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Lendemain de massacres à Conakry : dadis, un dicta-tueur est né

Au lendemain de la répression sanglante contre des manifestants, les militaires guinéens sont bien mal en point pour donner un bilan crédible sur le nombre de morts. Ils s’en tiennent aux «53 morts par asphyxie» et «4 victimes de balles perdues», alors que des sources hospitalières avancent le chiffre de 200 tués.


Rédigé par leral.net le Mercredi 30 Septembre 2009 à 14:32 | | 0 commentaire(s)|

Lendemain de massacres à Conakry : dadis, un dicta-tueur est né
Mardi, la morgue du Chu de Donka, sous haute protection de gendarmes, manquait de places. Déposés parfois à même le sol, 28 corps dont ceux d’un bébé de deux mois et sa mère attendaient d’être enlevés par des proches. Un spectacle déchirant qui n’a pas laissé indifférent le Secrétaire général des Affaires religieuses. En visite guidée, en compagnie des leaders des confessions religieuses, Dr Koutoub Moustapha Sano n’a pu retenir ses larmes… Et le bilan provisoire ne cesse de s’alourdir. Une déclaration officielle du Conseil national pour la démocratie et le développement rendue publique au courant de la journée annonce «53 morts par asphyxie et 4 morts par balles perdues constatées en collaboration avec la Croix rouge guinéenne». En revanche, certaines sources proches de l’opposition estiment le nombre de victimes à 87.
Dans cette guerre des chiffres vient s’ajouter la version de certains médecins présents lundi à l’hôpital de Donka. Une source hospitalière que nous avons pu rencontrer parle de «plus de 200 morts» qu’elle aurait embarquées à bord d’une fourgonnette de l’Armée pour une destination inconnue. La thèse du médecin est largement appuyée par d’autres citoyens qui révèlent que les corps de plusieurs victimes ont été transportés à l’hôpital du Camp militaire Samory Touré, situé dans la commune de Kaloum.
Le nombre de blessés n’est pas également connu avec exactitude. Mais les médecins sont débordés dans les hôpitaux publics. Les cas les plus graves sont transférés dans les services de Traumatologie et de Neurologie du Chu de Donka. En raison du nombre important de blessés et du caractère improviste des évènements, cette structure sanitaire -la plus grande de toute la Guinée- est en manque de produits de soins. De fait, la crise amène certains parents à transférer leurs patients dans des cliniques privées à leurs propres frais. Dans la matinée, l’Ong Médecin sans Frontières (Msf) a inventorié les besoins en produits, mais la livraison était toujours attendue hier.

Opposants libérés par les religieux
Les opposants interpellés lundi ont été libérés grâce à une médiation du Conseil religieux. «Nous sommes allés au Stade du 28 septembre pour exprimer une position de façon pacifique. C’est à ce moment que des policiers sont venus nous encercler. Ils se sont mis à nous bastonner et à tirer sur la foule à bout portant», a confié le président des Nouvelles forces démocratiques (Nfd) Mouctar Diallo. Selon le jeune leader, c’est sur instruction du capitaine Moussa Dadis Camara, que Cellou Dalein Diallo, Sidya Touré, Bah Oury, François Louncény Fall, Jean-Marie Doré et lui-même ont été transférés à la Clinique Pasteur où ils suivaient hier encore des traitements médicaux. «C’est le Premier ministre Kabiné Komara et certains chefs religieux qui sont venus nous libérer», a-t-il ajouté.
On dénombre par ailleurs d’importants dégâts matériels. Des boutiques et deux commissariats de Police ont été saccagés. Au Commissariat spécial du Stade du 28 septembre où les manifestants se sont réunis tôt lundi matin, rien n’a été épargné. Ni même les documents. Les papiers administratifs ont été brûlés et des engins roulants emportés ou brûlés. Dans sa déclaration d’hier, le Cndd affirme aussi que «les manifestants se sont emparés des armes à feu tout en laissant évader de multiples détenus». Un acte de vandalisme que le commandant de Peloton, le sous-lieutenant Saran Mamady Camara, a attribué aux manifestants.

Consternation et condamnations
A l’inverse, les domiciles des opposants Dalein et Sidya ont été littéralement pillés par des éléments habillés en tenue militaire. Pendant toute la journée du mardi, un calme précaire régnait dans la capitale guinéenne. Toutefois, les boutiques et le grand marché de Madina sont restés fermés, de même que les stations services et les banques.
Une réunion d’urgence a regroupé en fin d’après-midi les Imams, les Pasteurs, les Evêques et le Secrétaire général des Affaires religieuses à la Grande mosquée Fayçal. Selon la conclusion issue de cette concertation et qui devra être soumise à l’approbation du capitaine Dadis, une journée de deuil national doit être décrétée dans les prochaines heures. Les leaders des confessions religieuses veulent également que des prières soient organisées à partir de ce mercredi et ce jusqu’au vendredi 2 octobre dans les églises et mosquées. Ils suggèrent enfin que les corps des victimes soient remis aux parents individuellement et qu’ils ne fassent pas l’objet d’enterrement collectif. El Hadj Mamadou Saliou Camara, second Imam de la Grande mosquée Fayçal, a suggéré de ne pas faire allusion au nombre de tués dans les mosquées et les églises lors des prêches, notamment ceux de vendredi prochain.


source le quotidien

Pape Alé Niang