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Journée nationale de la Diaspora : Oumou Cissokho exhorte les Sénégalais de l’extérieur à changer la donne politique

Rédigé par leral.net le Lundi 15 Décembre 2025 à 23:19 | | 0 commentaire(s)|

XALIMANEWS: À l’occasion de la Journée nationale de la Diaspora, la rédaction de Xalima a accordé un entretien à Oumou Cissokho, chargée de communication de la plateforme Sénégal Bi Ñu Bokk France. Militante engagée et voix critique du pouvoir en place, cette actrice politique de la diaspora sénégalaise en France incarne une génération de femmes […]

XALIMANEWS: À l’occasion de la Journée nationale de la Diaspora, la rédaction de Xalima a accordé un entretien à Oumou Cissokho, chargée de communication de la plateforme Sénégal Bi Ñu Bokk France. Militante engagée et voix critique du pouvoir en place, cette actrice politique de la diaspora sénégalaise en France incarne une génération de femmes déterminées à faire de l’engagement citoyen un véritable levier de transformation démocratique.

Dans un contexte politique et économique marqué par de fortes attentes populaires, des promesses de rupture encore inachevées et une diaspora de plus en plus consciente de son poids, Oumou Cissokho livre une analyse sans détour. Elle interpelle les autorités sur la nécessité de dépasser les discours symboliques pour instaurer une réelle inclusion des Sénégalais de l’extérieur dans les décisions nationales, tout en appelant la diaspora et la jeunesse à rester mobilisées.

En tant que responsable politique vivant en France, quel sens donnez-vous à la Journée nationale de la Diaspora dans le contexte politique actuel du Sénégal ?

En tant qu’actrice politique, je considère cette journée comme un véritable, et énième, appel à l’action. C’est un moment crucial pour renforcer les liens entre la diaspora et le pays d’origine.

Dans le contexte actuel, où le Sénégal fait face à d’importants défis politiques et économiques, il est essentiel de reconnaître le rôle que les Sénégalais de l’étranger peuvent jouer. La diaspora peut apporter des idées nouvelles, des ressources financières et une expertise précieuse, contribuant ainsi au développement du pays.

Cette journée devrait aussi servir à rappeler au gouvernement la nécessité d’établir des liens authentiques avec sa diaspora, en l’impliquant réellement dans les décisions qui concernent le pays. Des exemples existent, comme celui du Ghana à travers l’initiative “Roots to Ghana”.
Vingt experts issus de la diaspora ghanéenne, basés en France, en Belgique, aux Pays-Bas, en Espagne et en Italie, ont été mobilisés pour des missions de terrain. Leur objectif était non seulement d’apporter leur expertise dans des secteurs clés, mais aussi de renforcer les compétences locales et de stimuler l’innovation au service du développement économique et social.

Selon vous, le nouveau régime accorde-t-il une place réelle et stratégique à la diaspora, ou s’agit-il surtout d’un discours symbolique ?

Bien que le nouveau régime ait promis de valoriser la diaspora, les actions concrètes restent très limitées. Les discours sont souvent déconnectés des réalités vécues par les Sénégalais de l’extérieur.

Pour que la diaspora occupe une place véritablement stratégique, il faut mettre en place des politiques claires : des consultations régulières, des mécanismes de participation efficaces et une écoute réelle de leurs préoccupations. Il est urgent de passer du symbolique au concret.

Des promesses avaient été faites, notamment sur l’extension de la durée de validité des passeports sénégalais à dix ans, contre cinq actuellement. À cela s’ajoutaient des annonces concernant des programmes de retour et de réinsertion pour les Sénégalais de la diaspora. Or, ces programmes sont souvent inexistants, mal documentés ou inaccessibles, ce qui décourage fortement ceux qui souhaitent rentrer et contribuer au pays.

Vous êtes très critique à l’égard du pouvoir en place. Quelles sont, selon vous, les principales ruptures promises qui tardent encore à se concrétiser ?

Les principales ruptures concernent avant tout la transparence dans la gestion des affaires publiques et une lutte réelle contre la corruption. Aujourd’hui, nous assistons plutôt à une chasse aux opposants et à un mépris manifeste de la presse.

Les promesses de réformes institutionnelles, de justice sociale et de dialogue avec toutes les parties prenantes étaient pourtant au cœur du projet porté par le pouvoir. Des assises de la justice ont bien été organisées en début de mandat, mais beaucoup des recommandations issues de ces rencontres restent sans suite.

Par ailleurs, la lutte contre les inégalités avait été annoncée comme une priorité. Pourtant, les conditions de vie des Sénégalais ne s’améliorent pas, ce qui interroge sérieusement sur la volonté politique de répondre aux attentes profondes du peuple.

Quel rôle la diaspora sénégalaise peut-elle jouer, depuis l’étranger, dans la consolidation de la démocratie et le contrôle citoyen de l’action publique ?

La diaspora a un rôle fondamental à jouer dans la consolidation de la démocratie. Un exemple marquant est celui des Sénégalais de France mobilisés en 2012 pour dénoncer les dérives du régime de Abdoulaye Wade.

Plus récemment, en 2024, cette même diaspora s’est fortement mobilisée contre un troisième mandat de Macky Sall et a largement contribué au succès du pouvoir aujourd’hui en place. Elle peut donc agir comme une véritable vigie démocratique, en observant les processus électoraux et en dénonçant les abus.

En mobilisant des ressources financières, humaines et intellectuelles, la diaspora peut aussi soutenir des initiatives locales de renforcement de la société civile et de promotion de la bonne gouvernance. Elle crée enfin des réseaux de solidarité qui consolident les liens entre Sénégalais, qu’ils vivent au pays ou à l’étranger.

À l’occasion de cette Journée nationale de la Diaspora, quel message adressez-vous aux Sénégalais de l’extérieur et aux jeunes qui attendent un véritable changement ?

Je voudrais rappeler à nos compatriotes de la diaspora que leur voix compte. Ils ne doivent pas rester spectateurs, mais s’impliquer activement dans les débats sur l’avenir du Sénégal.

Chaque action compte. Engageons-nous, portons nos idées et nos visions pour notre pays. Les jeunes, en particulier, doivent être des acteurs du changement, en utilisant les outils numériques et les réseaux sociaux pour s’organiser et faire entendre leurs aspirations.

En unissant nos forces, nous pouvons accélérer le changement et construire un Sénégal où chaque citoyen, où qu’il se trouve, a pleinement sa place. Un Sénégal où la démocratie est une réalité vécue, et non un simple rêve.

Interview réalisée par Papa Ibrahima Diop Vito, Xalima le 15 décembre 2025



Source : https://xalimasn.com/2025/12/15/journee-nationale-...