Aissata Tall Sall, comme une abeille

C’est venu du Parti socialiste. C’est par ricochet que la question du mode de désignation des sénateurs (65 nommés par le président de la République et 35 désignés par les députés et élus locaux) est devenue un test pour savoir jusqu’où le tombeur de Me Wade ira dans le changement. S’il ne s’est pas encore officiellement prononcé sur la question, Macky Sall avoir opté pour le statu quo ante.

Si changement il devait y avoir, un projet de loi dans ce sens serait déjà sur la table des députés et, mieux, la date du scrutin a été fixée au 16 septembre. Va donc pour des sénatoriales où le statut d’élu sera usurpé pour la majorité d’entre eux. Me Aïssata Tall Sall a vigoureusement dénoncé vendredi 10 août cette position accordée au président de la République dans la configuration du Sénat, nécessairement aplati devant l’exécutif, alors qu’elle est la chambre haute du Parlement. Le Sénat, version Wade, avait ceci de particulier que son président est (et est toujours) le dauphin constitutionnel. Et puis, les Assises nationales avaient fait de la suppression du Sénat une priorité. C’est un puissant plaidoyer qu’elle oppose à cette volonté de perpétuer la caricature d’une Institution…

Comme une abeille, elle butine pour porter la parole socialiste ; mais elle sait piquer. C’est donc l’un des dossiers les plus gênants pour la majorité présidentielle que Me Aîssata Tall Sall a sorti du manche de sa robe pour avancer des pions sur l’échiquier de sa propre formation politique, le Ps, dont elle est la porte-parole, alors que le secrétaire général du vieux parti, Ousmane Tanor Dieng vient de démissionner de son mandat de député, sur fond de batailles féroces à venir. Des interrogations subsistent à propos de la stratégie que va adopter Ousmane Tanor Dieng.

A-t-il laissé sa place de député au jeune socialiste Maguette Diokh pour prendre le perchoir du Sénat ? Qu’en est-il de la direction du parti ? Un comité central du Ps est annoncé dans quelques semaines. En tout cas, un peu avant la présidentielle de 2012, Ousmane Tanor Dieng avait déclaré que ce serait sa dernière. Mais il entretient le flou. Naturellement, seuls des renouvellements suivis d’un congrès pourraient apporter des changements profonds, mais depuis 1998, l’ancien bras droit du président Diouf a assis son leadership ; et il contrôle son appareil. Certes, il avait été désavoué par ses camarades lors de la crise ivoirienne de 2010, quand il avait apporté un soutien à son ami, Laurent Gbagbo, mais d’avoir su refonder le Ps en le rajeunissant, d’avoir su être constant dans son opposition à Me Wade, les multiples congrès, l’ont rendu légitime. Mais, ses vingt députés cachent mal ses faibles scores électoraux.

PIQÛRE DE RAPPEL

Le flou entretenu sur les intentions du président de l’Interafricaine socialiste ont suscité une piqûre de rappel venue de la mairesse de Podor, élue, elle aussi, sur la liste départementale, qui ne cache plus ses ambitions. C’est par une indépendance affichée et voulue qu’elle n’a pas participé aux tractations du groupe « Bokk Yakaar » lors du choix des présidents des commissions techniques de l’Assemblée nationale, le mercredi 08 août dernier.

La dernière ministre de la Communication du président Diouf (1998-2000) ne siègera pas au bureau de l’Assemblée nationale. Pas plus qu’elle n’a fait partie des trois personnes désignées pour siéger au gouvernement, au nom de « Benno Ak Tanor » : Serigne Mbaye Thiam (Enseignement supérieur), Mme Aminata Mbengue Ndiaye (Elevage) et Ali Haïdar (Ecologie et Protection de la nature).

Juin 2012, au plus fort de la charge à la hussarde de Malick Noël Seck contre son secrétaire général, lui reprochant l’effritement de leur électorat et la nécessité pour lui de passer la main, avec, à la clé, une convocation du leader de « Convergence socialiste » par le conseil de discipline qui a proposé son exclusion de la formation, Me Aïssata Tall Sall a été l’un des rares responsables socialistes à prendre sa défense.

« Ils sont en train de lui faire un mauvais procès car qui connaît Malick Noël sait que c’est un homme libre. C’est son indépendance qui lui a valu ses deux séjours en prison », avait déclare la mairesse de Podor. Cela avait fait jaser à la Maison du parti et dans les médias, mais elle sait que leur formation est en mesure de surprendre son monde en réalisant une alternance à sa tête. Car il faut bien penser à l’après-Tanor. La présidentielle de février/mars 2012 avait freiné les contradictions, mais

L’avocate compte jouer sur les attentes en termes de démocratie interne dans les partis politiques –et surtout au Ps !- pour tracer sa voie car il est clair qu’elle est candidate au poste de secrétaire général du Ps. En attendant, elle va jouer à fond la carte de l’Assemblée nationale. Faire entendre sa voix. Et il n’est pas exclu que, selon les circonstances, elle devienne de plus en plus discordante. En attendant, elle pique, comme pour dire aux leaders de partis (principalement OTD) qui entourent le président Macky Sall, que les dangers ne sont pas là où ils le pensent.

En attendant, c’est un silence gêné dans les rangs de la majorité présidentielle– et pas seulement à cause du ramadan- qui a accueilli sa protestation. Car elle a posé un vrai débat : est-il normal que les 65 % des sénateurs soient nommés par le chef de l’Etat ?



Source:NETTALI.NET