Six mois à la tête de l’Etat : Macky clone-t-il Wade ?

Il ne cherche sûrement pas à ressembler, encore moins à être comparé à Wade, mais tout ou presque fait penser à son prédécesseur. Consciemment ou inconsciemment, Macky Sali mime son "père putatif» Abdoulaye Wade sur tous les plans : politique, économique, comportemental... Le politologue Mame Less Camara que Walfadjri a sollicité décèle une série de ressemblances entre les deux. Le président Macky Sali imite Wade jusqu'à la caricature, fait-il remarquer. "Le président Macky Sali porte un projet de rupture, mais voit la réalité à travers les yeux de Wade», constate Mame Less Camara.

Comme Wade au tout début de son mandat, Macky Sali tarde à s'installer au palais présidentiel. Chaque matin, comme Wade au tout début de son mandat, il quitte son domicile privé pour rejoindre l'avenue Léopold Sédar Senghor. Et le soir, il fait le chemin inverse.

Au plan politique également, il refuse de se départir de sa double casquette de président de la République, et chef de parti pour mieux ressembler à son "père». Alors que depuis l'indépendance, la Constitution interdit au chef de l'Etat d'être chef de parti. Et c'est Wade lui-même, alors opposant, qui dénonçait le cumul de Diouf. «Mais, une fois au pouvoir, il en a fait un droit», rappelle Mame Less Camara. Qui estime qu'en introduisant une réforme constitutionnelle pour supprimer 1e Sénat et le poste de vice-président, Macky Sall aurait pu introduire, par la même occasion, une troisième requête pour un retour à la disposition de 1963 qui interdit le cumul. Car jusqu'en 2000, l'article 18 de la Constitution interdisait le cumul. En plus, en appliquant les conclusions des Assises nationales, il pourrait se départir de cette double casquette, d'après l'analyste politique.

Pléthore de ministres conseillers et de conseillers spéciaux

Toujours au plan politique, Macky Sall se fait un malin plaisir à s'entourer d'une pléthore de ministres conseillers et conseillers spéciaux. Bien malin celui qui connaît le nombre de conseillers spéciaux et de ministres conseillers. Cette autre «spécialité» de Wade qui l'avait rendue en partie impopulaire commence à prendre forme et à inquiéter dans l'entourage du nouveau pouvoir.

Comme Wade, Macky Sall nomme sans se soucier de l'opinion. N'a-t-il pas dit, selon L’As, en réponse à ceux qui pestent contre les nominations de l'ancienne patronne de l'Apix Aminata Niane comme ministre conseillère et de Babacar Touré à la tête du Conseil national de régulation de l'audiovisuel (Cnra): "Je suis président de la République, je nomme donc qui je veux». Wade avait servi la même formule à ceux qui critiquaient l'incompétence de certains membres de son entourage. "Je peux nommer mon chauffeur ambassadeur», avait-il ironisé.

Depuis son accession au pouvoir, Macky Sall, a repris une autre spécialité de son père putatif: le débauchage de militants. Il ne manque jamais l'occasion de demander aux responsables de son parti d'accueillir tous ceux qui voudront les rejoindre. Ce qui fait dire à l'analyste politique que Macky Sall est devenu un sergent recruteur. Car, de l'avis de notre interlocuteur, le cursus politique de Macky Sall a commencé non pas avec Aj/Pads mais avec Wade. "Wade est comme une sorte d'école pour lui. C'est lui qui l'a instruit», note-t-il.

Et mettant en pratique les leçons du Maître, l'élève pêche dans les eaux de l'opposition et même dans celles de ses alliés. Il y a deux jours, il disait à des militants Pds qui ont rejoint son parti qu'ils se sentiront à l'aise dans leur nouvelle formation politique. Auparavant, Cheikh Kanté, responsable à Fatick et directeur général du Port autonome de Dakar, avait pris dans ses filets l'adjoint d'ldrissa Seck à la mairie de Thiès.

Mais, Macky Sall ne se limite pas seulement à plagier la stratégie politique et comportementale de son prédécesseur. Il reproduit également ses schémas économiques. «Même si "Vus interrogez les catégories avec les-· quelles Macky Sall appréhende la réalité et les catégories qu'il utilise pour faire des projections de développement, vous verrez qu'il est resté fidèle à la stratégie de croissance accélérée (Sca) élaborée par le Pds"», dit-il. Les députés libéraux n’ont pas d'ailleurs manqué l’occasion de le rappeler au Premier ministre lors de sa déclaration de politique général les élus ont accusé Abdoul Mbaye d'avoir copié le document du Pds. Une accusation que le Premier ministre n'a pas totalement niée.

Cependant, Macky Sall peut se départir des yeux de Wade. Pour ce faire, Mame Less Camara lui conseille de faire son introspection. Cela, dit-il, pour déceler dans son propre esprit qui le fait agir comme Wade à son corps défendant, «c'est seulement ainsi qu'il pourra réaliser son programme pour le développement du Sénégal», conclut l’analyste politique.

Source : Walfadjri