Thiaroye-Gare: «Dubaï, la naissance d'une favela

Thiaroye ou, si vous préférez, Thiaroye‐gare ! Ce célèbre quartier de la banlieue dakaroise, à l’image de Grand‐Yoff, Médina, Colobane, Grand‐Dakar et autres Parcelles assainies, semble avoir été défini comme étant le réceptacle de la délinquance urbaine. Hélas, ce sombre tableau n’est que la traduction de certains préjugés, puisque la réalité est autre... tellement autre ! Il est vrai que Thiaroye‐gare, comme l’indique son nom, est aujourd’hui victime de sa gare (Train express régional/TER), qui fait pourtant la fierté voire la mobilité des autres populations environnantes de la banlieue dakaroise (Pikine, Guédiawaye, etc.). Thiaroye‐gare subit également les affres économiques de son grand marché ayant acquis une dimension régionale, où convergent commerçants étrangers et marginaux venus d’horizons divers.

Aujourd’hui, les paisibles populations de Thiaroye‐gare sonnent la mobilisation contre la naissance d’un nouveau milieu interlope appelé «Dubaï». Ce, dans le but de prouver que leur localité ne saurait être un repli pour malfaiteurs. Evidemment, puisque cette sorte de « mini­ bidonville » est devenue un haut lieu de la délinquance urbaine, où s’activent les receleurs, les agresseurs, les trafiquants de drogue, les prostituées, les sans‐abris, les repris de justice, etc. « Dubaï», comme l’indique son nom en référence à l’émirat arabe, est situé dans les réserves foncières du Train express régional (TER) de la gare de Thiaroye. En effet, « Dubaï/Thiaroye », contrairement à la vraie ville de Dubaï, est le plus grand comptoir commercial de marchandises illicites de la banlieue dakaroise, où se revendent la plupart des objets volés ou arrachés (portables, ordinateurs, bijoux, vêtements, chaussures, etc.). La vente de drogue (yamba, diluant, cocaïne...) s’opère à ciel ouvert dans cette favela située en bordure de la route Tally Diallo. Et pis, en face du Commissariat de police de Thiaroye.

El. Hadj Mb., un notable du quartier joint par « Le Témoin », se désole de l’impuissance de cette police dite de proximité. Une unité censée rapprocher les forces de l’ordre des citoyens par une présence régulière, une collaboration étroite et une approche axée sur la prévention et la résolution des problèmes communautaires. « Malheureusement, tous les commissaires de police qui se sont succédé à Thiaroye­-gare, ont exprimé leurs limites face à ce haut lieu de la criminalité. Malgré les opérations de rafles périodiques, ils m’ont ou­vertement déclaré que seul le ministre de l’In­térieur ou le gouverneur de Dakar, peut faire mener une opération de déguerpissement de grandeur nature, afin de rayer définitivement « Dubaï » de la carte de la criminalité urbaine. Le sous­-préfet de Thiaroye­-gare, Ousmane Mbodj, n’en parlons pas ! D’ailleurs, les popu­ lations ne veulent même pas entendre le nom de ce sous­-préfet ,dont la passivité, le laxisme et l’impuissance sont connus de tous... », s’emporte l’octogénaire.

Un squat pour les expulsés de la Cité Imbécile !

Il est vrai que « Dubaï » s’est progressivement formé après l’inauguration de la gare TER en 2021. Mais la zone est transformée en « narco ­bidonville », avec l’arrivée massive des expulsés des cités Imbécile et Baraque (Hann), dont la plupart sont des malfaiteurs, prostituées, agresseurs, mendiants, trafiquants de drogue, brocanteurs, charretiers etc. A en croire un membre du collectif des habitants de Thiaroye‐gare, presque tous les marginaux et délinquants chassés des cités Imbecile (Hann), zone de Captage (Castors) et Ancienne Piste (Mermoz), se sont installés progressivement à Dubaï.

Pour éviter une chasse aux délinquants synonyme d’une justice populaire aux conséquences dramatiques, le Collectif des délégués de quartiers de Thiaroye Gare, le Réseau des Badiane‐Gox, les Conseils de quartiers de Fass I, Fass II et Layene, ainsi que les associations sportives et culturelles de Thiaroye Gare, ont signé une pétition adressée au ministre de l’Intérieur, Me Bamba Cissé. En parcourant cette pétition doublée d’un mémorandum, les Thiaroyois réclament le démantèlement immédiat de cette favela située au quartier Fass 2, à proximité de la Gare du TER.

« Dans sa phase de mise en œuvre, le Projet du Train express régional (TER) a profondément transformé la configuration géographique des communes qu’il a traversées. Partout où il est passé, ce projet a amé­nagé des gares de haut standing. Et dans certaines localités, il n’a pas manqué d’ex­proprier des ménages en vue de réaliser les commodités d’accompagnement à la hau­teur de l’envergure du projet.

Malheureusement, à Thiaroye-­Gare, l’emprise libérée, après la réalisation du TER, est marquée par une prolifération ex­ponentielle d’occupations irrégulières et anarchiques de vendeurs de drogues, d’agresseurs, de prostituées et de récupé­rateurs d’ordures », lit‐on dans la pétition dont « Le Témoin » a obtenu copie.

Une pétition d’abord...

Et le Collectif des forces vives de Thiaroye‐Gare de dénoncer ces « entrailles » crimi­nelles qui impactent le cadre de vie des riverains, souvent confrontés à des cas de vols, d’agressions, et même, de viol. A l’attention du ministre de l’Intérieur, les populations disent que le site communément appelé « Dubaï» où se sont installés depuis plusieurs années des marginaux, est une occupation anarchique. « Cette situation constitue une menace grave pour la sécurité publique, compromet la mo­bilité et dégrade l’image de la commune. Elle expose particulièrement la jeunesse, qui est aujourd’hui la première victime de ce fléau. C’est pourquoi, après plusieurs correspon­dances adressées aux autorités administratives et policières, sans solution, nous réitérons notre vœu et vous saurez gré de bien vouloir ordonner, Monsieur le ministre, le déguerpissement de l›occupation anar­chique du site. Et surtout, de sécuriser du­rablement l’espace libéré, afin d’éviter toute réoccupation irrégulière », implorent les habitants du Grand Thiaroye.
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Souhaitons que leur cri de détresse sociale soit entendu et que Dubaï soit un mauvais souvenir.





Le Témoin