JUAN BRANCO SUSPENDU NEUF MOIS

(SenePlus) - Juan Branco, l'avocat franco-espagnol de 36 ans qui s'est fait connaître au Sénégal pour son engagement aux côtés d'Ousmane Sonko et du Pastef, vient d'être lourdement sanctionné par ses pairs en France. Le Parisien révèle vendredi qu'il est "suspendu de robe pour neuf mois, pour avoir violé le secret de l'enquête le visant pour viol".

Cette suspension, prononcée en première instance par le conseil de discipline du barreau de Paris le 8 octobre 2024, a été confirmée en appel par un arrêt du 16 octobre dernier. "La décision est effective depuis mardi", précise le quotidien français, citant des sources proches du dossier.

Juan Branco, "mis en examen pour viol dans une information judiciaire ouverte à Paris en 2021, des faits qu'il conteste", a été condamné pour des violations graves de la déontologie de sa profession.

Il lui est notamment reproché d'avoir "publié en juin 2023, sur son compte X (ex-Twitter) et sur son site Internet, des extraits d'une procédure judiciaire, notamment des procès-verbaux d'audition de plusieurs femmes qui le mettent en cause, qu'il a dénigré et qu'il accuse de mentir".

Le Parisien précise qu'il "a aussi été condamné pour avoir discrédité publiquement magistrats et enquêteurs ayant œuvré dans son dossier".

Les termes employés par ses pairs sont particulièrement sévères. En première instance, le conseil de discipline avait évoqué "une affaire d'une 'gravité exceptionnelle' à cause du 'caractère réfléchi des attaques' de Juan Branco qui 'a fait preuve d'un mépris flagrant pour les principes déontologiques les plus élémentaires'".

Plus grave encore, le conseil de discipline avait accusé Me Juan Branco d'"incompréhension manifeste des exigences fondamentales de (sa) profession".

Ces accusations portent un coup sévère à la crédibilité d'un avocat qui s'est construit une image de défenseur des opprimés et des causes politiques, notamment au Sénégal où il a été très présent durant la crise politique de 2021-2024.

Un parcours médiatique controversé

Le Parisien rappelle le profil de cet avocat atypique : "Franco-espagnol, cet homme de 36 ans est connu pour son pamphlet anti-Macron 'Crépuscule' publié en 2018."

Sa carrière est jalonnée de dossiers médiatiques et polémiques. "Il a notamment défendu un temps l'artiste russe Piotr Pavlenski, condamné pour avoir diffusé des vidéos à caractère sexuel de Benjamin Griveaux en 2020, contraignant ce dernier à abandonner la course à la mairie de Paris."

Plus récemment, il a défendu "'Zoé Sagan', pseudo du publicitaire Aurélien Poirson-Atlan, mis en cause pour le cyberharcèlement transphobe de Brigitte Macron. L'audience est prévue lundi 27 et mardi 28 octobre."

La suspension de neuf mois n'est pas la seule épée de Damoclès au-dessus de la tête de Juan Branco. Le Parisien révèle que "mercredi 15 octobre, dans un autre dossier de manquements allégués aux principes de sa profession qu'il conteste, Me Juan Branco a été jugé en première instance par ses pairs".

L'avocat "a indiqué sur X que 'trois ans ferme de suspension' ont été requis à son encontre" dans cette nouvelle procédure. Si cette réquisition était suivie, cela signerait potentiellement la fin de sa carrière d'avocat en France.

Fidèle à sa stratégie de communication offensive, Juan Branco a réagi sur le réseau social X. "Sollicité par l'AFP, Juan Branco s'est dit dans un long message 'particulièrement ciblé depuis plusieurs années par le pouvoir' et a dénoncé 'une instrumentalisation unique de la justice ordinale' concernant cette dernière procédure", rapporte Le Parisien.

Son avocat, quant à lui, n'a pas répondu aux sollicitations de l'AFP, note le quotidien français.

Pour le public sénégalais, Juan Branco est surtout connu pour son engagement aux côtés d'Ousmane Sonko durant les crises politiques de 2021 à 2023. L'avocat français s'était rendu à plusieurs reprises à Dakar, avait participé à des conférences de presse aux côtés du leader du Pastef, et avait médiatisé internationalement ce qu'il présentait comme une répression politique du régime de Macky Sall.

Sa proximité avec Sonko et le Pastef avait fait de lui une figure clivante au Sénégal : héros pour les supporters de l'opposition, activiste étranger se mêlant des affaires intérieures pour le camp présidentiel de l'époque.

Branco avait notamment dénoncé ce qu'il appelait un "complot" contre Sonko dans l'affaire Adji Sarr, et avait mobilisé des réseaux internationaux pour faire pression sur le régime sénégalais. Sa stratégie de communication agressive et sa maîtrise des réseaux sociaux avaient contribué à internationaliser la crise politique sénégalaise.