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Exclusivité Leral.net – Rétrocommissions et contrats écrans : la corruption change de visage

Rétrocommissions et contrats fictifs : la CENTIF expose les mécanismes de blanchiment liés à la corruption et au trafic d’influence. Dans son rapport 2024, un dossier illustre un système de pots-de-vin international impliquant des fonds publics sénégalais et des acteurs privés locaux et étrangers.


Rédigé par leral.net le Samedi 20 Septembre 2025 à 10:56 | | 0 commentaire(s)|

Au cœur de ce cas, une entité publique au Sénégal a versé plus de 1,5 milliard FCFA (en euros) à un cabinet de conseil basé en Europe, officiellement pour régler un contentieux juridique avec une société étrangère.

Or, l’enquête a révélé qu’une grande partie de cette somme a ensuite été réacheminée vers le Sénégal : les fonds ont transité depuis le cabinet européen (BETA dans le rapport) vers une société privée sénégalaise dénommée “GAME”, liée à un homme d’affaires influent (Monsieur X).

Comment justifier ce retour d’argent ? Les investigations de la CENTIF ont mis au jour un contrat d’apporteur d’affaires signé entre le cabinet BETA et la société GAME. Ce contrat prévoyait que GAME touche une commission équivalente à 20% des honoraires générés par BETA à chaque affaire apportée.

Officiellement, donc, GAME aurait aidé BETA à décrocher le marché du contentieux et se fait rémunérer pour cela. Sauf que la CENTIF a constaté un écart énorme entre ce qui était prévu et ce qui a réellement été payé à GAME : bien plus que 20% des honoraires convenus. Cela suggère l’existence de rétrocommissions occultes, où GAME recevrait en réalité des fonds sans lien avec une prestation réelle.

En clair, une partie de l’argent public versé au cabinet étranger est revenue déguisée en “commission” à des acteurs privés au Sénégal – possiblement pour rémunérer des interventions ou influences cachées. Le rapport indique que Monsieur X, dirigeant de GAME, est réputé proche de décideurs publics et de directeurs de sociétés nationales, ce qui alimente les soupçons de trafic d’influence dans cette affaire.

Aux termes de son enquête, la CENTIF conclut à des indices graves et concordants de blanchiment de capitaux issus de corruption, trafic d’influence et association de malfaiteurs. Le dossier a été transmis aux autorités judiciaires pour qu’elles approfondissent et sanctionnent ces faits.

Ce cas illustre comment des schémas sophistiqués de fausse facturation transfrontalière peuvent servir à cacher des pots-de-vin. Le rapport souligne par ailleurs que la corruption demeure l’une des infractions sous-jacentes les plus fréquentes en 2024 (138 déclarations de soupçon, +5% par rapport à 2023). La CENTIF appelle donc à renforcer la transparence dans les marchés publics et les contrats de conseil, et à surveiller de près les flux financiers avec l’étranger lorsqu’ils impliquent des entités publiques nationales.
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