ABSENCES- Cheikh Sèye exfiltré du Sénégal, le commanditaire absent

L’ancien ministre de l’Artisanat et des Transports aériens a été, hier, la star du procès contre les prévenus, accusés d’avoir saccagé les rédactions des quotidiens L’As et 24 Heures Chrono, le 17 août dernier. Même absent des lieux, parce qu’il bénéficie d’un douteux privilège de juridiction, Farba Senghor a été au cœur des débats commencés assez tôt dans la matinée après la bataille de procédure perdue par la partie civile.
A l’audience, il y a une constante qui échappera difficilement à la vigilance du tribunal : tout partait de lui et tout revenait vers lui. La somme de 250 000 francs Cfa qui a servi à «payer le transport» aux personnes accusées peut-elle provenir d’ailleurs que de sa poche ? Apparemment non, au vu des nombreuses déclarations tournant autour du financement de l’opération commando contre les journaux cités plus haut. La fameuse voiture blanche (peut-être un Pickup) dont l’immatriculation échappe à (presque) tout le monde, mais dont on sait avec certitude maintenant qu’elle est de la catégorie AD peut-elle avoir été extraite du parc automobile de l’administration et utilisée pour la sale besogne sans l’aval du ministre Farba Senghor ? Il semble que non.
Mais au fait, qui a aidé le maillon fuyant de la chaîne de violence, Cheikh Sèye, à quitter le territoire du Sénégal en toute tranquillité au lendemain des attaques barbares contre nos confrères ? Or, il est apparu, au cours des échanges entre protagonistes, que le sieur Cheikh Sèye a été le maître d’œuvre de cette expédition punitive. C’est à lui que les 250 000 francs Cfa ont été remis par le commanditaire, et c’est lui qui a remis ladite somme à Adama Dème dit «Grand Ada». Et d’après les propos des éléments du groupe constitué autour de Mor Talla Dème, Cheikh Sèye était également le seul de la bande à détenir une arme à feu. Son témoignage aurait permis d’éclaircir de larges pans de l’enquête.
Par ailleurs, Farba Senghor est aussi victime des charges constantes et cohérentes de «Grand Ada». Devant la barre, ce dernier n’a jamais varié dans ses déclarations relatives aux circonstances dans lesquelles l’ancien ministre a fait appel à lui. Les enquêteurs ont relevé au moins quatre appels sortants du téléphone portable de M. Senghor vers celui de Adama Dème.

DEFENSE - Le niet comme stratégie: La dénégation suicidaire
Cela sautait aux yeux : la ligne de défense du trio infernal, serviteur de l’ancien ministre des Transports aériens, avait été construite sur un principe simple et invariable : la dénégation envers et contre tout. «Nous ne savons rien de ce qui s’est passé, nous n’étions même pas sur les lieux, nous ne connaissons pas ces personnes qui sont avec nous, là…», ont-ils répété sans se lasser. Abdoulaye Sow, le chauffeur personnel de Farba Senghor, et les deux gorilles, Pape Déthié Fall et Babacar Sarr, sont restés carrés jusqu’à affaiblir la parade établie. Par exemple, Sarr s’est très vite retrouvé dans une posture impossible lorsque le tribunal l’a confronté avec «Grand Ada». Ce dernier a dit au tribunal l’avoir appelé après l’opération nocturne, afin de protester contre la débauche de violence perpétrée aux sièges de L’As et de 24 Heures Chrono. Pour toute réponse, le gorille de Farba Senghor l’interpelle sur un autre sujet : pour la prise en charge de son enfant malade au centre Nabil Choucair, il avait besoin de 20 000 francs Cfa. Une somme que «Grand Ada» lui apportera «de bon cœur» en le rejoignant sur les lieux. Acculé de questions, il s’embrouillera naturellement dans des contradictions que le tribunal retournera contre lui.
source le quotidien