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Grand-Yoff: C’est le calme précaire, après deux jours de violences

Grand-Yoff a repris ses habitudes après les échauffourées de jeudi et vendredi qui ont secoué le pays, suite au verdict prononcé dans l’affaire Sweet Beauté. Malgré un calme précaire, les populations, toujours dans la peur, appellent au dialogue et à la concertation pour que le pays retrouve la paix. Reportage lequotidien.sn.


Rédigé par leral.net le Lundi 5 Juin 2023 à 17:05 | | 0 commentaire(s)|

Le Sénégal a connu des jours difficiles avec des scènes de guérilla urbaine, des supermarchés et stations-services brûlés, des pertes en vies humaines avec au moins 15 morts, suite aux manifestations consécutives au verdict prononcé dans l’affaire Sweet Beauté. A l’image des autres quartiers de Dakar, Grand-Yoff a été aussi secoué. Même si le calme est revenu, les populations, toujours dans la peur, appellent au dialogue et à la concertation, pour que le pays parvienne à surmonter cette situation.

Dans ce quartier populaire, l’ambiance était plutôt sereine hier dimanche. Mais quelques scènes observées ici et là, vont rappeler tout suite les violentes manifestations de jeudi et vendredi derniers, suite à la condamnation du leader du parti Pastef, Ousmane Sonko. Fallou Lô dont la boutique se trouve en face de l’axe principal à la Cité millionnaire, et qui est souvent la cible des manifestants, exprime sa tristesse et sa solidarité envers ceux qui ont perdu des êtres chers et leurs biens lors de ces événements. Selon lui, le Sénégal est un pays difficile à gouverner.

«Quand l’Etat sort les gros moyens, on dit que c’est un dictateur. S’il reste tranquille, on dit qu’il est faible. Ce que je vois aujourd’hui, si l’Etat ne prend pas ses responsabilités, ce pays risque de devenir ingouvernable», constate-t-il, tout en priant pour que la paix revienne. Il a aussi souligné que le comportement des Sénégalais a complètement changé si l’on en juge par les évènements. «Les jeunes n’écoutent plus leurs parents ni les guides religieux. Et parmi ceux qui manifestent, les quatre dixièmes ne croient pas à Ousmane Sonko», déplore-t-il.

Interpellé sur la situation, Matar Sembène, professeur de français, demande au Président Macky Sall de s’adresser à la Nation et à Ousmane Sonko aussi, à ses militants.

Selon M. Sembène, seuls le dialogue et la concertation pourront aider le pays à sortir de cette situation chaotique. Et cela, ajoute-il, doit se matérialiser à travers l’apaisement du climat politique et surtout, des engagements forts de la part de Macky Sall, où il précisera formellement la renonciation à un 3e mandat.

Le réseau internet ainsi que les réseaux sociaux sont perturbés depuis vendredi dernier par la volonté du gouvernement, comme reconnu dans un communiqué du ministère de la Communication, des Télécommunications et de l’Economie numérique, qui informe qu’en raison de la diffusion de messages haineux et subversifs, dans un contexte de trouble à l’ordre public dans certaines localités du pays, l’internet des données mobiles est suspendu temporairement.

Fatou Thiam, vendeuse de pharmacie, trouve cette restriction nécessaire, pour que l’ordre et la paix reviennent.

«C’est normal qu’il y ait restriction des libertés. Il faut que l’Etat essaie de ramener de l’ordre. Si on laisse les communications ouvertes, ça peut amplifier ce qui se passe en ce moment. Donc, la restriction, c’est dans la logique de rétablir de l’ordre. Nous avons tous intérêt à ce que le pays reste debout, mais actuellement, le pays est à la traîne, presque à genoux», explique la dame, estimant que le chef de l’Etat trouvera les mots et décisions qu’il faut pour apaiser la situation, parce que la balle est dans son camp.

Très optimiste, elle souligne aussi que le problème des manifestants, ce n’est pas la personne de Macky Sall, mais c’est la fin du regard bienveillant que ce Peuple avait envers ce régime, le regard que le citoyen a sur les institutions de la République.

Au Centre de santé Nabil Choucair, la vie a repris son cours, mais les dégâts engendrés par la furie des manifestants, restent encore visibles. Des ordures sont déversées dans les rues. L’odeur qui pique les narines fait ressortir les masques du Covid-19. Mais toujours dans la crainte des saccages, les magasins sont restés fermés le long des rues.

Assurément, en l’espace de deux jours, Dakar s’est transformée en un champ de bataille. Et si certains accusent ouvertement le régime en place, d’autres pointent du doigt l’opposition, qui appelle à intensifier les combats. Mais tous sont d’accord que le Sénégal ne mérite pas cette situation et qu’il est temps de tourner la page de la violence et de l’hostilité, pour embrasser la voie de la réconciliation. «Il faut que Macky Sall laisse Sonko rentrer à Ziguinchor. Tant qu’il est Dakar, il n’y aura pas de paix», a prévenu un jeune manifestant.