TITRE : Aser / Aee Power : Entre attaques et ripostes, dilemne cornélien autour de 37 milliards de francs Cfa

Senegal Atlanticactu / Dakar / Hamet   Le pouvoir embarrassé par l’imbroglio autour d’un important projet d’électrification rurale Près de deux ans après la conclusion d’un vaste marché d’électrification, d’importantes zones d’ombre subsistent. Bien que le gouvernement se tienne officiellement à distance de ce dossier, faisant l’objet d’un conflit entre associés, des interactions entre une des […]

Senegal

Atlanticactu / Dakar / Hamet 

 Le pouvoir embarrassé par l’imbroglio autour d’un important projet d’électrification rurale
Près de deux ans après la conclusion d’un vaste marché d’électrification, d’importantes zones d’ombre subsistent.

Bien que le gouvernement se tienne officiellement à distance de ce dossier, faisant l’objet d’un conflit entre associés, des interactions entre une des entreprises attributaires et certains responsables politiques, dont le nouveau maire de Dakar, interpellent.
 Des millions disparus ?
À Dakar, ces interactions entre AEE Power EPC et le pouvoir actuel alimentent des soupçons de favoritisme, d’autant qu’AEE Power Sénégal, en dépit de s’être entretenu avec le directeur de l’Aser ainsi que Birame Souleye Diop. affirme de son côté n’être jamais parvenu à obtenir une audience auprès du chef du gouvernement en dépit de multiples sollicitations. Au-delà de la nature des relations entre l’État sénégalais et le groupe espagnol, l’autre inconnue majeure de cet imbroglio demeure la destination des 56 millions d’euros perçus par AEE Power EPC pour démarrer le chantier.
Le groupe ibérique invoque le paiement de primes d’assurance – dont l’authenticité est contestée par certains acteurs du dossier → mais dans les faits, celles-ci ne représentent qu’une fraction – environ huit millions d’euros – de l’avance versée par Santander. Interrogée sur l’utilisation de ces fonds, la banque, qui avait fait part de ses inquiétudes aux régulateurs sénégalais dés septembre 2024, n’a pas donné suite à nos sollicitations.
De son côté. Jean-Michel Sène se montre moins alarmiste. Le patron de l’Aser, qui affirme que l’État sénégalais demeure particulièrement vigilant envers AEE Power EPC quant à l’atteinte des objectifs fixés dans le cadre du contrat. évoque des commandes de plusieurs dizaines de millions d’euros passées par l’entreprise espagnole auprès de fournisseurs chinois, portant notamment sur des lots de câbles.
Soulignant en outre que Santander ainsi que le CESCE ont assuré aux autorités sénégalaises avoir suspendu les décaissements mais non le financement du projet, il est également optimiste quant à une reprise du versement des fonds dans les prochains mois. A ses yeux, les réticences de la banque ibérique seraient désormais essentiellement dues à l’absence d’engagements
budgétaires du gouvernement sénégalais en faveur du projet en 2025. Ce qui a été corrigé depuis par le projet de loi de finances pour 2026.

 commande publique (Arcop), qui a ordonné la suspension du démarrage des travaux en octobre 2024. Une décision cependant gelée par la deuxième chambre administrative de la Cour suprême en février 2025, qui a invoqué l’intérêt public du projet en question. Désormais, l’Aser, dont les équipes continuent à plancher en vue de la réalisation du contrat avec AEE Power EPC, table sur un objectif de 400 localités électrifiées fin 2026.
Rencontres secrètes
Les bailleurs impliqués, dont la banque Santander, ont incité à plusieurs reprises les autorités sénégalaises à désamorcer le litige opposant les deux entreprises initialement sélectionnées. Mais ces dernières font preuve d’une extrême prudence face à cette affaire. À l’exception du ministre des finances.
Cheikh Diba, qui, après avoir été saisi par l’opposition, a publié une note battant en brèche les accusations d’irrégularités portant sur le contrat, la plupart des membres du gouvernement sénégalais évitent de l’évoquer en public.
En privé, des contacts entre AEE Power EPC et des personnalités liées au pouvoir interpellent toutefois. Selon les informations d’Africa Intelligence. une rencontre entre les cofondateurs de l’entreprise espagnole, José Ángel González Tausz et Fernando Pablo, et deux responsables politiques sénégalais de premier plan. le ministre de l’énergie, Birame Soulèye Diop et Abass Fall, un proche du premier ministre Ousmane Sonko, s’est ainsi tenue le 16 mai 2024, à Paris.
Abass Fall, alors député présidant la commission de l’énergie et des ressources minérales, a été récemment élu maire de Dakar, en septembre 2025, après s’être vu confier le portefeuille du ministère du travail et des relations avec les institutions en décembre 2024. Sollicités par Africa Intelligence dans le cadre de cet article, ni Abass Fall, ni Birame Souleye Diop n’ont répondu à nos requêtes.
Cette entrevue a été suivie, trois mois aprês, d’un discret déplacement de José Angel Gonzalez Tausz dans la capitale sénégalaise. Il aurait été reçu par Ousmane Sonko, en marge des festivités religieuses liées au Magal de Touba. le 23 août 2024. Contactée, la primature n’a pas non plus donné suite à nos sollicitations.

 La réunion, sensible, a eu lieu en juin à Madrid, dans les locaux de la Compañia Española de Seguros de Crédito a la Exportación (CESCE). la principale agence de crédit à l’export espagnole. Dans la salle, des cadres du groupe espagnol AEE Power EPC, spécialisé dans la construction d’infrastructures énergétiques en Afrique, font face à des responsables de la banque Santander.
Avec l’appui de la CESCE, l’établissement ibérique s’est engagé à financer, pour le compte de l’État sénégalais, un vaste projet d’électrification de 1 740 localités, dont l’exécution a été confiée fin 2023 à AEE Power EPC et à son partenaire local, AEE Power Sénégal. Celui-ci est contrôlé par l’homme d’affaires sénégalais basé en Espagne Saidou Kane, proche de l’ancien président Macky Sall.
Après avoir consenti à ce que soit versée, en mars 2024, une avance de 56 millions d’euros à AEE Power EPC pour le démarrage des travaux, la banque a suspendu ses décaissements en décembre de la même année. Les motifs : des doutes quant à l’utilisation de cette enveloppe, ainsi qu’un litige entre les deux entreprises attributaires, AEE Power Sénégal reprochant à sa consœur espagnole d’avoir unilatéralement résilié le contrat les liant, trois mois après avoir perçu les fonds.
Situation enlisée
Près d’un an après la décision de Santander, cette situation, qu’ont tenté de débloquer sans succès les dirigeants d’AEE Power EPC lors de la réunion de Madrid de juin, demeure enlisée. La progression du chantier s’en retrouve considérablement affectée. Sur les 1 740 localités ciblées, seules unc quarantaine ont pour l’heure été électrifiées, alors que près de la moitié du délai d’exécution (quinze sur trente-six mois) s’est écoulée.
Un retard que Jean-Michel Sène, le patron de l’Agence sénégalaise d’électrification rurale (Aser), organe chargé de superviser les travaux pour le compte de l’État, associe en partie à l’âpre bataille judiciaire à laquelle se sont livrées les deux sociétés attributaires du marché de manière indirecte.
Dans un premier temps, AEE Power Sénégal est parvenu à contester la résiliation de son contrat avec succès auprès de l’Autorité de régulation de la

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