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Marchandises: Les résidus de l’Europe et de la Chine envahissent les trottoirs sénégalais

​Dakar s’est complètement métamorphosée. En mal ! Plutôt que d’embellir, la capitale est devenue un gigantesque dépotoir de conteneurs renfermant toutes sortes de marchandises. Dans ce maelstrom, le moindre espace est inondé par des tonnes de friperies, de matériels électro-ménagers, de meubles, de scooters, de vêtements et de chaussures venant de la Chine et de l’Europe. Soucieux de l’état économique du pays, l’Union nationale des consommateurs du Sénégal dénonce cette situation de dépotoir, pour ne pas dire de poubelle. Toutefois, les populations ne se plaignent pas trop, car les prix bas de la friperie, en particulier, les arrangent.


Rédigé par leral.net le Mercredi 31 Mars 2021 à 14:34 | | 1 commentaire(s)|

Marchandises: Les résidus de l’Europe et de la Chine envahissent les trottoirs sénégalais
Chaque jour, nos compatriotes prennent d’assaut les différents marchés de la capitale pour se ravitailler. Il est 7 heures du matin à Colobane, l’épicentre de la friperie. Un vent souffle sur tous les couloirs et ruelles du marché. A ce qu’il se dit, les prix sont plus accessibles à cette heure de la matinée. Des colis viennent d’être déballés et leur contenu, des tonnes de friperie de toutes origines, sont étalés sur les tables.

L’ambiance est si gaie que des jeunes commerçants se mettent à chanter, tapant des mains dans une parfaite symphonie. La tonalité musicale est donnée et tout le monde s’y met. Des acheteurs maîtrisant les rouages du marché, s’arrachent ces vêtements usagés. Une jeune dame est courbée, la tête baissée avec son petit sac flottant sur le côté et dans lequel se trouvent quelques tenues lourdes par cette période glaciale.

Fatou Dieng vient de Pikine. « La friperie nous arrange, nous les pauvres. Surtout que les produits sont de bonne qualité et à la portée de tout le monde. Maintenant, nous savons que les commerçants viennent ici pour acheter des produits qu’ils revendent plus chers. J’ai trois enfants à la maison et il fait froid. Donc j’achète des pull-overs pour eux », confie la dame.

A l’en croire, même les supposés riches fréquentent le marché le plus célèbre de la ville pour se ravitailler. Juste à côté, un vieux marchand expose ses produits. Il vend des chemises. « Mon fils, j’ai souvent des clients au volant de belles voitures qui viennent passer des commandes. Je fais le tri des meilleures chemises pour eux qui sont mes clients préférés. Ces chemises, c’est de la qualité, car elles viennent de Turquie », indique le vieux Mamadou Diop. *

A l’en croire, les prix pratiqués dans le marché sont à la portée de tout le monde, surtout les jeunes. Interrogé sur le fait de savoir si les importations massives de friperie ne concurrencent pas défavorablement l’industrie locale, notre interlocuteur souligne que le Sénégal ne dispose pas d’industrie textile que pourrait gêner la friperie. « Il appartient à l’Etat de créer les conditions d’une économie dynamique », conseille le vieux commerçant, confortablement assis sur sa table et sirotant son café Touba pour se réchauffer le corps par ce froid matinal.

A Petersen, une Chine en miniature

Au marché de Petersen, les produits électro-ménagers venant de la Chine inondent le marché. Dans ce milieu, des téléviseurs de toutes marques sont exposés, des réfrigérateurs, des machines à laver et fours micro-ondes de chauffage, etc., Ismaîl Camara descend d’un taxi. Il est venu acheter une machine à laver. « Je suis venu acheter une machine à laver. Le propriétaire m’a appelé, car je suis un fidèle client et je lui avais demandé de me trouver une machine. Le prix dépend du produit », informe-t-il.

A l’en croire, il veut lancer une deuxième entreprise de pressing après le succès de la première dont les machines ont été acquises auprès de son fournisseur de Petersen. Dans ce marché, on vend de tout. Batteries pour téléphones portables, câbles et autres sont proposés aux visiteurs. « Les gens viennent ici pour acheter des verres et autres vaisselles qu’ils revendent dans les boutiques de la place, pour nous faire croire que les produits viennent fraîchement d’Europe », confie une dame habituée de ce marché.

Juste à côté, un camion transportant un conteneur est sur le point de décharger des produits de seconde qualité, bloquant les ruelles et couloirs du marché Petersen. « J’ai des parents qui sont en Europe et qui m’envoient ces produits que je revends facilement à des clients attitrés », confie un jeune homme, la trentaine, supervisant le déchargement du conteneur.

Au rond-point Liberté 6, tout le long des deux voies, des commerçants exposent leurs montagnes de chaussures venant de la Chine à des prix qui sont à la portée des clients.

Montagnes de chaussures «chinese» au rond-point Liberté VI

Les trottoirs sont ainsi occupés, donnant à l’endroit un joli décor. Une jeune demoiselle, physique avenant, vêtue d’une chemise colorée, 1,70 m, dans un pantalon bleu ciel, est venue acheter des chaussures à quatre mille francs la paire. Aïcha sow est une cliente de ces marchands et vient fréquemment se procurer des chaussures qu’elle trouve accessibles et de bonne qualité.

Dans la commune de Keur Massar, un magasin spécialisé dans la vente des fauteuils venant de l’extérieur attire chaque jour son monde. « Nos fauteuils, chaises et tables nous viennent de l’extérieur et les gens aiment tout ce qui vient d’ailleurs », confie le commerçant. Jean-Pierre Dieng, président de l’UNCS (union nationale des consommateurs du Sénégal), se veut être clair face à l’envahissement de tous ces produits qui ont fini par faire de Dakar une poubelle de l’Europe. « Nous ne pouvons pas nous développer avec cette politique. La ville est devenue une poubelle pour les autres pays. Nos commerçants sont dans des situations très précaires parce que le marché n’est pas protégé. Il faut que nos autorités pensent à une économie locale très performante et non transformer la ville en une poubelle de l’Occident », se désole-t-il.






Le Témoin

Ousmane Wade