Certains versent dans la confusion, en expliquant que Bargny a également été détaché de Rufisque
en 1990 et que Sendou, au même titre que Bargny, peut aussi devenir une commune. Cette réponse,
démagogique, est hors sujet. La question posée n’est pas de savoir si Sendou pourrait dans l’avenir
être détaché de Bargny, en raison de sa situation géographique, de l’évolution démographique et de
son niveau de développement. L’enjeu majeur porte sur la taille critique en terme démographique,
économique de nos communes, pour mettre en oeuvre des politiques de développement efficaces et
cohérentes.
Pour nous, Bargnois de la Diaspora, il n’y a là aucun élément sérieux mais plutôt une manoeuvre
politicienne, couplée d’une boulimie foncière, connue des responsables de l’alternance. Ce projet
s’inscrit dans la guerre que le pouvoir d’Abdoulaye Wade mène, depuis les dernières élections
locales, contre les élus de Benno. Les Bargnois ont vivement réagi face à ce qu’ils considèrent comme
un déni de démocratie. Ils ne veulent pas être les otages d’un affrontement politicien, qui
entrainerait le morcellement de leur commune et la mise en place de délégation spéciale.
Mais l’objet de notre propos n’est pas de verser dans la confusion politicienne. Le vrai débat porte
sur l’échelon pertinent pour permettre le développement urbain des villes sénégalaises, dans un
contexte de décentralisation. Les questions de l’heure sont liées à l’intensification de
l’intercommunalité au Sénégal, au renforcement des moyens humains et techniques des collectivités
locales. Le morcellement de la commune de Bargny nous conduira tout droit vers l’impasse et va
accentuer le sous‐équipement chronique de Sendou.
Cette affaire dépasse le cadre local et interpelle tous les sénégalais. Ce projet est à contresens de
l’histoire. Nous évoquerons ici deux éléments pour démontrer que cette décision grave est
préjudiciable au développement harmonieux de nos villes.
Le morcellement communal : un outil politique pour le pouvoir libéral d’Abdoulaye Wade
Au Sénégal, les premières communes ont été créées par l’administration française coloniale à la fin
du XIX siècle. En 1960, date de notre indépendance, on dénombrait 34 communes au Sénégal. Le
pouvoir socialiste en a crée 26 en 40 ans d’exercice. Et Abdoulaye Wade a crée, en 10 ans, 46
communes supplémentaires. Aujourd’hui, le nombre de communes a pratiquement doublé, passant
de 60 en 2000 à 113 en 20101, auxquelles s‘ajoutent 46 communes d’arrondissement pour les très
grandes villes.
Qu’est ce qui a pu motiver notre président au point de vouloir « communaliser » chaque quartier du
Sénégal ? Quels sont les critères objectifs pouvant justifier un tel bouleversement institutionnel ?
Qu’est ce que les populations de ces nouvelles communes ont gagné en termes de services publics,
de développement économique, d’assainissement,… ?
Il est normal de créer de nouvelles communes pour répondre aux nouvelles donnes démographiques
de chaque entité territoriale mais il est dangereux d’en faire un outil politique. Les chiffres sont
édifiants : rien ne peut justifier l’explosion du nombre de commune au Sénégal depuis l’avènement
de l’alternance. Nous n’avons connu aucun bouleversement démographique, territorial, économique
qui puisse justifier une telle politique. Promouvoir le démantèlement de communes qui peinent à se
développer, parce qu’elles n’ont pas la taille critique, est tout simplement irresponsable.
La commune : un échelon inefficace pour organiser le développement des villes Sénégalaises
Plus une commune est sous‐équipée, plus elle se doit de créer des partenariats avec d’autres
communes limitrophes pour pouvoir financer et gérer des services publics locaux. L’émiettement
communal est un phénomène propre à la France. Avec près de 37 000 communes, la France
rassemble 40 % des communes de l’Union Européenne. Nous aurions du, après les indépendances,
engager une réflexion, sur une nouvelle organisation territoriale, mais nos gouvernements ont
préféré perpétuer la tradition française consistant à surenchérir sans cesse, portant ainsi le nombre
de communes à un niveau déraisonnable. De sorte qu’aujourd’hui, nous nous trouvons, comme les
français, dans une impasse. Les populations Sénégalaises sont aujourd’hui très attachées à cet
échelon local, qui incarne, à leurs yeux, la démocratie locale. De sorte qu’il est très difficile de
regrouper des communes. Or, la multiplication des communes enfonce les collectivités dans la
misère et compromet définitivement leur développement.
Aujourd’hui, les défis posés aux communes sont nombreux : les problèmes d’inondation que
connaissent la commune de Bargny, à l’instar de beaucoup d’autres communes Sénégalaises, sont
des conséquences directes d’une urbanisation non maitrisée. L’absence de voiries communales
permettant une desserte correcte des différents quartiers de Bargny, le faible niveau d’équipement
des quartiers sont autant de défis qui appellent une démarche de mutualisation de nos ressources.
Dans ces domaines (urbanisme, création de voiries communales, mise en place et gestion de services
publics locaux,…), ce sont les communes qui sont compétentes. Depuis les lois de décentralisation de
Mars 1996, qui ont organisé le transfert de compétence au profit des collectivités locales, la question
que tous les spécialistes se posent, est celle de savoir comment les collectivités locales réussiront là
où l’Etat, après de 40 ans de gestion, à échoué ? Comment pourront‐elles, avec les faibles ressources
dont elles disposent, répondre aux besoins des populations en termes d’aménagement,
d’équipements et de développement social et environnemental ?
Sur cette base, nous pensons qu’Abdoulaye Wade et Alioune Sow devraient plutôt s’interroger sur
une stratégie nationale fondée sur deux piliers : le renforcement de la coopération intercommunale
et le regroupement de communes, par des mesures incitatives.
1 Trois décrets pris par Abdoulaye Wade (n°2002 – 271 du 22 Février 2002, n°2008‐748 du 10 Juillet 2008 et n°2008 du 31 Décembre 2008)
ont permis la création de ces 46 nouvelles communes.
Par ces mots, nous apportons notre soutien total et nos encouragements aux populations bargnoises
qui s’opposent à ce projet machiavélique. Ce combat est indispensable pour le développement de
Bargny et de la réussite du processus de décentralisation au Sénégal.
Signataires
Abou Seck Paris; Daly Seck Montpellier; Gana Gueye Aix‐en‐Provence ; Mandoye NDoye, Changai ;
Cheikh Ndiaye, Canada ; Omar Pouye, Niort ; Libasse Djité, Paris ; Momar Seck, Genéve ; Moussa
Boye, Montpellier ; Ablaye Seck, Montpellier ; Souleymane Diagne ; Birame Samb, Toulon ; Aliou
Dia, La Rochelle ; Souleymane Fall, Angoulême
en 1990 et que Sendou, au même titre que Bargny, peut aussi devenir une commune. Cette réponse,
démagogique, est hors sujet. La question posée n’est pas de savoir si Sendou pourrait dans l’avenir
être détaché de Bargny, en raison de sa situation géographique, de l’évolution démographique et de
son niveau de développement. L’enjeu majeur porte sur la taille critique en terme démographique,
économique de nos communes, pour mettre en oeuvre des politiques de développement efficaces et
cohérentes.
Pour nous, Bargnois de la Diaspora, il n’y a là aucun élément sérieux mais plutôt une manoeuvre
politicienne, couplée d’une boulimie foncière, connue des responsables de l’alternance. Ce projet
s’inscrit dans la guerre que le pouvoir d’Abdoulaye Wade mène, depuis les dernières élections
locales, contre les élus de Benno. Les Bargnois ont vivement réagi face à ce qu’ils considèrent comme
un déni de démocratie. Ils ne veulent pas être les otages d’un affrontement politicien, qui
entrainerait le morcellement de leur commune et la mise en place de délégation spéciale.
Mais l’objet de notre propos n’est pas de verser dans la confusion politicienne. Le vrai débat porte
sur l’échelon pertinent pour permettre le développement urbain des villes sénégalaises, dans un
contexte de décentralisation. Les questions de l’heure sont liées à l’intensification de
l’intercommunalité au Sénégal, au renforcement des moyens humains et techniques des collectivités
locales. Le morcellement de la commune de Bargny nous conduira tout droit vers l’impasse et va
accentuer le sous‐équipement chronique de Sendou.
Cette affaire dépasse le cadre local et interpelle tous les sénégalais. Ce projet est à contresens de
l’histoire. Nous évoquerons ici deux éléments pour démontrer que cette décision grave est
préjudiciable au développement harmonieux de nos villes.
Le morcellement communal : un outil politique pour le pouvoir libéral d’Abdoulaye Wade
Au Sénégal, les premières communes ont été créées par l’administration française coloniale à la fin
du XIX siècle. En 1960, date de notre indépendance, on dénombrait 34 communes au Sénégal. Le
pouvoir socialiste en a crée 26 en 40 ans d’exercice. Et Abdoulaye Wade a crée, en 10 ans, 46
communes supplémentaires. Aujourd’hui, le nombre de communes a pratiquement doublé, passant
de 60 en 2000 à 113 en 20101, auxquelles s‘ajoutent 46 communes d’arrondissement pour les très
grandes villes.
Qu’est ce qui a pu motiver notre président au point de vouloir « communaliser » chaque quartier du
Sénégal ? Quels sont les critères objectifs pouvant justifier un tel bouleversement institutionnel ?
Qu’est ce que les populations de ces nouvelles communes ont gagné en termes de services publics,
de développement économique, d’assainissement,… ?
Il est normal de créer de nouvelles communes pour répondre aux nouvelles donnes démographiques
de chaque entité territoriale mais il est dangereux d’en faire un outil politique. Les chiffres sont
édifiants : rien ne peut justifier l’explosion du nombre de commune au Sénégal depuis l’avènement
de l’alternance. Nous n’avons connu aucun bouleversement démographique, territorial, économique
qui puisse justifier une telle politique. Promouvoir le démantèlement de communes qui peinent à se
développer, parce qu’elles n’ont pas la taille critique, est tout simplement irresponsable.
La commune : un échelon inefficace pour organiser le développement des villes Sénégalaises
Plus une commune est sous‐équipée, plus elle se doit de créer des partenariats avec d’autres
communes limitrophes pour pouvoir financer et gérer des services publics locaux. L’émiettement
communal est un phénomène propre à la France. Avec près de 37 000 communes, la France
rassemble 40 % des communes de l’Union Européenne. Nous aurions du, après les indépendances,
engager une réflexion, sur une nouvelle organisation territoriale, mais nos gouvernements ont
préféré perpétuer la tradition française consistant à surenchérir sans cesse, portant ainsi le nombre
de communes à un niveau déraisonnable. De sorte qu’aujourd’hui, nous nous trouvons, comme les
français, dans une impasse. Les populations Sénégalaises sont aujourd’hui très attachées à cet
échelon local, qui incarne, à leurs yeux, la démocratie locale. De sorte qu’il est très difficile de
regrouper des communes. Or, la multiplication des communes enfonce les collectivités dans la
misère et compromet définitivement leur développement.
Aujourd’hui, les défis posés aux communes sont nombreux : les problèmes d’inondation que
connaissent la commune de Bargny, à l’instar de beaucoup d’autres communes Sénégalaises, sont
des conséquences directes d’une urbanisation non maitrisée. L’absence de voiries communales
permettant une desserte correcte des différents quartiers de Bargny, le faible niveau d’équipement
des quartiers sont autant de défis qui appellent une démarche de mutualisation de nos ressources.
Dans ces domaines (urbanisme, création de voiries communales, mise en place et gestion de services
publics locaux,…), ce sont les communes qui sont compétentes. Depuis les lois de décentralisation de
Mars 1996, qui ont organisé le transfert de compétence au profit des collectivités locales, la question
que tous les spécialistes se posent, est celle de savoir comment les collectivités locales réussiront là
où l’Etat, après de 40 ans de gestion, à échoué ? Comment pourront‐elles, avec les faibles ressources
dont elles disposent, répondre aux besoins des populations en termes d’aménagement,
d’équipements et de développement social et environnemental ?
Sur cette base, nous pensons qu’Abdoulaye Wade et Alioune Sow devraient plutôt s’interroger sur
une stratégie nationale fondée sur deux piliers : le renforcement de la coopération intercommunale
et le regroupement de communes, par des mesures incitatives.
1 Trois décrets pris par Abdoulaye Wade (n°2002 – 271 du 22 Février 2002, n°2008‐748 du 10 Juillet 2008 et n°2008 du 31 Décembre 2008)
ont permis la création de ces 46 nouvelles communes.
Par ces mots, nous apportons notre soutien total et nos encouragements aux populations bargnoises
qui s’opposent à ce projet machiavélique. Ce combat est indispensable pour le développement de
Bargny et de la réussite du processus de décentralisation au Sénégal.
Signataires
Abou Seck Paris; Daly Seck Montpellier; Gana Gueye Aix‐en‐Provence ; Mandoye NDoye, Changai ;
Cheikh Ndiaye, Canada ; Omar Pouye, Niort ; Libasse Djité, Paris ; Momar Seck, Genéve ; Moussa
Boye, Montpellier ; Ablaye Seck, Montpellier ; Souleymane Diagne ; Birame Samb, Toulon ; Aliou
Dia, La Rochelle ; Souleymane Fall, Angoulême