leral.net | S'informer en temps réel

TITRISATION DE 120 MILLIARDS FCFA: La Sénélec tire le levier vert


Rédigé par leral.net le Vendredi 17 Octobre 2025 à 16:07 | | 0 commentaire(s)|

La Senelec (Société nationale d’électricité du Sénégal) franchit une étape majeure dans la modernisation de son financement, en lançant, depuis le 3 octobre dernier, une opération de titrisation par Appel public à l’épargne (APE), pour lever 120 milliards de francs Cfa sur le marché. A travers le Fonds Commun de Titrisation de Créances (FCTC) SENELEC 2025-2030 qui regroupe un portefeuille de créances impayées, l’entreprise nationale transforme son passif en moteur de développement durable, dans un montage inédit pour le marché financier ouest-africain.
TITRISATION DE 120 MILLIARDS FCFA:  Senelec tire le levier vert
Même si l’entreprise a pu réaliser d’autres émissions ou financements auparavant, elle fait fort avec le lancement, depuis le 3 octobre dernier, du Fonds Commun de Titrisation de Créances (FCTC) SENELEC 2025-2030, pour lever un montant total de 120 milliards FCfa. La particularité de cette opération d’une duration courte (3 ans), repose sur des obligations doublement labellisées Green Bond & SLB, ce qui en fait une opération majeure pour le marché sénégalais et sous-régional.

Les obligations sont offertes depuis le 29 septembre 2025 dernier pour une période de souscription qui court jusqu’au 5 novembre 2025, avec une maturité au 30 septembre 2030. Le webinaire organisé ce vendredi 17 octobre 2025 par les acteurs de l’opération, « permet aux investisseurs potentiels d’absorber toute l’information pour recueillir des éclairages supplémentaires », comme l’a souligné Ababacar Diaw, Directeur général IMPAXIS, co-chef de file.  

Encadrée par l’Autorité des Marchés Financiers de l’UMOA (AMF-UMOA), et structurée par BOAD Titrisation, Arrangeur & Société de Gestion, avec le consortium IMPAXIS SECURITIES et CGF BOURSE, deux grosses SGI (Sociétés de gestion et d’intermédiation) de la place, Co-Chefs de File du syndicat de placement, l’opération, prévoit trois catégories d’obligations :
  • Seniors A, d’un montant de 83 milliards FCFA, rémunérée à 8,15 % et jugées les plus sûres (notée AAA par Moody’s);
  • Mezzanines B d’un montant de 25 milliards FCFA à 10 % (risque intermédiaire) notée AA ;
  • Juniors C1 et C2 d’un montant de 12 milliards FCFA (plus risquées) dont la tranche C2 ne versera aucun coupon (rendement nul).
Trois catégories d’obligations qui, selon Kalidou Diallo, Directeur général de CGF Bourse (co-chef de file) « correspondent à une structure robuste de financement en tranches de dettes hiérarchisées, avec une subordination. Un montage financier standard (souvent utilisé dans la titrisation ou le financement de projets complexes) qui permet d'allouer différemment le risque et la rémunération aux investisseurs. »

L'analyse de ces tranches se base notamment sur les concepts de séniorité (ordre de remboursement) et de rendement/risque.
 
Une première symbolique
 
Le principe est simple : le portefeuille titrisé regroupe des créances échues et impayées de Senelec depuis mars 2023, dues par des entités publiques, entreprises et représentations diplomatiques. C’est ce portefeuille qui est cédé au fonds dédié (FCTC) et qui sert de garantie pour l’émission d’obligations destinées aux investisseurs.
 
En convertissant des créances échues et impayées, détenues sur des entités publiques, entreprises et représentations diplomatiques  en liquidités fraîches destinées à financer des projets d’énergies renouvelables et de durabilité, l’approche innovante permet à la SENELEC de renforcer sa trésorerie sans alourdir la dette publique, tout en ouvrant la voie à un modèle plus moderne de financement des entreprises publiques africaines.

Le FCTC SENELEC 2025-2030 marque une première symbolique pour la région, démontrant encore une fois, que la titrisation peut devenir un instrument stratégique pour financer les politiques publiques sans recourir à l’endettement souverain classique.

Pour les marchés financiers de l’UEMOA, c’est une opportunité d’attirer davantage d’investisseurs institutionnels en quête de placements à impact. Pour SENELEC, c’est un moyen de renforcer sa crédibilité, de moderniser sa gestion et d’accélérer ses engagements climatiques.

Au service du développement durable

Au-delà de l’innovation financière, l’opération s’inscrit dans la stratégie de transition énergétique du Sénégal visant à renforcer l'accès à l'électricité tout en réduisant l'intensité carbone. Aussi les fonds mobilisés seront alloués comme suit :
  • 63 milliards FCFA (52,5 %) consacrés à des obligations vertes, finançant des centrales solaires avec stockage d’énergie ;
  • 57 milliards FCFA (47,5 %) destinés à des obligations liées à la durabilité (SLB), indexées sur des objectifs mesurables comme le taux d’accès à l’électricité et la réduction de l’intensité carbone.
Des initiatives qui s’alignent sur la Taxonomie verte de l’AMF-UMOA et les normes de durabilité de la Banque mondiale (IFC).

Cette approche hybride place SENELEC dans la mouvance internationale des obligations ESG (environnement, social, gouvernance), en conformité avec la taxonomie verte de l’AMF-UMOA et les standards de la Banque mondiale (IFC).

« Avec cette titrisation verte, la SENELEC ne se contente pas de lever des fonds : elle invente une nouvelle grammaire financière pour les entreprises publiques africaines », estime Alioune Ibrahima Ba, Directeur financier et comptable de Senelec. « Un nouvel élan pour construire un avenir énergétique plus durable », ajoute-t-il.
 
Risques maîtrisés mais réels
 
Conformément à la réglementation, Senelec prend bien soin, dans sa note d’information dédiée à l’opération malgré sa solidité technique et en direction des investisseurs, de préciser que celle-ci ne comporte « aucune garantie publique » et les investisseurs ne sont protégés que par la qualité des créances cédées : « Les remboursements dépendront exclusivement du recouvrement des créances cédées ». Les investisseurs peuvent ainsi évaluer leur profil de risque, c’est-à-dire la capacité des débiteurs à honorer leurs créances notamment sur les tranches Mezzanine et Junior 

Cependant, comme l’ont rappelé les acteurs, des mécanismes de protection ont été intégrés, notamment : les paiements sont subordonnés selon les classes d’obligations ; un compte de réserve et une ligne de liquidité assurent les remboursements ; le tout sous le contrôle de l’AMF-UMOA, via le visa n° FCTC/2025-03/CO-01-2025.

Ces dispositifs visent à rendre l’opération aussi crédible qu’un emprunt d’État, mais adossé à des créances privées. La rigueur du montage, la surveillance de l’AMF-UMOA et la transparence de SENELEC à travers les sections Facteurs de risques et Mécanismes de couverture de la note d’information, offrent des gages de confiance.  
Le succès dépendra cependant de deux choses : la qualité du recouvrement et la stabilité macroéconomique du Sénégal d’ici 2030.
Malick NDAW


 



Source : https://www.lejecos.com/TITRISATION-DE-120-MILLIAR...

La rédaction