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Une idole s’effondre. Merci Monsieur le président Abdou Diouf !

Le diable ou le mal ou encore le mauvais, a-t-on coutume de dire, est dans le détail. Ainsi, même si l’on n’y pense guère souvent, il y côtoie son ennemi intime, le bien ou le bon. De sorte que, à la lumière de tel ou tel détail, si minime soit-il, tel individu peut être réputé bon ou mauvais. Mieux, les grands hommes ne sont considérés comme tels qu’en vertu de tel ou tel détail qui, dans leurs actes ou actions, fait la différence.


Rédigé par leral.net le Jeudi 4 Décembre 2014 à 22:44 | | 0 commentaire(s)|

Une idole s’effondre. Merci Monsieur le président Abdou Diouf !
Cela, nous le tenons des Anciens, qui nous apprennent également que, si la vérité – en particulier la vérité de fait, incontestable en tant que telle – a de la force, la raison de l’autorité et la justice du pouvoir, toutes les trois sont sans éclat si elles ne sont revêtues de « la manière », en l’occurrence « la manière sénégalaise ». Ce n’est donc pas pour rien que l’on dit de la manière, c'est-à-dire de l’élégance, qu’elle est une vertu. Car elle peut suppléer à tout, y compris au défaut de la vérité, de la raison et de la justice réunies : seule l’élégance peut brider la rancune, la rancœur et le besoin de vengeance.

Or, en 2010 déjà, le président Abdou Diouf, ayant fait fi de cette prescription des Anciens, et à la faveur de ses laideurs intérieures du moment, avait dit ce qui suit au sujet de son frère-ennemi, l’abbé Augustin Diamacoune Senghor, rappelé à Dieu le 14 janvier 2007 : « …Mais de voir émerger, quand je suis devenu président, ce mouvement indépendantiste poussé par ce prêtre que je n’ose pas qualifier, cela m’a beaucoup déçu… Une fois que l’on a mis le doigt dans l’engrenage de la violence… parce qu’il n’y avait pas de revendication sérieuse, cela devient du banditisme… » Nous étions alors quelques « gardiens » de la mémoire de l’abbé Diamacoune à nous en émouvoir publiquement.

Aujourd’hui, dans ses Mémoires, le président Abdou Diouf remet ça, pour mettre notamment en cause son mentor, hors pair dans sa catégorie, Jean Colin, le juge Kéba Mbaye, l’intendant Colonel Omar Ndiaye, entre autres figures éminentes disparues, laissant ainsi pantois plus d’un, tandis que leurs ayants-droit n’ont plus que leurs yeux pour pleurer et leur amertume à opposer à l’ancien chef de l’Etat.

Quant à Messieurs Iba Der Thiam, Moustapha Niasse, Djibo Leiti Kâ et le général Louis Tavarez Da Souza, pour ne citer que ces personnalités encore en vie, disons que, à leur âge, ils sont suffisamment grands et aguerris pour se défendre, et tout seuls.

Au demeurant, les Mémoires du président Abdou Diouf dussent-ils n’avoir pour objectif que de servir le présent et la postérité que, déjà, ils participeraient d’une vocation transcendante. Par exemple, ils (re)questionneraient, ou (ré)interrogeraient, avec recul, le « problème casamançais », la gestion dioufiste de ce dernier, ainsi que le ressenti ou le ressentiment de l’homme qu’il est face à ce drame national. Aussi, un tel exercice d’introspection prospective le conduirait-il certainement à se souvenir, tout en informant, (i) que l’un de ses ministres était convaincu de collusion avec le Maquis casamançais, alors que lui, le président Abdou Diouf, avait été totalement impuissant devant la donne ; (ii) que, à cet effet, il ne pouvait, tout au plus, que lui interdire l’accès au Conseil des ministres pendant six mois environ ; (iii) que, en outre, en ayant agi de la sorte, il faisait écho à la voix de cet autre ministre de la République qui lui promettait que lui-même, le président Abdou Diouf, serait convaincu de forfaiture s’il venait à faire arrêter le ministre indélicat, d’autant que celui-ci était censé avoir été nommé ministre par le président Diouf suite à une enquête de moralité le concernant. Bien sûr, pour préserver sa réputation d’homme d’Etat, le président Abdou Diouf avait dû se raviser puis raser les murs, au grand dam des règles élémentaires de la République. Quid des plus-values ou moins-values que cela aurait procurées à la Nation ? Et que dire des incidences que cela aurait induites, aujourd’hui encore, dans la gestion du « problème casamançais » ?... Les Sénégalais, en particulier les Casamançais, aimeraient sûrement le savoir.

En tout état de cause, après avoir accusé le général Louis Tavarez Da Souza, à tort d’après ce dernier, d’avoir fomenté, en vain, un coup d’Etat en 1988, le président Abdou Diouf dit avoir jugé utile de laisser impuni l’acte incriminé, au nom de l’unité nationale et de la stabilité des institutions et de l’Etat. Soit ! Tous les officiers supérieurs, officiers et sous-officiers, originaires de la Casamance Naturelle, n’en sont pas moins condamnés, collectivement et indistinctement, au gel de leurs carrières professionnelles respectives à perpétuité. Le président Abdou Diouf l’avait voulu et décidé, et la République s’y est conformée. Et elle s’y conforme encore aujourd’hui, sans le moindre état d’âme.

En effet, l’accession au grade de général des armées ou de la gendarmerie relevant du pouvoir discrétionnaire du chef de l’Etat, les officiers d’origine casamançaise peuvent encore attendre, encore et encore, avant seulement de pouvoir en éprouver quelque espoir, qui plus est vain, et pour la joie certaine du président Abdou Diouf, quoique cela ne transparaisse pas dans ses Mémoires. Des Mémoires si adulés par les uns et si décriés par les autres. Des Mémoires mal écrits, car le président Abdou Diouf ne s’y est jamais exercé ou, plutôt, ne s’y était pas exercé jusqu’alors. En tout cas, ceux qui l’on approché, y compris parmi les mis en cause dans ses Mémoires, vont même jusqu’à suggérer qu’il ne lit jamais, ou pratiquement jamais. Alors, l’un dans l’autre, et le président Abdou Diouf d’accoucher des Mémoires comme ceux-là. Sacré président !

Dakar, le 4 décembre 2014.

Jean-Marie François BIAGUI
Président du Mouvement pour le Fédéralisme
et la Démocratie Constitutionnels (MFDC-fédéraliste)