent dans ses analyses. Il convoque toujours l’intérêt général qu’il ignorait en étant au pouvoir pour justifier sa possible transhumance qui est son seul et unique salut.
Il existe, cependant, des références qui nous donnent une certaine fierté et nous incitent à s’engager dans la politique. Ils nous ont enseigné les valeurs de croyance, de dignité, de patience, de persévérance. Ils ont montré leur capacité à survivre grâce à leur compétence. C’est le cas des personnalités du parti socialiste (Tanor, Khalifa, Aïssata, Wilane…), de l’AFP (Niasse, Dr Malick Diop). Ceux qui sont restés avec Idrissa Seck ou accompagnés le Président Macky Sall. Egalement, des personnalités politiques qui ont rejoint le secteur privé ou les institutions internationales comme le Doyen Moctar Mbow, Jacques Diouf, le ¨Pr Ibrahima Fall, l’ancien ministre Assane Diop. Ces derniers forcent l’admiration et le respect.
Des compétences, c’est le talon d’Achille de nos politiciens. Ils ne brillent que par la politique politicienne à travers les débats radiotélévisés avec des arguments aussi saugrenus les uns que les autres. Le terme transhumant est vraiment adapté à leur situation.
Au Sénégal, la transhumance est devenue une banalité qui a fini de faire l’affaire des politiciens. On la présente comme une réalité politique admissible et tolérable au grand dam de la morale et de la dignité. Avec l’arrivée des républicains au pouvoir, on avait vraiment cru à une réduction sensible de ce phénomène. Hélas, le besoin de massification du parti, la reddition comptes et la peur de perdre les locales 2014, signe avant-coureur de la future présidentielle ont fini de montrer que les politiques sont dans l’incapacité de mettre fin à la transhumance. Seules les populations peuvent éradiquer cette gangrène en refusant de porter leur choix sur des transhumants pour être député ou pour présider aux destinées d’une mairie ou d’un département. Elles doivent vouer aux gémonies les transhumants, en refusant d’entendre leurs élucubrations, en les huant lors des manifestations politiques, en somme en jetant le discrédit sur eux. Leur dignité sapé tous les jours, ils finiront par donner le bon exemple et savoir que l’opposition fait partie d’une carrière politique. Il est hors de question que l’on retrouve toujours les mêmes personnes aux mêmes postes comme si le Sénégal sortait du néant. Des règles de conduite doivent être imposées aux politiciens notamment d’avoir un métier qu’ils sont amenés à exercer pendant la perte du pouvoir.
Le mouton, la vache ou la chèvre doit brouter pour nous servir du lait et de la viande. Par conséquent, la transhumance est cruciale pour satisfaire ce besoin de nourriture.
Le politicien, par contre, doit être privé des pâturages ou des floraisons (postes, deniers publics) pour le forger à être digne et à travailler dur pour reconquérir le pouvoir. Il doit se remémorer les 26 ans de lutte du Président Wade qui demeure le meilleur politicien de tous les temps. Aucune science politique ne peut expliquer le génie de cet homme en la matière. Et pourtant, il bravé le froid, la chaleur, la prison.
Le politicien doit aussi prendre pour exemple le Président Macky Sall qui n’a fait rien d’autre que parcourir le Sénégal, croire en lui même et lutter.
La capacité de survie de nos hommes politiques loin des privilèges du pouvoir est pour nous un instrument de mesure à la disposition du peuple. Un moyen de régulation et de moralisation de l’espace politique qui opérera une sélection naturelle des hommes politiques valables et par ricochet une limitation rationnelle des partis politiques.
Ainsi, la vie politique, sera animée par des hommes de qualité, avec des comportements enviables et des débats constructifs et enrichissants pour le développement de notre pays.

SILIMA NIEUMBE DIOUF
mohalamdiouf@gmail.com