QUAND LA LUCIDITÉ MÈNE À LA REMONTADA

Mardi soir, les Lions de la Téranga ont prouvé que le football est bien plus qu’un simple sport : il est un miroir grossissant de la société et parfois, un professeur inattendu de vertu civique. Menés 2 à 0 par les Léopards de la RDC, les Lions auraient pu sombrer dans le découragement, s’abandonner à la précipitation, ou céder à l’arbitraire des émotions. Mais ils ont préféré une autre voie : celle de la sérénité. Et c’est dans cette maîtrise que réside la beauté de leur victoire.

Le spectacle fut saisissant. Onze joueurs, conscients de leur retard, ont refusé de s’éparpiller dans des gestes brouillons ou des coups de tête désespérés. Ils ont continué à jouer, calmement, avec méthode. Ils ont compris qu’un match se gagne rarement dans les dix premières minutes mais souvent dans la constance des quatre-vingt-dix. Ils ont montré que, face à l’adversité, il n’est pas nécessaire de hurler pour se faire entendre. Il suffit de rester fidèles à sa stratégie, de croire en ses forces, et de ne jamais perdre le fil.

Quelle ironie ! Tandis que les footballeurs donnent une leçon de sang-froid et de discipline collective, nombre de nos hommes politiques offrent le spectacle inverse. Celui d’une agitation permanente. Celui d’une incapacité à se concentrer. Celui d’un art consommé de l’improvisation brouillonne. Là où les Lions se sont montrés patients et méthodiques, nos gouvernants se perdent souvent dans les hors-jeux de la démagogie. Là où les Lions ont fait bloc, nos responsables politiques excellent à se tacler entre eux, comme si le véritable adversaire était toujours le coéquipier le plus proche.

La remontada sénégalaise n’est pas seulement une victoire sportive. Elle est une parabole. Elle nous dit que l’adversité n’est jamais une fatalité, que le retard peut être comblé, que l’on peut être mené au score sans être vaincu. Elle rappelle aussi que la panique est une mauvaise conseillère et que le véritable courage consiste à garder la tête froide quand tout semble perdu.
Nos politiciens, si prompts à confondre bruit et action, auraient tout intérêt à méditer cette leçon. Gouverner, comme jouer au football, exige du temps long, une vision claire, une capacité à résister aux émotions immédiates. Ce n’est pas la fureur des tribunes qui gagne les matches, mais la constance du collectif. De la même manière, ce n’est pas le vacarme des slogans ni la danse des promesses qui construit une nation, mais la persévérance dans l’action, le respect des règles, la fidélité à un projet commun.

Au fond, mardi soir, les Lions ont marqué trois buts : deux dans les filets adverses… et un dans la conscience nationale. Ils nous ont rappelé que la véritable grandeur ne réside pas dans les commencements spectaculaires, mais dans les fins victorieuses. Qu’une défaite apparente peut être retournée si l’on refuse le désordre, si l’on accepte de rester debout. Et qu’au milieu du tumulte, il existe toujours une autre voie : celle de la maîtrise, de la discipline et de l’intelligence collective.

Ironie du sort : ce sont des jeunes hommes, dont on moque parfois la frivolité supposée, qui incarnent la maturité que nos « vieux sages » en politique semblent avoir oubliée. Peut-être faudrait-il inviter certains de nos responsables à une séance de visionnage des Lions : ils y découvriraient que la victoire se construit dans le silence des vestiaires, dans la concentration du terrain et dans l’unité du collectif.

Avant hier, le Sénégal a gagné plus qu’un match : il a offert à ses citoyens une métaphore éclatante. Oui, nous pouvons être menés, acculés, critiqués, mais tant que nous gardons notre calme et que nous avançons ensemble, nous restons capables de renverser la situation. C’est peut-être là la plus belle leçon, non seulement pour les amoureux du ballon rond, mais surtout pour ceux qui prétendent conduire la destinée du pays.

barry.at15@gmail.com, un citoyen engagé, qui rêve et lutte pour la remontada de la République.