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ASSEMBLEE NATIONALE/ LE MANDAT DU PRESIDENT PASSE DE 5 A 7 ANS La majorité force le barrage de l’opposition

La durée du mandat du prochain président de la République sera de sept ans renouvelable une fois. Les députés de la majorité en ont décidé ainsi hier, en votant le Projet de Loi constitutionnelle modifiant la première phrase de l’alinéa premier de l’article 27 de la Constitution. L’opposition parlementaire et certains de leurs collègues de la mouvance n’ont pu rien faire, en dépit de leurs arguments.


Rédigé par leral.net le Mardi 29 Juillet 2008 à 09:32 | | 0 commentaire(s)|

ASSEMBLEE NATIONALE/ LE MANDAT DU PRESIDENT PASSE DE 5 A 7 ANS  La majorité force le barrage de l’opposition
Mais le projet de loi voté récuse la rétroactivité, autrement dit la « présente modification ne s’applique pas au mandat du président de la République en exercice au moment de son adoption ».

Le Projet de Loi constitutionnelle modifiant la première phrase de l’alinéa premier de l’article 27 de la Constitution, a été voté hier, lundi 28 juillet, dans la soirée par les députés de la majorité présidentielle. Ramenant du coup la durée du mandat du président de la République de cinq à sept ans. Toutefois, l’article unique amendé par le gouvernement précise que « la présente modification ne s’applique pas au mandat du président de la République en exercice au moment de son adoption ».

Mais comme il fallait s’y attendre, l’opposition parlementaire de même que certains députés libéraux et de la majorité ont rejeté le projet de la loi en question.

La compétence du Parlement en la matière a été questionnée : est-il compétent pour modifier ce que le peuple a adopté par référendum ? La réponse coule de source, selon eux. Mieux, pour les partisans du rejet,il existe un verrou qui impose le recours au référendum pour modifier l’article 27 de la Constitution. Pour étayer leurs arguments, ils soutiennent que l’article 27 traite du mandat du président de la République qui constitue un bloc auquel s’applique le recours au référendum. Donc, selon eux, « l’alinéa 2 de l’article 27 s’applique en bloc aux deux phrases de l’alinéa premier du même article de la Constitution, conformément à la thèse soutenue par certains à travers les médias ».

Les partisans du rejet déroulent

Les partisans du rejet ont aussi posé la question de l’opportunité de la modification de l’article 27de la Constitution, d’autant qu’elle ne s’applique pas au président mandat du Président. Imam Mbaye Niang de se demander si Président Wade n’est pas en train de préparer la voie à un dauphin. D’autres ont posé la question de l’opportunité en la liant au contexte actuel caractérisé par la flambée des prix de denrée de première nécessité. Histoire de dire qu’il existe d’autres urgences auxquelles l’actuel régime doit apporter réponses.

Me Ndèye Fatou Touré voit dans ce vote du projet de loi modifiant l’article 27 une « rupture du contrat moral qui a présidé à l’élaboration de cette Constitution ». Son collègue de la mouvance présidentielle, Moustapha Diop Djamil ne dit pas autre chose en soulignant que la majorité qui a décidé de voter ce projet de loi ont tourné le dos à « l’Assemblée de rupture » qu’ils ont toujours prônée. Pour lui, le député doit toujours mettre en avant l’intérêt du peuple et non du parti. Il ne voit aucune opportunité à voter ce texte.

Wade rattrapé par l’histoire

Son collègue, le député libéral de Nioro soutient aussi bien le Parti démocratique sénégalais (Pds) que le peuple, personne n’y gagne. Il rappelle que c’est le « tripatouillage honteux de la Constitution par le Parti socialiste (Ps) » qui avait, entre autres, amené le Président Wade, en 2001, à soumettre le texte fondamental à référendum. « Je sais que le contexte seul ne suffit, il y a plus important encore : la morale politique. Il me plait alors de donner lecture du discours d’ouverture du 15 janvier 1987 à Dakar à l’occasion de la Convention nationale du Pds : « La seule chose qui me rend un peu triste et compatissant, c’est que l’adversaire n’hésite jamais à franchir les frontières morales qui balisent la vie politique. Il y a des limites que nul ne devrait franchir. Ce sont les limites de la morale politique qui n’est inscrite dans aucun code hors celui de l’honneur. La morale ne se codifie pas. Elle participe de la culture. Si vous voulez modifier le régime, alors organisez un référendum populaire. Pas de tour de passe-passe par le Parlement (…)

La démocratie a des règles contraignantes pour tous » », souligne-t-il avec force. Il rappelle à ses collègues libéraux et de la majorité que le Pds a toujours opté pour le 2x5=10 ans au pouvoir au moment où le Ps défendait le 2x7=14, voire 3x5. « Ma crainte est que si nous adoptons aussi facilement le 2x7, je ne serai pas surpris demain que d’autres adoptent le 2x15=30 ans. Le verrou a sauté », explique le jeune député libéral de Nioro.

L’élu fait remarquer, contrairement à l’exposé des motifs qui souligne que la « pratique a montré que cinq ans est une durée très courte pour l’exercice serein de la majorité suprême », qu’en réalité le problème ne devrait pas se poser pour un régime qui a un programme clair. « L’homme sénégalais n’est pas moins intelligent que les autres », dit-il, avant d’ajouter : « Si les hommes politiques changent, et doivent changer, l’administration reste et doit rester, aucun pouvoir ne pourra créer sa propre administration ; l’administration est sénégalaise ».

Les arguments de la majorité

Quant aux députés partisans du vote du projet de loi constitutionnelle modifiant la première phrase de l’alinéa premier de l’article de la Constitution, ils ont soutenu l’idée de la compétence du Parlement pour changer les dispositions de l’article visé. Ils avancent que l’homme se doit de se remettre en cause, initier des actions, les mettre en œuvre, les évaluer et les adapter par rapport à l’environnement global, aux préoccupations et aux priorités. Les députés de la majorité ont insisté sur le fait que l’article 27 ne soit pas adapté à la réalité. « Lorsque vous venez pour la première fois au pouvoir pour cinq, vous faites deux ans d’imprégnation, la troisième année vous prenez des initiatives que vous commencerez à matérialiser pendant la quatrième année qui constitue une année de pré-campagne électorale, alors que le président de la République n’a même pas eu le temps de réaliser son programme, encore moins de l’évaluer », expliquent-ils.

Quant à la légalité de la modification, les députés de la majorité soutiennent que du point de vue grammaticale, « cette » qui est un adjectif démonstratif, renvoie à la dernière idée exprimée, donc à la seconde phrase de l’alinéa premier de l’article 27 de la Constitution, à savoir la limitation du nombre du mandat à deux et non à la durée du mandat ».

En ce qui concerne l’opportunité de la modification de l’article 27, les députés libéraux et leurs alliés avancent qu’en politique, le juge de l’opportunité, c’est celui qui détermine la politique, en l’occurrence le président de la République. En plus, disent-ils, le mandat de sept ans ne devrait gêner personne. Au contraire, il y aurait plus d’efficacité pour le prochain Président.

« La compétence du parlement ne souffre donc d’aucune contestation sérieuse ».

Prenant la parole, le Ministre d’Etat, Me Madické Niang a d’abord précisé qu’ « il n’a jamais été question, au niveau de la Commission cellulaire chargée de rédiger la Constitution de 2001, d’appliquer la disposition relative au recours au référendum sur la durée du mandat. La durée du mandat avait fait l’objet d’un accord consensuel de la classe politique ». Et d’ajouter : « par contre la grande bataille à livrer et pour laquelle il fallait un verrou, c’est la limitation à deux des mandats, parce qu’on était convaincu que jamais par des élections, on ne pouvait faire partir le pouvoir en place. En limitant le nombre de mandats, on avait la possibilité d’amener le président de la République sortant à ne pas se représenter au bout de deux mandats et d’avoir un postulant qui n’avait pas les rouages de l’Etat et qu’on pouvait bousculer par des élections. Le seul artifice qu’il fallait après le discours de la Baule sur la démocratie, c’était d’imposer au Président en place, de se soumettre à la règle de la limitation des mandats ». Le Ministre d’Etat a rassuré sur le caractère non rétroactif de la loi. « La rétroactivité d’une règle s’énonce, elle ne se déduit jamais », dit-il.

Revenant sur les alinéas de l’article 27, Me Madické Niang souligne « qu’après les deux phrases successives, l’expression « cette disposition » ne concerne que la phrase précédente et les deux ne peuvent former un bloc pour se voir appliquer le référendum. Aucune forme d’acrobatie intellectuelle ne peut démontrer le contraire. La compétence du parlement ne souffre donc d’aucune contestation sérieuse ».

Le référendum n’a jamais été utilisé…

Se baisant sur l’expérience de l’histoire politique de notre pays, Me Madické Niang soutient que le référendum n’a jamais été utilisé au Sénégal pour modifier la durée du mandat présidentiel.

En effet, s’agissant des impératifs du moment, le Ministre d’Etat trouve que c’est « le moment le plus opportun pour parler des élections de 2012 et que, si on posait le problème à l’approche des élections, le débat serait encore vicié ». Quant aux députés qui ont annoncé qu’ils ne vont pas voter le projet de loi, le Ministre d’Etat lance ces mos à leur endroit : « Il y a des moments où il faut assumer et avancer. La République ne peut pas donner du temps au temps ».

Deux manifestants interpellés

Deux militants de l’opposition, ont été interpellés hier, lors d’une manifestation de protestation contre le projet de Loi constitutionnelle modifiant la première phrase de l’alinéa premier de l’article 27. Ne pouvant pas accéder aux grilles de l’hémicycle, les manifestants ont investi le boulevard de la République, avant d’être neutralisés, puis dispersés par des forces de l’ordre.

Niang Pape Alé