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Lundi 28 Avril 2014

Énergie solaire : L’Afrique traîne le pas


Energie solaire : L’Afrique traîne le pas, c’est le deuxième livre écrit par le journaliste Mamadou Seck, Grand reporter au journal L’Observateur. Après avoir publié, un premier livre sur le Conflit Israélo-Palestinien et le Nucléaire Iranien, le journaliste-écrivain s’intéresse aux problèmes énergétiques en Afrique et plus particulièrement les énergies renouvelables. L’ouvrage composé de 4 chapitres traite des problèmes énergétiques dans certains pays d’Afrique, la facture salée du pétrole, le déficit dans la formation technique et scientifique des jeunes africains, les actes posés par Barack Obama et le rappeur Akon pour électrifier l’Afrique….Un ouvrage édité par les Editions Maguilen du président des écrivains du Sénégal, Alioune Badara Béye.



Énergie solaire : L’Afrique traîne le pas
Énergie solaire : L’Afrique traîne le pas

En Afrique, nous attendons le jour pour travailler, à la lumière du soleil. Une étoile qui éclaire mieux que le courant électrique produit par les Sociétés nationales d’électricité dans la quasi-totalité des pays au Sud du Sahara. En effet, si nous pouvons bénéficier de la lumière du soleil durant en moyenne douze (12) heures, par jour, tel n’est pas le cas pour le courant électrique. A titre d’exemple, au Sénégal, nous ne pouvons pas disposer d’une fourniture continue d’électricité durant une semaine sans coupure de courant. Les délestages peuvent parfois durer plus de six (6) tours d’horloge dans certains quartiers. Cette situation n’est malheureusement pas une exception en Afrique Subsaharienne. A Abidjan, Ouagadougou, Bamako, Lomé, Niamey, en Centrafrique… le décor est le même, avec des coupures d’électricité fréquentes.

Le Président Wade brûle 2 200 milliards Cfa pour l’achat du combustible

Au moins l’équivalent de 2 200 milliards de francs Cfa ont été brûlés dans les centrales de la Senelec durant les 12 années du mandat de l’ex-président de la République, Me Abdoulaye Wade. En effet, chaque année, le pouvoir dégage 200 milliards de francs Cfa pour la Senelec, destinés à l’achat du combustible. Une enveloppe qui ne fera qu’augmenter avec l’arrivée du Président Macky Sall à la tête du pays. Car, le prix du pétrole continue de flamber. Les populations pendant ce temps, continuent d’endurer les coupures d’électricité, qui occasionnent plusieurs dégâts matériels sans que les sinistrés ne soient dédommagés. «Les charges en combustibles coûtent à l’Etat environ 200 milliards de francs Cfa par an», souligne la Direction générale de la Senelec. Une manne financière fortement ressentie dans les caisses du Trésor public national. Qui accuse généralement du retard pour libérer les fonds destinés aux fournisseurs de combustibles de la Senelec. Notamment, la société Itoc S.A, dirigée par Abdoulaye Diaw dit Baba, qui avait signé un contrat de fourniture de combustibles avec la Senelec.

Des privés injectent 325 milliards Cfa pour concrétiser les défis énergétiques du candidat Macky Sall

Lors de la dernière élection présidentielle de 2012 qui l’a porté au pouvoir, le Président Macky Sall, dans son programme proposé aux Sénégalais et intitulé : «Le chemin du véritable développement (Yoonu Yokkuté)», avait annoncé des mesures sur le plan énergétique.

«Face au défi de la demande d’électricité pour nos foyers et nos entreprises, aucun choix ne doit être fait de façon hâtive. Aucune ressource ni solution ne peut être écartée pour des raisons conjoncturelles ou idéologiques. Notre politique énergétique se fondera sur le «Mix énergétique

Et deux ans après son élection, le Président Macky Sall va injecter 330 mégawatts en énergies renouvelables dans la période allant de 2014 à 2017. Il sera installé 150 Mw en énergie éolienne et 180 Mw en énergie solaire, soit un projet en énergie éolienne et 9 en énergie solaire (voir tableau dans l’ouvrage). Ces projets d’un coût de 325,3 milliards de francs Cfa, seront réalisés par des privés. L’Etat garantit l’investissement des privés, mais il y a des inquiétudes liées aux délais de réalisation et la mobilisation des financements. La ville de Dakar, dirigée par le maire Khalifa Ababacar Sall, a débloqué une enveloppe de 1,9 milliard de francs Cfa pour installer des lampadaires solaires dans la capitale comme sur la route de l’Arsenal de la Marine, le quartier Nord-Foire, les cimetières musulmans de Yoff et les cimetières catholiques Saint Lazare de Béthanie, la Mosquée de la divinité de Ouakam, le lieu de prières des Layènes à Ngor.

Les filières scientifiques sacrifiées

Pourquoi donc le soleil reste-t-il ignoré pour la fourniture d’énergie en Afrique? C’est un manque réel de volonté politique de la part des dirigeants. Ces derniers préfèrent orienter plusieurs millions d’euros dans d’autres secteurs, en laissant en rade la formation des jeunes dans les nouvelles technologies. Pis, dans plusieurs cas, les sommes dépensées dans ces secteurs sont souvent détournées ou orientées dans des secteurs moins essentiels. Par exemple, au Sénégal, une sur-médiatisation d’un sport comme la lutte par les télévisions privées et la télévision nationale, risque de plomber l’avenir des jeunes générations à cause des millions de francs Cfa dépensés dans les montages financiers des combats de lutte. De plus, le Président Macky Sall projette de construire une arène nationale pour un coût de 20 milliards de francs Cfa. Et bizarrement, c’est dans la zone du Technopole, qui devrait abriter de grandes sociétés, que les autorités projettent d’ériger l’arène.

Interpellé sur la question par les députés lors de sa déclaration de politique générale, le Premier ministre, Aminata Touré, a soutenu que l’arène sera délocalisée du site du Technopole, sans pour autant indiquer l’endroit précis où l’ouvrage devra être construit. Quant aux habitants de la banlieue, ils ont commencé à se faire entendre pour manifester leur opposition à la construction de cette arène, qui ne fera que compromettre l’avenir de leurs enfants, en leur présentant comme modèles, les lutteurs et la lutte; et non les études et les grands intellectuels.

Heureusement qu’un des lutteurs les plus avertis, Mohamed Ndao dit Tyson a eu le courage de dire publiquement, sur le plateau de la chaîne de télévision privée 2Stv, lors de l’émission Face to Face en prélude de son combat du 21 avril 2014 contre Gris Bordeaux, que la «force doit être accompagnée par le savoir». Et pour argumenter ses propos, il donne l’exemple de l’équipe nationale de basket des Etats-Unis(Nba), où les joueurs ne sont admis qu’après avoir réussi dans leurs études. Et quel que soit le talent du joueur, la Nba privilégie les études.

Ces 20 milliards de FCfa peuvent servir à la construction de lycées scientifiques pour former la jeunesse aux métiers d’avenir pour éviter de faire appel à la main-d’œuvre étrangère pour résoudre des problèmes scientifiques ou technologiques. Si l’on sait que les Universités sénégalaises, les lycées, les écoles et collèges manquent de moyens logistiques pour dispenser des enseignements de qualité à la jeunesse, avenir de la Nation, support privilégié de toute politique de développement. Et le directeur de publication de l’hebdomadaire Le Témoin, Mamadou Oumar Ndiaye, l’a souligné dans un de ses commentaires, en constatant qu’on assiste maintenant au Sénégal à «la promotion du système Lmd : c’est-à-dire, la lutte, la musique et la danse».

Le Professeur Marie Teuw Niane, nommé ministre de l’Enseignement supérieur, disait au cours d’une conférence publique, le samedi 19 avril 2008 au Cyber Campus Sinkou de l’Université Cheikh Anta Diop : «En ce 21ème siècle, c’est regrettable de constater que depuis les indépendances, soit plus de cinquante ans, le Sénégal est encore à la recherche d’un sens à donner à l’enseignement technique et à la formation professionnelle. Mais aussi d’une vision stable de la question de l’insertion des diplômes dans son organigramme gouvernemental. Le déséquilibre est plus qu’inquiétant, au détriment des filières scientifiques et technologiques. En effet, avec seulement moins de 30% de bacheliers scientifiques, notre pays est loin de rééquilibrer dans l’enseignement secondaire, la part des filières scientifiques, techniques et professionnelles, dont la montée en puissance est indispensable à la formation des ressources humaines compétitives dans ce siècle de l’économie du savoir.»

Ce discours avait séduit, à l’époque, l’étudiant Elimane Abdoul Fall, présent à la conférence. Devenu Doctorant en Géographie, il a tenu à rappeler à son Professeur devenu ministre, dans une contribution parue dans la presse : «Dans ce discours, vous aviez donné la solution aux problèmes de notre enseignement supérieur. De grâce, cher Professeur, que le statut de nouveau ministre n’occulte en rien la clairvoyance du scientifique rigoureux et méthodique qui a toujours su, dans une démarche de rupture et de vérité, tenir le langage qu’il faut, en acceptant de mettre le doigt sur les véritables plaies qu’il faut impérativement soigner pour le développement du pays.»

Par conséquent, la jeunesse africaine doit être orientée dans les filières scientifiques et techniques. Si les Etats-Unis dominent la planète terre, c’est grâce à la formation des citoyens américains dans le domaine de la science et de la technologie. Quant au continent africain, on note chez nos dirigeants un réel manque de volonté à s’engager résolument dans cette voie. Les Cours privés Sainte Marie de Hann, qui ont ouvert une filière pour la formation des jeunes bacheliers en Energies renouvelables, n’enregistrent pas plus de 29 étudiants en 1ère et 2ème année, à cause du coût de la formation.

L’Intégration africaine

L’indépendance énergétique est un défi majeur pour le continent Africain. Et, le Président Togolais, Président en exercice de l’Union économique monétaire ouest africaine (Uemoa) Faure Gnassingbé, a abordé le sujet lors du 17 éme sommet de l’Union à Dakar, le 24 octobre 2013, avant de passer le témoin de la présidence en exercice de l’Uemoa à son homologue du Bénin, Yayi Boni. «L’indépendance énergétique est un défi majeur pour notre région, une condition indispensable au développement et à l’amélioration des conditions de vie de nos populations. Les statistiques établissent que l’électricité coûte encore 5 fois plus cher dans la zone Uemoa que dans d’autres partie du continent » constate le Président Gnassingbé.

L’Afrique peut tourner le dos aux ténors du pétrole mondial grâce à une réelle politique d’intégration. Si l’on sait que les centrales hydroélectriques du Cameroun et du Congo peuvent fournir les besoins actuels du continent en électricité. Ce que confirme le Camerounais et Directeur général de Ecosun Solutions, Guy Tchieulieu : «L’énergie solaire ne doit pas être ignoré en Afrique, car cela résoudrait rapidement des problèmes qui durent depuis des années. Et son aspect décentralisé est bien adapté aux populations africaines».

3000 heures de soleil pour le Sénégal

Les rayons solaires brillent en moyenne 3000 heures par an sur la terre sénégalaise. Une énergie naturelle ignorée par les autorités étatiques au profit des énergies fossiles vendues par les pays arabes et les puissances occidentales à des prix faramineux. N’empêche, les dirigeants africains continuent de mettre la main à la poche pour donner de l’électricité à leurs populations. Les Universités, les écoles, les Lycées, les hôpitaux, les routes, les usines, les habitations utilisent tous de l’énergie fossile. Alors que l’Afrique peut se libérer des griffes des puissances pétrolières pour prendre en charge entièrement ses besoins énergétiques en se tournant vers les énergies renouvelables.

Malheureusement, la plus grande publicité faite sur le soleil d’Afrique repose sur le tourisme, en invitant les esquimaux à venir se bronzer. Alors que le soleil est un don d’Afrique comme l’est le Nil pour l’Egypte. A preuve, explique le Dr Jörg Michael Baur, conseiller technique principal du Programme pour la promotion des énergies renouvelables, de l’électrification rurale et de l’approvisionnement durable en combustibles domestiques (Peracod), «le Sénégal et l’Afrique font partie des meilleurs endroits ensoleillés au monde. Le potentiel solaire au Sénégal fait le double du potentiel solaire en Allemagne.

La loi des groupes électrogènes au Nigeria

Presque toutes les maisons sont équipées de groupe électrogène à Lagos et Abuja. Ce qui est anormal. Mais, c’est la volonté manifeste des gouvernants. Parce qu’ils protègent les intérêts des importateurs de groupes électrogènes. Hormis certains organismes internationaux et quelques lampadaires publics alimentés en énergie solaire, comme on le constate sur l’Avenue Allen, les populations nigérianes ne se ruent pas encore vers le solaire. Le solaire coûte cher. C’est pourquoi les populations ne s’y intéressent pas pour le moment. D’ailleurs, les Nigérians ignorent même l’énergie solaire. Il s’y ajoute qu’il n’y a pas une volonté politique réelle pour ce mix énergétique.

Le manque à gagner dans la production pétrolière nigériane est lié au manque de raffinerie. Si l’on sait que les 4 raffineries dont disposait le pays sont inexploitables. Et l’homme d’affaires Aliko Dangoté, le plus riche d’Afrique, est en train de construire une nouvelle raffinerie d’un coût de 6,6 milliards d’euros qui pourrait être fonctionnelle en 2016 avec une production de 400 000 barils par jour. Par conséquent, le Nigeria exporte son pétrole en Europe ou aux Etats-Unis pour le raffiner, avant de le réimporter à nouveau. Il s’y ajoute que la quantité de pétrole raffiné vendue dans le pays est de loin inférieure à la quantité exportée pour le raffinage. Et, il n’y a pas lieu de se triturer les méninges pour chercher le reste du pétrole dans les pipelines nigérianes. Car, cette différence n’est rien d’autre que la part que se partage la mafia qui tourne autour du pétrole. C’est-à-dire, le pouvoir et les sociétés étrangères en charge de l’exploitation du pétrole.

Obama - Akon pour électrifier l’Afrique

Barack Obama a annoncé, depuis l’Université du Cap, en Afrique du Sud, le dimanche 30 juin 2013, son programme d’électrification de l’Afrique Sub-saharienne pour «doubler l’accès à l’électricité en Afrique subsaharienne». C’est une enveloppe de sept milliards de dollars qu’il a mise sur la table pour faciliter l’accès à l’électricité sur une période de cinq ans à 20 millions de foyers, baptisé «Power Africa».

La star internationale du rythm “and blues”, Alioune Badara Thiam dit Akon, veut aussi apporter la lumière dans les villages les plus reculés du continent africain, à travers “Lighting Africa”, un projet d’électrification en milieu rural. Le rappeur veut apporter l’électricité à un million de foyers au Congo, au Sénégal, en Guinée, en Gambie, au Burkina Faso, en Guinée Equatoriale, au Gabon, en Côte d’Ivoire...Ce geste de la star internationale sénégalo-américaine, particulièrement préoccupée par le développement de l’Afrique, doit être soutenu par nos dirigeants. Il doit également inspirer tous les grands leaders africains, quel que soit leur domaine d’intervention. Il s’agit également d’un geste à la fois pédagogique et symbolique pour toute la jeunesse africaine.

Cette triple dimension de cette action de la star lui a valu, le 18 février 2014, d’avoir été reçu par le Président Ali Bongo du Gabon pour la présentation de son projet “Akon Lighting Africa”, dont l’objectif est de fournir l’électricité à près d’un million de ménages ruraux africains, à l’aide de l’énergie solaire. L’initiative du rappeur est on ne peut plus salutaire, mais l’occasion devrait être saisie par Akon pour lancer ce message aux jeunes Africains : “Allez vous former dans les filières scientifiques et techniques pour le développement du continent, personne ne viendra le faire à votre place”. Si l’on sait que les Kit solaires que le rappeur va distribuer dans les foyers africains seront fabriqués par des sociétés étrangères. Alors qu’ils pouvaient être confectionnés par des étudiants de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, formés au Centre international de formation et de recherches en énergie solaire (Cifres) de Dakar.

Le projet de Akon aurait beaucoup plus de portée s’il avait tenu à ce que les jeunes Africains réalisent eux-mêmes les infrastructures solaires, pour permettre à leurs frères des villages les plus reculés du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, du Gabon d’apprendre leurs leçons jusque tard dans la soirée, de faire tourner les boulangeries pour avoir du pain chaud le matin sur le chemin de l’école et de se balader la nuit à la lumière des lampadaires solaires pour décompresser des difficultés de la journée.