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Haute Cour de Justice -L’ancienne ministre Salimata Diop, visée par une procédure de mise en accusation : ce que révèle son dossier

L’ancienne ministre de la Femme, de la Famille, du Genre et de la Protection des Enfants, Salimata Diop, est officiellement visée par une procédure de mise en accusation devant la Haute Cour de Justice. La décision a été adoptée à la majorité par la Commission des Lois, de la Décentralisation, du Travail et des Droits humains de l’Assemblée nationale, réunie le 2 mai 2025 sous la présidence du député Abdoulaye Tall. Cette procédure fait suite à une saisine du ministre de la Justice, Ousmane Diagne, transmise au président de l’Assemblée nationale par courrier daté du 14 avril. Elle repose sur les révélations accablantes d’un rapport de la Cour des comptes sur la gestion des fonds destinés à la riposte contre la COVID-19 par le ministère dirigé alors par Salimata Diop.


Rédigé par leral.net le Samedi 10 Mai 2025 à 22:45 | | 0 commentaire(s)|

Des fonds COVID détournés ou mal justifiés

Selon ce rapport, le ministère avait bénéficié d’une enveloppe de 150 millions de FCFA, dans le cadre du Fonds de riposte et de solidarité. Sur cette somme, plusieurs irrégularités majeures ont été constatées :

• 36 millions de FCFA de dépenses auraient été justifiés par des pièces déjà utilisées pour des opérations antérieures de la caisse « aide et secours » ;
• Des versements à des individus aux identités douteuses ou similaires (mêmes noms, prénoms, CNI ou adresses), pour un total de 52,2 millions de FCFA ;
• 22,3 millions de FCFA auraient été redistribués aux agents du ministère, alors que cette somme était censée financer le retrait des enfants de la rue ;
• Une somme de 4,8 millions de FCFA reste sans aucune pièce justificative.


Faux documents, signatures falsifiées et bénéficiaires fictifs

L’enquête révèle un système de fraude bien organisé, avec l’usage de fausses décharges, l’imitation de signatures, et des paiements versés à des tiers non informés, rattachés frauduleusement à des structures. Plusieurs responsables d’organismes tels que le Samu Social, Dakar Actu, le Centre Éducation Spécialisée ou encore le GIE Lawtaw ont formellement nié avoir signé les pièces justificatives qui leur sont attribuées.

Autre fait troublant : des climatiseurs achetés sur fonds publics auraient été livrés au domicile personnel de la ministre, selon les témoignages recueillis au cours de l’enquête.

Le DAGE charge l’ex-ministre

L’ancien Directeur de l’Administration générale et de l’Équipement (DAGE), entendu par la Division des Investigations Criminelles, a affirmé avoir agi avec l’aval explicite de Salimata Diop. Selon lui, chaque décaissement litigieux s’est fait sur instruction écrite ou orale du ministre. Il reconnaît également avoir utilisé de faux documents pour couvrir certaines dépenses, toujours sous l’impulsion de « l’Autorité ».

Une mise en accusation prévue par la Constitution

En vertu de l’article 101 de la Constitution, les membres du gouvernement sont pénalement responsables des actes qualifiés de crimes ou délits commis dans l’exercice de leurs fonctions. La loi prévoit leur jugement devant la Haute Cour de Justice. C’est sur cette base que le ministre de la Justice a sollicité la mise en accusation de Madame Diop, pour complicité de détournement de deniers publics portant sur 57 062 000 FCFA.

Les articles 45-3, 46 et 152 du Code pénal, ainsi que l’article 140 du Code de procédure pénale, sont cités à l’appui de cette procédure.


Une décision politique et judiciaire attendue

En adoptant à la majorité le projet de résolution, la Commission des Lois a ouvert la voie à un vote en séance plénière. Si les députés valident la mise en accusation, Salimata Diop deviendra l’une des premières anciennes ministres de l’ère Macky Sall à être traduite devant la Haute Cour de Justice. Ce dossier pourrait bien marquer un tournant dans la reddition des comptes, promise par les nouvelles autorités.