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Thaïlande: décès de la reine mère Sirikit, figure puissante de la monarchie

Rédigé par leral.net le Samedi 25 Octobre 2025 à 11:36 | | 0 commentaire(s)|

L'ancienne reine Sirikit Kitiyakorn, épouse de Bhumibol Adulyadej qui a régné sur la Thaïlande pendant 70 ans et mère du monarque actuel, est décédée à l'âge de 93 ans, un changement d'ère pour la puissante royauté thaïlandaise.


Surnommée dans sa jeunesse la « Jackie Kennedy d'Asie », Sirikit a formé avec Bhumibol Adulyadej, qui a régné sous le nom de Rama IX, un couple glamour et puissant ayant consolidé la place de la monarchie au cœur de la société thaïlandaise. « C'est une immense perte pour la nation », a déclaré à la presse le Premier ministre Anutin Charnvirakul, qui a retardé son départ pour le sommet de l'Asean en Malaisie.

« L'état de santé de sa majesté s'est dégradé jusqu'à vendredi et elle est décédée » vendredi soir à l'hôpital Chulalongkorn à Bangkok, a indiqué le palais dans un communiqué, ajoutant que le roi Vajiralongkorn avait chargé l'ensemble des membres de la famille royale d'observer un an de deuil. Affaiblie depuis une attaque cérébrale, elle n'était plus apparue en public depuis des années, mais il n'est pas rare de croiser son portrait bordé d'or devant certains bâtiments publics, à l'intérieur de boutiques ou chez des particuliers.

L'émotion populaire va sans aucun doute être vive et toute une série d'hommages sont attendus, car en Thaïlande le roi est largement considéré comme le père de la nation et un symbole de l'idéal bouddhiste. La ferveur que génère cette figure semi-divine a peu d'équivalent dans le monde moderne. Bien qu'éclipsée par la stature de son défunt mari et de son fils, aujourd'hui roi, Sirikit était une figure tout aussi appréciée dans une grande partie du pays, son anniversaire du 12 août étant célébré comme la fête des Mères.

Dès samedi matin, les présentateurs de journaux télévisés étaient habillés en noir, signe que le temps du deuil pour Sirikit a aussi commencé pour le public. Certains Thaïlandais se sont rapidement rassemblés devant l'hôpital Chulalongkorn avec des portraits de la défunte.

Un couple moderne et élégant

Cette aristocrate, fille d'un diplomate ayant été ambassadeur à Paris, a grandi principalement en Europe, où elle a rencontré son futur mari, alors étudiant en Suisse. Dans les années 1960, ils ont donné à la monarchie thaïlandaise une image de modernité : toujours habillée au goût du jour, Sirikit fréquentait notamment les concerts de jazz, dont Bhumibol était friand, et posait dans les magazines féminins. Le couple a aussi rencontré Elvis Presley en 1960, au cours d'une tournée aux États-Unis.

Au cours de leurs premières décennies sur le trône, ils ont parcouru le monde en tant qu'ambassadeurs de bonne volonté, forgeant des liens personnels avec les dirigeants étrangers. Dans les années 1970, la famille royale s'est tournée vers les problèmes intérieurs de la Thaïlande, mettant en place des programmes de développement pour répondre aux problèmes sociaux et environnementaux.

Sirikit a eu quatre enfants de son union avec Bhumibol, célébrée en 1950 alors qu'elle avait 17 ans, dont un seul fils, Maha Vajiralongkorn, qui a succédé à son père. Le palais n'a pas encore confirmé la succession du roi actuel, qui a fêté en juillet ses 73 ans. Il a sept enfants, de trois femmes différentes, mais a renié quatre de ses fils.

Vague de contestation

Restée depuis très respectée, la royauté a cependant été confrontée en 2020 à une vague de contestation mobilisant des dizaines de milliers de jeunes qui demandaient dans la rue des réformes politiques. Parmi leurs revendications figurait une refonte de la monarchie et de la loi de lèse-majesté très stricte la protégeant, avec pour conséquence une très forte autocensure. Ces dernières années, de nombreux Thaïlandais ont été condamnés à de lourdes peines de prison pour avoir diffamé le roi et sa famille.

Bien que la famille royale soit considérée comme une figure dépassant les clivages idéologiques, et qu'elle se soit toujours abstenue de tout commentaire, Sirikit avait assisté en 2008 aux obsèques d'un manifestant des « chemises jaunes ». Ces partisans du roi et de l'ordre traditionnel dont la rivalité avec les « chemises rouges » de l'ex-Premier ministre Thaksin Shinawatra a longtemps dominé la politique thaïlandaise. Aujourd'hui encore, ce clivage reste très présent en Thaïlande, qui a connu une douzaine de coups d'État réussis depuis l'établissement de la monarchie constitutionnelle en 1932.

RFi