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Alioune Ndoye débaptise les rues coloniales : réparer l’histoire ou effacer la mémoire ?


Rédigé par leral.net le Lundi 6 Octobre 2025 à 02:52 | | 1 commentaire(s)|

Le maire de Dakar-Plateau, Alioune Ndoye, vient d’opérer un geste historique : remplacer les noms de rues coloniales françaises par ceux de figures nationales sénégalaises.
Un acte symbolique de « décolonisation de l’espace public », mais qui suscite autant d’applaudissements que de débats.

Un tournant mémoriel

Cette décision marque une rupture assumée avec l’héritage colonial.
Désormais :

Rue Jules Ferry → Rue Serigne Mountakha Mbacké

Rue Ferdinand Foch → Rue Jean Alfred Diallo

Rue Joseph Joffre → Rue Ibra Binta Gueye Mbengue

Rue Félix Faure → Rue Serigne Babacar Mansour Sy

Rue Albert Calmette → Rue Ousmane Tanor Dieng

Rue François Henry Laperrine → Rue Momar Ngom

Rue Sadi Carnot → Rue Imam Matar Sylla

Avenue Jean Jaurès → Avenue Thierno Seydou Nourou Tall

Boulevard de la Libération → Boulevard Abdoulaye Wade

Les figures coloniales effacées : un passé lourd de symboles

Jules Ferry, chantre du colonialisme, justifiait la « mission civilisatrice » des puissances européennes, à l’origine de la conquête et de l’asservissement des peuples africains.

Ferdinand Foch, Joseph Joffre, Laperrine, Félix Faure ou Sadi Carnot furent des militaires ou dirigeants associés à l’expansion coloniale, à la guerre ou à la domination française en Afrique.

Albert Calmette, médecin et militaire, a certes contribué à la médecine moderne, mais au sein d’une politique impériale souvent paternaliste.
Leur présence au cœur de Dakar symbolisait, pour beaucoup, une histoire imposée et non choisie.

Les nouvelles figures sénégalaises honorées : mémoire nationale et héritage spirituel

Chaque nom remplace désormais un symbole étranger par une figure du patrimoine sénégalais :

Serigne Mountakha Mbacké : guide spirituel des Mourides, incarnation de la paix et de la tolérance.

Jean Alfred Diallo : homme politique et enseignant, militant pour l’éducation et la justice sociale.

Ibra Binta Gueye Mbengue : première femme journaliste au Sénégal, pionnière dans les médias.

Serigne Babacar Mansour Sy : khalife général des Tidjanes, voix morale du pays.

Ousmane Tanor Dieng : homme d’État, figure du Parti socialiste, reconnu pour sa rigueur et sa loyauté.

Momar Ngom : éducateur et maire dévoué, connu pour son engagement communautaire.

Imam Matar Sylla : figure religieuse respectée, promoteur du dialogue islamique.

Thierno Seydou Nourou Tall : grand érudit tidiane, ambassadeur de la foi et du savoir.

Abdoulaye Wade : ancien président du Sénégal, bâtisseur et symbole de la renaissance nationale.

Entre hommage et controverse

Certains estiment que cette mesure aurait dû faire l’objet d’un débat public, car certains nouveaux noms restent politiquement ou religieusement marqués.
D’autres, au contraire, saluent un geste de justice historique : « Il ne s’agit pas d’effacer l’histoire, mais de réhabiliter la nôtre », a déclaré Alioune Ndoye.

Un signal fort

En inscrivant désormais les noms de ses héros sur les murs de la capitale, le Sénégal affirme son indépendance mémorielle.
Ces rues racontent désormais une histoire choisie, non imposée.