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Samedi 27 Septembre 2008

Conclusion.


Le Parti démocratique sénégalais et son principal responsable, le président de la république, Abdoulaye Wade ont sur la conscience la mort de Babacar Sèye. Ils l’ont, indirectement, soutient Amath Dansokho, secrétaire général du Parti pour l’indépendance et le travail (Pit), l’un des opposants les plus farouches au régime libéral et à ses méthodes de gouvernement. Cet homme politique défend l’idée selon laquelle Abdoulaye Wade a fait assassiné Me Sèye, à cause d’un système de violence et de faire que l’homme a fait naître et grandir, imprudemment, autour de lui.



Cette thèse qui dédouane partiellement le chef de l’Etat et exonère aussi en partie la responsabilité de Me Wade dans ce meurtre est, aujourd’hui, battue en brèche par l’un des assassins, Pape Ibrahima Diakhaté qui, lui, point un doigt accusateur formel sans circonstances atténuantes sur le chef de l’Etat qu’il tient pour directement responsable de la mort du juge. Il l’identifie comme étant e principal commanditaire.

Cette thèse, il l’avait du reste défendue dès les premières heures de son arrestation. Il la défend, à nouveau, en l’étayant davantage par des révélations étonnantes qui, au terme de la lecture de cet ouvrage, bouleversent totalement la conscience de tous les démocrates d’ici et d’ailleurs. On en mesure, également, jusqu’où pouvaient aller l’opposition d’alors incarnée par Abdoulaye Wade et son parti, dans leur longue quête d’un pouvoir d’Etat qu’ils ont, enfin, conquis en marchant sur le cadre d’un juge. Par quelque bout que l’on prenne l’affaire Me Sèye, l’ombre du Pds et celle de son chef planent, sur le mystère qui entoure, jusqu’ici, les noms des commanditaires du meurtre.
Même si, aujourd’hui, ils tentent de nier l’évidence, leur participation au complot ayant coûté la vie au vice-président du Conseil constitutionnel, en mai 1993, ne fait plus l’objet de doutes sérieux. Le corps de ce juge a été comme une sorte d’agneau sacrificielle imposée par le Pds à la marche de la démocratie et à la construction d’un système politique où seront, à jamais, bannies l’intolérance, la surenchère et la violence, comme moyen de conquête du pouvoir. L’organisation de ce parti, ces méthodes d’alors et d’aujourd’hui le prédisposent à commettre des actes détestables et proscrits par la démocratie. La violence st consubstantielle à l’existence de ce parti. Elle est en lui et adhère à son être. Du reste, son principal l’a reconnu en des termes univoques quand il affirme en mars 1988 :
« Je reconnais qu’il un courant qui prône la violence pour déloger du pouvoir ceux qui l’ont confisqué (….). » Il y a une violence qui, semble-t-il, est parfois légitime dans la conduite de certaines actions politiques. On pense, ici, à celle qui s’oppose à la tyrannie, à l’oppression, afin de recouvrer la dignité confisquée à une communauté et à ses membres. Nul n’ose soutenir que le Sénégal en est arrivé, au cours de son histoire politique récente, à ce niveau de perversion de son système politique qui puisse justifier et légitimer la violence érigée en mode de conquête de la liberté et de recouvrement de la dignité des citoyens.

C’est pourtant ce que veut faire croire Abdoulaye Wade, quand il fait une telle affirmation. La volonté de recourir à la violence exprimée de non explicite dans le discours mais qui n’en est pas moins évidente dans les actes posés, lui sert de prétexte pour tenter de masquer, maladroitement, une boulimie de pouvoir et une soif inextinguible de l’exercer au plus haut sommet de l’Etat. Cette forme de violence qui se veut parer d’une fausse légitimité est aussi dangereuse que n’importe laquelle qui viserait la marche d’un système politique authentiquement démocratique.

C’est elle-même qui a coûté la vie au juge Babacar Sèye. C’est elle, aussi, qui a failli, durablement, compromettre la vie démocratique au Sénégal, à la fin des années 80 et au début des 90. Heureusement, les institutions républicaines ont été assez solides, sur leur socle, pour absorber, sans trop de dommages, compte non tenu de la mort d’un juge, les coups qui lui étaient assenés par de mauvais perdants, à l’occasion de chaque échéance électorale.

Le professeur Iba Der Thiam, un des hommes politiques les plus en vue de la scène politique nationale a l’habitude de dire que : « la violence politique est intrinsèquement liée à l’évolution de l’histoire politique nationale. » Ce professeur émérite d’histoire a raison, du point de vue de la connaissance de l’histoire dans son déroulement temporel et spatial. Il a certainement tort quand cela sert à lui ou à quelqu’un d’autre d’arguments, pour tenter de justifier les violences perpétrées de façon gratuite contre les acteurs du jeu politique ou les contre les institutions qui structure l’Etat et assurent la marche de la démocratie.
Qu’elle soit verbale ou physique la violence est à bannir du jeu politique. Or, le Parti démocratique l’utilise souvent à l’intérieur du part comme à l’extérieur comme un mode de règlement majeur des contradictions résultant des divergences d’approche et d’opinions utiles et nécessaire au débat démocratique. Les exemples sont nombreux pour en attester.
Arrêtons-nous sur les plus récents et les plus caractéristiques de cette conception anachronique et finalement dangereuse de l’adversité en démocratie. Talla Sylla est un homme politique sénégalais dont le patriotisme n’a jamais été pris à défaut. Il milite depuis son jeune âge. Il a fait plusieurs fois la prison sous le régime socialiste, pour avoir défendu des positions radicales, dénonçant avec une conviction qui force l’admiration de tous les patriotes le mal fait aux institutions hier comme aujourd’hui et les dérives des dirigeants d’Etat qui ont bien souvent pris leur sacerdoce pour des sinécures. Les socialistes détestaient ses méthodes de s’opposer. Ils l’ont emprisonné en cherchant dans ses actes des éléments qui, mis en rapport avec le droit positif des éléments probants d’une poursuites judiciaires infaillibles.

Jamais, ils n’étaient allés aussi loin que les responsables libéraux en sont arrivés, en ordonnant une mise à mort avortée de l’homme, dans le nuit du 5 au 6 octobre 2003. Ils ont été agressés et bastonnés par les propres gardes du corps du chef de l’Etat, par son entourage immédiat, dans le sombre dessein de l’éliminer physiquement. Trois gardes de ces gardes du corps ont été identifiés par les gendarmes enquêteurs qui ont établi de façon formelle leur participation à la tentative de meurtre.

La Justice a été saisie. Le juge à qui a été confiée l’affaire, n’a jamais osé convoquer, pour les entendre les personnes visées par les enquêteurs. Le chef de l’Etat, lui-même, a torpillé la procédure en déclarant publiquement dans les média tout ce qu’il pense de cette affaire et en niant la gravité des faits relatifs à la tentative de meurtre. Le juge peut alors se tenir à carreaux, en sachant que la volonté exprimée par le prince va dans le sens d’un classement sans suite. Cette double violence exercée sur une personne et sur l’institution judiciaire donne une preuve éloquente de la nature des hommes et des femmes qui président aux destinés du Sénégal, depuis ce 19 mars 2000.

L’agression sauvage perpétrée contre Talla Sylla n’est qu’une réédition avortée du meurtre commis en ami 93, contre la personne de Me Sèye. Elle utilise des méthodes et des acteurs différents, des mobiles éloignés, mais l’agression comme le meurtre résultent d’une même approche de la vie politique et ont un dénominateur commun : le Pds et son chef. Dans le registre des violences verbales qui balisent le chemin des agressions physiques mortelles, on ne peut dépasser en intensité celles qu’un journal comme le Messager édité sus la responsabilité directe de la présidence de la république a déversé sur la personne de l’ancien premier ministre Idrissa Seck, quand il a été limogé par le chef de l’Etat, avant et après.


Plusieurs collaborateurs du président de la république d’ardeur pour insulter et traiter de tous les noms d’oiseaux l’ancien de gouvernement. Sa réplique à un de ces collaborateurs, alors conseiller du chef de l’Etat, au-delà de son indécence n’a rien à envier, dans la férocité du propos tenu, quoique maquillé par ne citation tirée du Coran, aux mots prononcés contre lui par ses « ennenmis ». Il suffit, dans une société comme la nôtre de traiter quelqu’un de bâtard, pour en faire, à jamais, un ennemi irréductible. Or, Idrissa Seck l’a fait avec qui il a, pourtant, milité pendant plus d’une vingtaine d’années dans le Pds aux côtés de Abdoulaye Wade.
Le présent du Pds, loin de démentir les comportements du passé les confirment et les amplifient, du fait de l’enivrement provoqué chez certains responsables libéraux l’exercice d’un pouvoir dont la conquête fut une grande surprise. Depuis la conquête de ce pouvoir les guerres de tranchées font rage à l’intérieur du parti. Les complots montés contre des « frères » de même parti, les liquidations politiques, les intrigues internes se déroulent avec une extrême violence dans les mots et les prises de positions publiques.

Les coups de poings, les coups de pierres et de haches opèrent comme des modes de règlements majeurs des différents politiques. Ces pratiques sont dangereuses et inquiétantes car elles semblent passionner la jeunesse du parti qui s’en sert, souvent, pour régler dans leurs structures militantes les contradictions. Le ministre Aliou Sow, responsable des jeunesses travaillistes et libérales (Ujtl) qui est la structure majeure regroupant tous les jeunes militants du parti a, publiquement, révélé dans les média nationaux, en date du mercredi 23 février que son collègue ministre de l’environnement, Modou Diagne Fada a déclaré, en parlant de lui, cette terrible phrase :
« Soit ce garçon est avec moi, soit il est bon pour la tombe. »
Le langage utilisé est symptomatique d’un état d’esprit particulier et d’une conception de la politique et de ses méthodes qui, en définitive, structurent le Pds du sommet à la base du parti. Ce parti se trouve souvent à la lisière des frontalières nécessairement établies entre les exigences d’une compétition politique saine et vigoureuse et celle d’une violence gratuite et aveugle qui ne peut se déployer dans un pays sans compromettre les fondements de la nation.





A la lumière de l’ensemble de ses développements l’affaire ne peut plus apparaître comme un accident de parcours dans le vie du Pds. Il est, au contraire, un des aboutissements logiques et inévitables d’une marche politique où l’intolérance érigée en dogme conduit fatalement à une négation de l’autre dans ses convictions, ses opinions, voire dans son existence même. Comme l’œil de Caïn, elle hante la conscience des dirigeants de ce parti qui tentent de l’enterrer et de la retirer de la mémoire collective en votant une loi d’amnistie traduisant la peur des commanditaires du, meurtre, face à un avenir rempli d’incertitudes.


Pape Ibrahima Diakhaté un des criminels qui ont exécuté l’ordre de tuer se repentit et ose un doigt accusateur sur le chef de l’Etat. Il tente ainsi de soulager, en partie sa propre conscience en se délestant d’un double poids qu’il porte: celui d’avoir et celui d’avoir entretenu un mensonge qui a vainement cherché à accréditer la thèse d’un complot qui disculpe les vrais commanditaires. Son geste, sa confession totale l’honore, d’une certaine manière, mais elle assomme littéralement le chef de l’Etat et son parti.

Par ricochet, cette confession discrédite le régime en place et met l’Etat qui a à sa tête un chef aux mains tâchées de sang, dans une mauvaise posture qui entame l’image d’un pays qui a toujours voulu se présenter comme modèle dans une Afrique où la construction des systèmes et de la démocratie fait payer un lourd tribu en vies humaines aux sociétés. Le discret est total.

L’affaire de la révision de l’avion dont nous avons, à nouveau, évoqué les péripéties dans le chapitre onze qui se veut un addendum au texte rédigé sur l’affaire Sèye, joue, par ailleurs, comme une sorte de miroir grossissant les faits de corruption. Loin de déformer la réalité, il la dénude dans toute son ampleur, en mettant à la lumière et en les proposant à la critique, les pratiques d’une corruption d’Etat, d’une concussion et d’une prévarication qui, si, l’on y prend garde, risquent de compromettre, définitivement, l’avenir du développement de la nation.



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