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Retrait de la loi de finances: Me Madické Niang plaide "dans le vide"


Rédigé par leral.net le Mardi 12 Décembre 2017 à 11:05 | | 0 commentaire(s)|

Retrait de la loi de finances:  Me Madické Niang plaide "dans le vide"
Dans une longue lettre aux allures d’une plaidoirie, Me Madické Niang demande au ministre de l’Economie et Finances le retrait Loi de finances pour correction. Dans sa missive dont nous publions in extenso, le Président du Groupe parlementaire “Liberté et Démocratie” pointe plusieurs manquements aux textes réglementant les lois de finances, principalement la LOLF notamment sur les dispositions concernant la transparence, la sincérité budgétaire, l'équilibre général du budget. Il n’a finalement pas été suivi puisque le projet en question a été voté par la majorité des députés. L’intégralité du discours de Me Madické Niang :

“Monsieur le ministre,

Nous voici au bout du marathon budgétaire. La particularité de ce marathon est qu'il a été entrecoupé par la DPG du Premier ministre. Une déclaration qui non seulement a confirmé l'échec du régime en place, mais nous a confortés surtout dans le fait que nous dénoncions, c'est à dire les énormes contradictions sur les données et les statistiques du gouvernement.

Monsieur le ministre, en l'état actuel, je voudrais demander l'ajournement des débats et le retrait du texte de projet de loi de finances. Je voudrais que vous retiriez le projet pour manquement aux textes réglementant les lois de finances, principalement la LOLF notamment sur les dispositions concernant la transparence, la sincérité budgétaire, l'équilibre général du budget.

Les raisons sont multiples et je peux les démontrer. J'aurais pu choisir de faire des amendements au projet de loi mais ce serait très compliqué et on risque de créer encore un déséquilibre dans le projet de finances. Cela ne règle pas le problème.

Le mieux est, entre nous, de reprendre le texte, en faire le toilettage et nous revenir dans les jours à venir. Il nous reste trois jours sur les délais constitutionnels. Nous sommes à 57 jours alors qu'on a 60 jours.

Les éléments qui exigent le rejet ou le retrait:

1 Première raison : La présence de corps étrangers dans le budget. Monsieur le ministre il n'y a plus de secrétaires d'état dans le gouvernement. Tant mieux. Pourtant on leur donne des salaires et de l'argent de transfert dans le budget : secrétaire d'Etat au Réseau ferroviaire, secrétaire d'Etat à l'Accompagnement des organisation paysannes, secrétaire d'Etat au PUDC...

Au niveau du budget de la Primature, les charges de personnel du ministre délégué au PUDC n'apparaissent pas. Comment vous l'expliquez ? À la place, on maintient le secrétaire d'Etat qui n'existe plus. Il est difficile de voter ce budget comme ça !!!


En plus, le secrétaire d'Etat bénéficie d'un budget de fonctionnement de 30 millions. Et 15 millions de carburant. Pourtant ,dans les charges de personnel, il est logé dans le cabinet du Premier ministre.

Toujours au niveau de la Primature, on a reconduit 102 millions de transfert courant pour le ministre porte-parole du gouvernement. Cet élément ne doit pas figurer dans le budget puisque le porte-parole du gouvernement est actuellement Secrétaire général du gouvernement. On lui octroie un salaire et des dépenses de transfert courant d'un montant de 102 millions comme on l'a vu. Mais dans le même temps, on octroie au Secrétaire général du gouvernement, 300 millions de transfert courant.

Dans les charges communes également, on prévoit 4 ministres, un secrétaire d'Etat avec de l'argent pour leur salaire et pour les membres de leur cabinet. Cela fait désordre.

2- Deuxième raison : Les autorisations faites au président de la République d’emprunter pour mille six cent quatre-vingt-six milliards (1686,8).

Monsieur le ministre,

Vous nous demandez d'autoriser le président de la République pour un montant supérieur à nos besoins pour l'année 2018. Vous avez installé un déséquilibre dans le budget. Vous ne respectez pas la loi organique dans ses dispositions sur l'équilibre budgétaire.


Si on autorise ce montant de 1686 milliards (mille six cent quatre-vingt-six milliards) pour cette année, vous serez à quatre mille quatorze milliards (4014 milliards) de budget pour 2018. Ce qui est inadmissible. Je rappelle que le budget est équilibré en ressources et en dépenses.

Vous n'avez pas besoin de plus de 1205 milliards hors ressources PPTE.

Je vous demande de revoir votre copie. Vous avez mélangé trop de choses. Vous avez également fait du double emploi. Cela fait désordre.

Je vous renvoie aux page 34 et 35 de la loi de finances et ensuite à la page 71 sur le déficit en annexe. Vous vous relisez et vous allez comprendre.

Je vous rappelle que pour cette année 2018, en prévision, Nous avons des ressources internes d'un montant de 2328 (recettes fiscales 2211 et 117 milliards de recettes non fiscales). Si on y rajoute ce montant de Mille Six Cent Quatre Vingt Six milliards (1686,8), on sera à plus de 4014 milliards comme je l'ai dit tout à l'heure.

Ça ne fait pas sérieux. Trop de confusion.

La confusion s'accentue lorsque dans le document portant budget programme, on nous fait ressortir un solde budgétaire global et un solde budgétaire de base avec respectivement -367 milliards et -87 milliards. Cela n'apparaît pas dans la loi de finances 2018. Un désordre total ! Une confusion inadmissible.

Allez à la page 30 du budget programme et 49 du projet de loi de finances.

3- Troisième raison : Les incohérences et contradictions sur les chiffres, les confusions sur les titres de la nomenclature budgétaire, les énormes différences sur les chiffres d'une rubrique à une autre...

Monsieur le ministre, il y a trop de problèmes dans votre budget.

A)- Les confusions inadmissibles :

Un exemple : Le titre IV (quatre) est qualifié de " transfert en capital" dans le document portant budget programme alors qu'il s'agit de transfert courant. Ce qui est inadmissible.

B)- Les différences sur les chiffres d'une même rubrique, entre l'exposé des motifs sur les dépenses de fonctionnement et les différences sur les dépenses d'investissement entre le document portant loi de finances et le document portant Budget programme.


Monsieur le ministre,

Aux pages respectives : 10 du projet de loi de finances et 08 du budget programme, il est fait ETAT de plusieurs chiffres différents.

- Dépenses de fonctionnement exécutées par l'état central : dans le budget programme, le montant est estimé à trois cents quatorze milliards (314,4milliards). Dans le document portant loi de finances 2018, le montant est estimé à (trois cent vingt et un milliards (321,7 milliards).

- Les dépenses de fonctionnement exécutées par les démembrements de l'Etat sont estimées à 463, 8 milliards, dans le budget programme, elles sont estimées à 471, 2 milliards. Des différences inadmissibles.

- Au niveau des dépenses d'investissement exécutées par les démembrements de l’Etat, dans le budget programme 2018, le montant est estimé à six cent soixante-quatre milliards (664,9 milliards) dans le projet de loi de finances le montant est estimé à cinq cent cinq milliards (505 milliards). Une grande différence. Ça fait désordre.

- Au niveau des dépenses d'investissements exécutés par l'Etat, au titre 5, les dépenses sont estimées à trois cent dix-sept milliards (317,2 milliards) dans la loi de finances 2028 et à 157 milliards dans le budget programme. Une énorme différence. Ça fait encore désordre !!!

3- Troisième raison : La violation des principes budgétaires notamment le principe de sincérité qui est un principe important dans la loi organique relative aux lois de finances. Ce principe est violé. Le budget n'est pas sincère.

4- Quatrième raison : L'autre élément qui est anormal dans le budget, est l'inscription au titre des ressources internes les 641 milliards de ressources externes. En effet, Les 641 milliards apparaissent dans la rubrique ressources externes et dans le même temps, ils sont inscrits dans les ressources internes. Annexe 1 de la loi de finances.

Cela fait désordre et viole la transparence budgétaire.

5- Cinquième raison : Le montant inscrit au niveau des investissements est inférieur au montant consacré aux investissements à la première année du PTIP à savoir 2018. En effet dans la loi de finances, le montant inscrit au titre des investissements est estimé à 1339 milliards alors que dans le PTIP 2018-2020, le montant prévu est de 1352 milliards.


6- Sixième raison : Le solde primaire est évalué dans la loi de finances budget programme à 87 milliards. NB : ce solde primaire est évalué dans le document 2018-2020 sur la dette à 134 milliards. Inadmissible.

7- Les Ressources FSE (le fonds de soutien à l'énergie). Il y a un problème avec ces ressources. Elles apparaissent et disparaissent. Elles apparaissent en ressources et parfois elles paraissent après budget général dont comptes spéciaux du Trésor compris. Si on les intègre, comme c'est le cas dans le tableau de l'annexe1, le budget serait à 3759 milliards. Le budget serait en déséquilibre. La preuve dans le tableau sur l'annexe 1, les ressources de la loi de finances y compris FSE sont estimées à trois mille sept cent cinquante-neuf milliards (3759 milliards) alors qu'au niveau de l'annexe 2 portant récapitulation globale par titre, le total de la loi de finances donne trois mille sept cent neuf milliards (3709 milliards).

Il s'y ajoute que les ressources FSE, n'apparaissent nulle part dans le projet de loi de finance à la page 49. Il y'a un réel problème.

8- Huitième raison : Les crédits évaluatifs. La liste des crédits évaluatifs est différente entre le projet de finances d'octobre et le projet de budget programme. On constate des différences énormes dans les deux documents. Cela fait désordre.

Pour toutes ces raisons, nous vous demandons de retirer le texte. Nous ne pouvons pas continuer de débattre sur ce qui n'est pas une réalité. Un texte lacunaire.

Notre pays a le devoir de se montrer sérieux, surtout vis à vis des partenaires techniques et financiers.

On a connu ici la situation de 2013 où on a titré dans un journal que le gouvernement "sénégalais a été pris en flagrant délit de mensonge sur les décrets d'avance". Cela ne saurait se reproduire. C'est pourquoi, nous restons vigilants.

Ce que je vous demande, n'a rien à voir avec les questions partisanes. C'est une question essentielle.