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CONSTAT - Une torche obscène accessible au grand public : Le briquet porno pénètre les foyers

Rédigé par leral.net le Samedi 18 Octobre 2008 à 13:15 commentaire(s)|

Dans la capitale sénégalaise, on trouve de plus en plus des briquets avec torche. Pratiques lors de gros délestages que nous impose la Senelec. Seulement, ces torches projettent des images pornographiques. Des scènes obscènes à la portée des enfants, sans aucun contrôle des autorités compétentes et des associations de consommateurs. Du pain sur la planche de la police des mœurs.

Par Cheikh Fadel BARRO


CONSTAT - Une torche obscène accessible au grand public : Le briquet porno pénètre les foyers
La femme de Laye n’en revient toujours pas. Tout comme son mari, pris au dépourvu quand sa femme l’apostrophe, dans cette soirée ténébreuse de délestage pour lui demander des comptes sur le fameux briquet pornographique. Laye (nom d’emprunt), est employé dans une entreprise de la place. Fumeur incorrigible, il fait partie de ces quinquagénaires Sénégalais bon teint, soucieux de rentrer le soir retrouver une petite famille éduquée dans les valeurs bien de son pays. C’est pourquoi, ce soir-là, se remémore-t-il, toujours stupéfait, il a été interloqué quand sa femme le hèle sur la présence de ce briquet dans la cour familiale où ses enfants, agités à cet âge (entre 6 et 10 ans) manient avec promptitude tous les objets à leur portée. Pourtant, il venait de découvrir, après sa femme que le briquet acheté dans la même journée dans une boutique du quartier de Yoff, recelait des images abjectes, d’un couple mixte en train de s’accoupler.


ImageDans la capitale sénégalaise où les coupures d’électricité sont finalement banalisées par les populations tenaillées par le renchérissement de la vie, Laye, comme nombre de ses compatriotes, s’ajuste et modère ses besoins. Ainsi ce matin-là, il a préféré acheter un briquet avec torche qui lui permet, en plus d’allumer ses cigarettes, de pouvoir s’en servir dans l’obscurité provoquée par les délestages tous azimuts. Surtout qu’il quitte tard son bureau. Laye s’explique : «J’ai consenti à acheter le briquet à 150 francs, soit 50 francs de plus que le prix habituel à cause de la torche incorporée. Au moins, cela n’éclaire pour introduire la clé dans la porte, le soir. Mais, je ne savais pas que la torche projette des images pornographiques.»


En fait, le briquet en question se présente comme un petit gadget de couleur blanche avec une inscription en noir. Quatre petits cercles de même couleur s’y succèdent, copiant le logo d’une marque de véhicule allemande. D’ailleurs, le nom de la marque est aussi inscrit en noir, à côté du logo. Quand on allume la torche, la lumière projette une femme asiatique toute nue et un homme de race noir. Tous les deux s’adonnent à un jeu que la décence refuse de décrire, la morale condamne et que la pudeur récuse.


Dans la boutique où Laye a acheté son briquet à problèmes, le vendeur clame son innocence et déclare ignorer ce qui se cachait derrière les torches qu’il propose aux clients. La vingtaine sonnée, le boutiquer est de nationalité guinéenne. Avec un wolof qui a tout du latin de cuisine, un phrasé propre à sa nationalité, il se défend : «Je ne peux pas essayer tous les briquets que l’on me livre pour vérifier ce qui s’y cache. Je les achète en gros avant les redistribuer. Mais, je n’ai jamais su qu’il y avait de la pornographie. Je sais simplement qu’il y a une torche sur chaque briquet et parfois, on peut y trouver des photos de stars comme le footballeur Zinedine Zidane ou des célébrités comme le défunt président irakien Saddam Hussein.»

CE N’EST PAS CHINOIS
Toutefois, le boutiquer oriente les enquêteurs vers Petersen où, dit-il, on en vend en gogo.
Le garage de Petersen est le temple des marchands ambulants et de la contrefaçon. C’est aussi l’endroit où les pickpockets, négociants et rabatteurs ne se distinguent pas. Les magasins qui longent la route sont quasi invisibles à cause de la foule d’ambulants et de rabatteurs qui envahissent toujours la chaussée. Tout cela, conjugué à l’indiscipline des automobilistes sur le rond-point reliant la gare, les allées Pape Guèye Fall et le marché Sandaga, fait de Petersen un carrefour bien coloré, tonitruant et renversant.


Devant un de ces étals installés de façon anarchique sur la chaussée, on aperçoit des briquets avec torche. Le vendeur, petite taille et grande gueule, joue très vite au connaisseur et propose ses services pour dénicher l’importateur des fameux briquets. Après quelques échanges, il révèle que les «Chinois n’ont rien à voir avec cette histoire», comme d’aucuns le croyaient. D’après ce marchand, les briquets mis en cause proviendraient plutôt de «la Turquie d’où des commerçants sénégalais et libanais les importent». D’ailleurs, il communique quelques adresses de grands commerçants dans le grand marché de Sandaga. Dans l’une des rues de ce grand marché de la capitale sénégalaise, les boutiques de grossistes s’alignent. Tous les gadgets sont proposés, ici, en gros.

La forte présence de Libanais est notable. Dans cet après-midi du mois de ramadan, les commerçants s’occupent à réorganiser les rayons avant la coupure du jeûne. L’un d’entre eux, du nom de Papis, accepte de vendre des briquets avec torche. Seulement, sur toutes les torches proposées il n’y a que des images de célébrités. Point de porno. On lui indique notre choix et lui demande où l’on peut en trouver. Il répond : «Je n’en sais absolument rien.

Cela ne m’intéresse pas.» Du coup, il devient moins bavard, préférant s’occuper d’autres clients moins fouineurs.
Il n’y aura finalement pas de suite. Tous les commerçants interrogés refusent de parler de la provenance du briquet incriminé. Ils disent tous ignorer comment ces briquets entrent dans le pays et par quel biais. Et tous démentent en être l’importateur. Le seul qui a reconnu en avoir vendu à des détaillants s’est rétracté par la suite, en déclarant qu’il en n’a plus et qu’il ne sait plus où il l’avait acheté.


Au bout du compte, personne ne sait rien. Mais, ce qui est évident, c’est que les autorités du pays n’ont aucun contrôle et aucune surveillance ne s’exerce sur l’entrée de certains produits dans le pays. Sinon, comment comprendre que ces images pornographiques soient distribuées et commercialisées à seulement 150 francs sans aucune réaction des autorités.

PROMESSE DE L’ASCOSEN
Comme à leur habitude, les associations consuméristes sont prises de court. Interpellé, Momar Ndao, président de l’Association des consommateurs du Sénégal (Ascosen) paraît surpris. «Ah bon ! », s’est-il exclamé avant de déclarer. «C’est inadmissible ! C’est vraiment regrettable.» Pour lui, c’est une situation grave dans la mesure où les enfants peuvent facilement tomber sur ces images obscènes. Et c’est en cela que c’est «un scandale», car pour lui, «il faut protéger les enfants».
M. Ndao promet ainsi de saisir les autorités du ministère du Commerce pour qu’elles prennent les mesures qui s’imposent.


En attendant la réaction des autorités sénégalaises, la femme asiatique et l’homme de race noire sur la torche, continuent de circuler dans les marchés et certains foyers. Heureusement que chez Laye, les enfants n’ont pas pu voir…