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Frondes, déballages, démissions et remise en cause de l’autorité de Wade : Va-t-on vers la fin de cycle du Pds ?

Après sept années de perte de pouvoir, est-ce la fin d’un cycle du Parti Démocratique Sénégalais ? En tout cas, l’arrivée de Macky Sall et de sa Coalition Benno Book Yaakar au pouvoir en 2012 a complètement chamboulé la première force politique de l’opposition du Sénégal avec le départ tous azimuts de ses grands lieutenants. Si on s’en tient à la dernière crise qui sévit actuellement en son sein, le Parti démocratique sénégalais est en difficulté. Le « Pape du Sopi » et chef de file des libéraux, qui était l’Alpha et l’Oméga, semble être aujourd’hui trop « faible » pour maitriser la vapeur.


Rédigé par leral.net le Mercredi 28 Août 2019 à 13:20 | | 0 commentaire(s)|


Sept ans après sa perte du pouvoir, que reste-t-il de ce géant qui a dirigé le pays douze années durant ? Cette question mérite d’être posée avec cette nouvelle crise que le premier parti d’opposition du Sénégal et d’Afrique vit depuis quelques jours. Il faut simplement reconnaître en effet que le Parti Démocratique Sénégalais traverse une crise profonde après l’état d’émiettement qui a précédé son naufrage. Depuis la perte du pouvoir en mars 2012, le Parti démocratique sénégalais s’enfonce davantage dans une crise très profonde.

La dernière en date est celle provoquée par le remaniement du secrétariat national par Me Abdoulaye Wade. En effet, ce réaménagement n’a pas simplement mis le Pds en dessous-dessus, mais il a aussi mis le feu dans la relation entre son leader, Me Abdoulaye Wade, et son ancien « homme de confiance ».

Oumar Sarr et Wade, le combat final

Après Aïda Mbodji, Souleymane Ndéné Ndiaye, Modou Diagne Fada, Farba Senghor, Pape Samba Mboup, Me Madické Niang et autres, c’est au tour de Oumar Sarr aujourd’hui de faire face au père de Karim Meissa Wade. Tout est parti de la décision du désormais ex-coordonnateur national du Pds de prendre part, sans l’autorisation de la seule constante, Me Abdoulaye Wade, et de son fils Karim, au dialogue national lancé par le président de la République, Macky Sall, le 28 mai 2019. Une participation qui a refroidi les relations entre Oumar Sarr et son père spirituel. Et depuis lors les germes d’une crise commençaient à se faire sentir.

Habitué à diriger les délégations du Pds auprès des chefs religieux, Oumar Sarr a été zappé par Wade pour le représenter à Touba lors de la célébration du dernier «Leylatoul Khadr (la Nuit du destin). Toutefois, le coordonnateur national du Pds ne s’était pas laissé faire. Il s’était rendu dans la capitale du mouridisme avec ses partisans et ils avaient été reçus avec tous les honneurs par le représentant du Khalife des Mourides.

Ce bras de fer entre Wade et Oumar Sarr a connu une nouvelle tournure le 9 août dernier avec le réaménagement du secrétariat national du Pds. La seule constante, Wade, avait décidé à cette occasion de faire la promotion des partisans de son fils Karim Meissa Wade et de rétrograder Oumar Sarr et certains de « ses amis » tels que Babacar Gaye, Me Amadou Sall, Cheikh Tidiane Seck entre autres. La surprise, c’est que ces derniers ne se sont pas laissés faire. Ils ont au contraire décidé de laver l’affront en résistant au Vieux. En bon disciple du « père », Oumar Sarr a envoyé une bombe dans le camp désormais en face en révélant lors de leur conférence de presse tenue le vendredi 23 août dernier que Karim Wade ne s’est pas opposé à la grâce que le Président Macky Sall lui a accordée en 2016.

Au contraire, il était même demandeur ! « J’ai rencontré le président Macky Sall en 2016 pour la libération de Karim Wade. Parce que j’ai été le voir en prison et j’ai constaté qu’il était en train de dépérir. Je lui ai demandé la permission pour parler de la question de sa libération à Macky Sall. Ce dernier m’a ainsi demandé d’en parler à l’occasion de l’ouverture du dialogue national. Le 28 mai, Karim avait menacé de démissionner du parti si le Pds ne participait pas au dialogue », a révélé le maire de Dagana. Des propos corroborés par Babacar Gaye. Oumar Sarr et Babacar Gaye seront appuyés par le président de la Fédération nationale des cadres libéraux (Fncl) du Parti démocratique sénégalais (Pds), Cheikh Tidiane Seck, dans le registre des révélations. A l’en croire en effet, le Président Sall s’est rendu à la résidence de Wade la soirée de la Tabaski.

« Macky Sall a été à la résidence de Wade la soirée de la Tabaski », at-il révélé dans Vox Populi. Avant de s’empresser de préciser que : « peut-être parce qu’il n’a pas eu l’accueil espéré que Macky n’a pas communiqué là-dessus. » (Ndlr, aussi bien la présidence de la République que l’entourage de Wade ont démenti catégoriquement cette « information ».

Pr Moussa Diaw : « Il y a bien sûr un risque d’éclatement du Pds »

Moussa Diaw, lui, ne crois pas que cette énième crise va marquer la fin du cycle du Pds. Mais, reconnait-il, il y a un risque d’éclatement. Mais, soutient l’enseignant chercheur en politique à l’université Gaston Berger de Saint-Louis, cette crise était prévisible. Car, à l’en croire en effet, ces gens-là qui font aujourd’hui face à Me Abdoulaye Wade étaient ceux-là qui l’ont aidé dans sa lutte contre leurs anciens camarades. « Ils ont accepté de jouer le jeu du Président Wade en son absence. Ils ont défendu la candidature de Karim Wade contre vents et marées. Tous les observateurs avertis savaient bien qu’ils étaient les prochains sur la liste », soutient-il. Mais, si ces tiraillements-là continuent et s’ils finissent au niveau des tribunaux, il y aura un risque d’éclatement du Pds, selon le professeur Diaw. Il s’explique : « On a connu cela en Europe et au Sénégal avec Aj et Decroix. Wade avait soutenu Decroix. Aujourd’hui, Macky pourrait bien soutenir le camp de Oumar Sarr pour mieux museler le Pds. Dans tous les cas, cette crise arrange politiquement Macky Sall.
Parce qu’elle conforte la position de la majorité. »

A la question de savoir si Wade pourra cette fois-ci sortir victorieux de ce face-à-face, le professeur Diaw pense que Wade n’acceptera jamais l’existence de ce courant au sein du Pds. Et ses partisans ne vont certainement pas se laisser faire, selon lui. « Il ne faut pas penser que Wade pourrait être minorisé car vous voyez les fédérations du Pds de Saint-Louis et de Ziguinchor qui réaffirment déjà leur attachement à Wade. Les militants ne se sont pas encore prononcés et on ne sait pas comment ils vont réagir face à cette situation. Et je ne pense pas qu’ils vont continuer à suivre Me Abdoulaye Wade surtout en ces périodes où il n’y a pratiquement plus de ressources pour les contrôler. Il faut l’accepter, le Pds est affaibli », martèle M. Diaw.

Maurice Soudieck Dionne : « On va plutôt assister à la fin du cycle de Me Wade »

Son collègue de l’université Gaston Berger de Saint-Louis, lui, ne parle pas de fin de cycle du Pds. Selon Maurice Soudieck Dione, c’est plutôt la fin d’un cycle du pouvoir de Me Abdoulaye Wade « qui avait tous les moyens et tous les pouvoirs au sein du Parti démocratique sénégalais ». « Le Pds est aujourd’hui dans une phase de transition avec la succession de Me Abdoulaye Wade », pense le Pr Dione. L’universitaire soutient que le Pds a toujours été un parti très fort « mais aujourd’hui il est dans une situation difficile ». Lui aussi est d’avis que Oumar Sarr et Cie ne vont certainement pas se laisser faire « mais Wade est la seule constante au Pds ». « Le Pds, c’est le parti de Me Wade. Cela depuis sa création. Tant que Me Wade est aux commandes, on peut comprendre. Mais avec cette nouvelle évolution, il y a une certaine incertitude sur l’avenir du Pds », estime le Pr Maurice Soudieck Dione.

Le Témoin