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Corée du Sud: Park Geun-Hye, une princesse détrônée

Rédigé par leral.net le Samedi 11 Mars 2017 à 18:54 | | 0 commentaire(s)|

Petite fille, Première dame de facto ou présidente, Park Geun-Hye s'est toujours sentie comme chez elle dans les couloirs du pouvoir sud-coréen.
A 65 ans, elle part en disgrâce, fauchée par un méga scandale de corruption qui fait d'elle la première chef de l'Etat de Corée du Sud à être destituée.


Corée du Sud: Park Geun-Hye, une princesse détrônée
La fille aînée du dictateur militaire Park Chung-Hee a grandi à la Maison Bleue, la présidence sud-coréenne, où elle a connu une enfance dorée.
Malgré les accusations d'abus des droits de l'Homme qui ont entaché le règne de son père (1961-1979), certains prêtaient à la famille des caractéristiques royales et la jeune Park faisait figure de "princesse".

Sous Park père, la Corée du Sud avait connu une croissance économique accélérée.
Ses deux parents furent assassinés à cinq années d'intervalle, ce qui lui valut la sympathie accrue de l'opinion publique. La mère de Mme Park, épouse et mère vertueuse appréciée dans une société encore très traditionnelle, fut assassinée en 1974 par un Nippo-Coréen suspecté d'agir aux ordres de Pyongyang.

Alors étudiante en France, Mme Park était rentrée pour assumer le rôle de Première dame jusqu'à la mort de son père en 1979, assassiné par son propre chef des services de sécurité.
Pendant la vingtaine d'années qui ont suivi, elle est restée discrète. En 1998, alors que la Corée était sous le coup de la crise financière asiatique, elle fut élue députée.

- La 'reine vierge' - Elle avait immédiatement séduit les Sud-Coréens conservateurs les plus âgés, qui se souvenaient de sa mère avec affection et révéraient son père pour avoir sorti de la pauvreté une nation ravagée par la guerre.

Mme Park n'hésitait pas à se servir de son histoire personnelle, ponctuant ses discours de la phrase suivante: "après la perte tragique de mes parents tombés sous les balles d'assassins..."

Gravissant rapidement les échelons politiques, elle avait été adoubée "reine des élections".
Elle ne s'est jamais mariée et n'entretenait plus de relations avec son frère et sa soeur. Cela participait de son pouvoir d'attraction sur un pays habitué aux scandales de corruption sur fond de népotisme. "Je suis mariée à la République de Corée. Je n'ai pas d'enfants. Les Sud-Coréens sont ma famille", disait-elle. Son inspiration? La reine Elizabeth Ire d'Angleterre et d'Irlande, surnommée la "reine vierge" en raison de son célibat obstiné.

En 2012, elle avait remporté la présidentielle en remportant le plus grand nombre de voix de l'ère démocratique.

Mais c'est la famille d'un louche personnage religieux qu'elle choisit comme mentor et qui, au bout du compte, précipitera sa descente aux enfers.

- 'Corps et âme' -
Sa relation avec le mystérieux Choi Tae-Min, fondateur d'un mouvement aux allures de secte, avait débuté dans les années 1970: il lui avait envoyé des lettres lui racontant avoir vu en rêve sa mère défunte.

Il acquit une influence telle qu'une note diplomatique américaine publiée par Wikileaks avait témoigné de rumeurs selon lesquelles il "contrôlait totalement Mme Park, corps et âme".

A sa mort, en 1994, sa fille Choi Soon-Sil, une amie qui s'occupait déjà de la vie quotidienne de Mme Park, y compris de sa garde-robe, a endossé le rôle de son père.

Mme Park est accusée de collusion avec Mme Choi, elle-même jugée pour avoir extorqué des millions de dollars aux grands groupes industriels. L'héritier de Samsung Lee Jae-Yong a lui aussi été placé en détention provisoire dans ce scandale à tiroirs.

Maintes fois, Mme Park a présenté, en larmes, ses excuses aux Sud-Coréens, se décrivant comme un être solitaire dont la seule faute était d'avoir fait trop confiance à une amie.
"Depuis que je suis entrée en fonctions, j'ai vécu une existence solitaire", avait-elle plaidé. Mme Choi "est restée à mon côté à mes heures les plus sombres. J'ai baissé la garde".

Mais ce scandale, qui a aussi mis en lumière les relations troubles entre pouvoir économique et politique, a jeté dans la rue des millions d'habitants, y compris parmi ses partisans, avant que la Cour constitutionnelle n'entérine sa destitution vendredi.

"Au lieu de l'intelligence de son père, de sa perspicacité et de sa détermination à développer l'économie, elle a hérité de ses pires traits de caractère, l'obsession du pouvoir (...) et son intolérance aux critiques", écrit Chun Yu-Ok, député et ancien allié de Mme Park dans de récentes mémoires. "Sa chute rappelle à tous les Sud-Coréens qu'il est temps de dire adieu à notre passé".