Des squelettes géants découverts en Arabie Saoudite ? Faux, des photomontages
Des publications Facebook partagées plusieurs centaines de fois ces derniers jours relayent un article de 2017 qui prétend montrer des "squelettes géants d'apparence humaine", découverts en Arabie Saoudite. Il s'agit en réalité de photomontages.
"Photos : Les restes du peuple d'Aad, des géants anciens dont on parle dans le Coran". Publié le 28 novembre 2017 sur le quotidien en ligne Leral.net, un article truffés de photomontages refait surface depuis peu sur les réseaux sociaux.
Selon l'article, des squelettes géants auraient été découverts en 2004 dans un désert d'Arabie Saoudite, par Aramco, une compagnie spécialisée dans le pétrole et le gaz.
"Les Saoudiens pensent qu'il s'agit là des restes du peuple d'Aad (...) La zone a été sécurisée par l'armée saoudienne et l'information aurait dû rester secrète, mais ces photos ont pu filtrer sur Internet", assure le site sénégalais.
Pourquoi douter de ces images ?
Nous avons analysé les images diffusées par le site. Les deux premières jouent simplement sur l'effet de perspective pour faire croire à des grands squelettes.
D'autres photos peuvent donner l'impression de montrer des "squelettes géants", mais l'utilisation d'un logiciel qui décèle des altérations d'image permet de soupçonner des trucages.
Nous avons analysé la composition de l'image ci-dessus grâce à l'outil "forensic" du logiciel InVid, co-développé par l'AFP, et disponible ici.
Le logiciel détecte notamment une différence de qualité de l'image, précisément à l'endroit où se trouvent les archéologues, comme vous pouvez le voir sur la capture d'écran ci-dessous.
Les deux archéologues sont susceptibles d'avoir été artificiellement ajoutés dans l'image, afin de faire paraître le squelette plus grand, en jouant sur l'effet d'échelle.
Mais la technologie a ses limites. Le logiciel ne détecte pas d'anomalie significative sur cette deuxième image, elle aussi présente dans l'article. Elle est pourtant manipulée, comme nous allons le voir.
D'où proviennent réellement ces images ?
En tapant "giant skeletons photomontage" sur Google, on retrouve des traces de ces photos sur le site DesignCrowd, une plateforme pour mettre en contact des freelances travaillant dans le design et des clients intéressés par leurs services. Elle s'appelait autrefois Worth1000.com.
Le site héberge régulièrement des concours. Nous en avons répéré 15 ayant pour objectif de créer, à partir de photoshop, des "anomalies archéologiques". Les règles de ces concours sont claires : "vous créerez une fausse découverte archéologique".
"Le but est de montrer une découverte archéologique qui semble si réelle, que si elle n'était pas postée sur ce forum, les gens devraient y regarder à deux fois avant de se rendre compte que c'est un faux", ajoute le règlement du site.
C'est ici que nous retrouvons la photo des deux archéologues entourant le squelette géant. Son auteur porte le pseudo "Anakinnnn" et explique s'être servi de Photoshop pour réaliser ce montage.
Le succès rencontré par ces photos truquées est tel, que DesignCrowd s'est fendu d'un article pour recenser certains montages de squelettes géants repris au premier degré.
Quant à notre deuxième photo, on retrouve sa trace grâce à une recherche d'image inversée. Il s'agit en réalité d'une partie d'une image plus grande, comme vous pouvez le voir à droite, sur une capture d'écran du site de fact-checking anglophone Liveaboutdotcom.
Comme l'a déjà écrit ce site, l'image a en réalité été photoshopée à partir d'une photographie prise par le paléontologue Paul Sereno, de l'Université de Chicago, lors d'une expédition au Niger, en 1993.
Comme relaté sur le site de l'Université et la page du paléontologue, le fossile est en fait celui d'un dinosaure herbivore de 18 mètres de long, un Afrovenator appelé Jobaria.
L'article largement relayé sur Facebook n'est pas le seul à partager cette fausse information.
De nombreuses autres publications reprennent ces mêmes images de "squelettes géants" -tantôt attribuées au peuple d'Aad dont parle le Coran, tantôt aux Néphilims, géants évoqués dans la Bible - et les situant tour à tour en Roumanie, en Grèce ou même à Lille (après un article du site d'informations parodiques Nordpresse).