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Journée nationale de la Diaspora du 17 décembre 2025 : Le journaliste Mayacine Diop souligne le rôle central et les défis des Sénégalais de l’extérieur

Rédigé par leral.net le Dimanche 14 Décembre 2025 à 20:57 | | 0 commentaire(s)|

À l’occasion de la Journée nationale de la Diaspora qui aura lieu le 17 decembre 2025, le journaliste Mayacine Diop souligne le rôle central et les défis des Sénégalais de l’extérieur. Mayacine Diop, journaliste sénégalais de renom, résidant à Bordeaux (France), partage son regard éclairé sur la place, les défis et les attentes des […]

À l’occasion de la Journée nationale de la Diaspora qui aura lieu le 17 decembre 2025, le journaliste Mayacine Diop souligne le rôle central et les défis des Sénégalais de l’extérieur. Mayacine Diop, journaliste sénégalais de renom, résidant à Bordeaux (France), partage son regard éclairé sur la place, les défis et les attentes des Sénégalais vivant à l’étranger, dans un entretien accordé à la rédaction de "Xalima".
Reconnu pour sa sagesse, son professionnalisme et sa longue expérience, il rappelle combien la diaspora est un acteur stratégique, économique, social et politique du Sénégal, mais qui reste confrontée à des obstacles persistants, qu’il appelle à résoudre concrètement

En tant que journaliste sénégalais vivant en France, comment analysez-vous aujourd’hui la place et le rôle de la diaspora dans le débat public et politique au Sénégal ?

La place et le rôle de la diaspora dans le débat public et politique au Sénégal sont aujourd’hui incontestables. La diaspora doit occuper une place à part entière, au même titre que tous les autres acteurs du débat public national.

Elle joue un rôle central sur les plans économique, social et politique. Son influence est visible jusque dans les grands projets politiques structurants. À titre d’exemple, le projet de Pastef a largement bénéficié de l’apport intellectuel et stratégique d’acteurs issus de la diaspora.
Cela confirme une évidence : la diaspora n’est pas un acteur secondaire, elle est légitime, centrale et incontournable dans la construction du débat public sénégalais.

La diaspora contribue fortement à l’économie nationale, notamment à travers les transferts de fonds. Pensez-vous que son poids réel est suffisamment reconnu et valorisé par les autorités ?

Objectivement, le poids réel de la diaspora n’est pas encore suffisamment reconnu ni valorisé. Certes, des discours existent, mais les mécanismes concrets d’accompagnement et de structuration restent insuffisants.

La diaspora ne se limite pas aux transferts de fonds. Elle apporte des compétences, des réseaux, une expertise et une capacité d’investissement qui dépassent largement l’aspect financier. Or, cette richesse humaine et intellectuelle n’est pas encore pleinement intégrée dans les politiques publiques de développement.

Il faut dépasser la logique symbolique et aller vers une valorisation structurelle, fondée sur des dispositifs clairs, transparents et durables.

Quel regard portez-vous sur le traitement médiatique du Sénégal depuis l’étranger, et en quoi la position de journaliste de la diaspora permet-elle une lecture différente de l’actualité nationale ?

J’ai été l’un des premiers acteurs de l’information sénégalaise depuis la diaspora à la fin des années 1990, à une époque où Internet était quasiment inexistant au Sénégal. Seule la diaspora, notamment en Europe et en Amérique du Nord, y avait accès.

À l’époque, quelques plateformes comme Metissacana, Sud Communication ou Le Soleil permettaient une diffusion minimale de l’information. Nous faisions un travail de synthèse et de contextualisation, avec rigueur et responsabilité.

Aujourd’hui, le paysage médiatique a profondément changé. Tout le monde produit de l’information, souvent sans filtre. Avec l’explosion du numérique et l’arrivée de l’intelligence artificielle, il devient de plus en plus difficile de distinguer le vrai du faux.
Le journaliste de la diaspora apporte un regard extérieur, un recul analytique différent. Mais cette différence est de moins en moins comprise, car le public ne distingue plus clairement entre celui qui traite l’information et celui qui se contente de la révéler sans vérification.

Cette confusion a favorisé l’émergence d’auto-informateurs, ce qui affaiblit la crédibilité du métier. La liberté d’expression est essentielle, mais elle doit impérativement s’accompagner de responsabilité, de professionnalisme et du respect des règles.

Selon vous, quels sont les principaux défis auxquels sont confrontés les Sénégalais de la diaspora aujourd’hui, notamment en Europe ?

Les difficultés restent globalement les mêmes depuis plusieurs années, principalement en raison de l’absence d’une politique migratoire claire et structurée.

L’un des premiers problèmes concerne l’accès aux documents administratifs, notamment la carte nationale d’identité biométrique et le passeport. Ces démarches sont encore trop centralisées et complexes. Une décentralisation des centres de production faciliterait considérablement la vie des Sénégalais de l’extérieur.

La question du retour au pays reste également floue. Beaucoup de Sénégalais de la diaspora, surtout en Europe, ne disposent pas d’informations claires sur les démarches, l’accès au logement, aux projets agricoles, immobiliers ou économiques.

Il y a aussi des situations spécifiques, comme celles des retraités sénégalais à double nationalité ou des anciens combattants, dont les pensions restent profondément inéquitables. Ces questions doivent être traitées au niveau bilatéral avec les États européens et l’Union européenne, afin de favoriser un retour digne et durable.

À l’occasion de cette Journée nationale de la Diaspora, quel message souhaitez-vous adresser aux nouvelles autorités et à la jeunesse sénégalaise ?

La diaspora a longtemps été utilisée comme une cible politique, sans véritable politique de fond. Aujourd’hui, elle ne peut plus être réduite à un simple enjeu électoral ou économique. Elle influence le vote, contribue aux projets nationaux et intervient dans tous les secteurs de la vie du pays.

La Journée nationale de la diaspora ne doit pas être un événement symbolique de plus. Le temps des conférences sans impact est dépassé. Ce que nous attendons, ce sont des actions concrètes, une politique migratoire claire, inclusive et équitable.

L’État doit renforcer les liens entre la diaspora et des structures comme l’APIX, l’ANPEJ ou les consulats, faciliter la mobilité, le retour et l’investissement.
Participer au développement national doit se faire dans la neutralité, l’inclusion et l’équité, sans exclusion fondée sur l’appartenance politique.

Pour être franc, je n’attends pas grand-chose d’une journée si elle reste symbolique. Ce que j’attends, c’est du concret, afin d’améliorer durablement la relation entre la diaspora et l’État sénégalais. C’est là, selon moi, la véritable mission des autorités.

Papa Ibrahima Diop Vito, Xalima 14 décembre 2024



Source : https://xalimasn.com/2025/12/14/journee-nationale-... XALIMANEWS