leral.net | S'informer en temps réel

CFEE, BFEM, BAC : la COSYDEP publie un rapport exhaustif sur l’évolution des examens scolaires de 2019 à 2025

La Coalition des Organisations en Synergie pour la Défense de l’Éducation Publique (COSYDEP) a rendu public un document exhaustif sur l’état des examens scolaires au Sénégal, couvrant la période 2019 à 2025 et incluant les résultats du CFEE, du BFEM et du Baccalauréat. Ce travail de longue haleine, fruit de la mobilisation des observatoires locaux de la qualité de l’éducation présents dans les quatorze régions du pays et de la Task Force nationale, offre une photographie détaillée de l’évolution des performances scolaires, avant, pendant et après la pandémie de Covid-19, tout en mettant en lumière les écarts structurels et les défis persistants.


Rédigé par leral.net le Samedi 23 Août 2025 à 17:32 | | 0 commentaire(s)|

CFEE, BFEM, BAC : la COSYDEP publie un rapport exhaustif sur l’évolution des examens scolaires de 2019 à 2025
L’étude met d’abord en évidence le parcours contrasté du Certificat de Fin d’Études Élémentaires (CFEE). En 2019, le taux de réussite atteignait 57,3 %, avant de bondir à 72 % en 2020, année marquée par la crise sanitaire. La fermeture des écoles et l’allègement des programmes avaient conduit à des conditions particulières d’apprentissage, notamment la réduction des effectifs par classe et un recentrage sur les fondamentaux, qui ont paradoxalement favorisé la réussite. Mais cet acquis a été de courte durée.

En 2021, le taux est retombé à 62,1 %, avant de remonter à 73,8 % en 2022 puis d’atteindre un pic historique en 2023 avec 82,08 %. Cet élan fut cependant interrompu par une chute brutale à 65,5 % en 2024, illustrant la vulnérabilité du système aux chocs socio-politiques. En 2025, le CFEE se stabilise à 70,7 %, un niveau jugé insuffisant par les analystes de la COSYDEP, qui pointent les disparités régionales très marquées. Alors que Kolda, Dakar et Ziguinchor affichent des taux supérieurs à 78 %, des académies comme Louga, Matam et Kédougou peinent à franchir la barre des 63 %, révélant de profondes inégalités territoriales.

Le Brevet de Fin d’Études Moyennes (BFEM) suit une trajectoire similaire, avec des oscillations notables. En 2019, seuls 51,7 % des candidats avaient réussi. Mais dès 2020, en plein contexte Covid-19, le taux bondit à 74,2 %, conséquence de l’encadrement rapproché et de l’allègement des programmes. La reprise fut moins brillante en 2021, avec une baisse à 67,9 %, avant de s’établir à 70,3 % en 2022. Les années suivantes marquent une reprise encourageante, atteignant 76,3 % en 2023 et 78,5 % en 2025, soit une valeur record.

Toutefois, COSYDEP attire l’attention sur de fortes disparités entre zones rurales et urbaines. Matam, Tambacounda, Kaffrine et Kolda enregistrent des taux supérieurs à 87 %, tandis que des académies comme Louga, Fatick et Rufisque se situent nettement en dessous de la moyenne nationale. Ce paradoxe, où certaines zones rurales devancent les grands centres urbains, s’explique en partie par des effectifs moins pléthoriques et un encadrement plus rapproché, permettant aux élèves d’évoluer dans un environnement plus favorable malgré un déficit de ressources matérielles.

S’agissant du baccalauréat, l’analyse de la période 2019-2025 met en lumière une instabilité chronique. En 2019, le taux de réussite s’établissait à 37,6 %, avant de grimper à 48,2 % en 2020, puis de retomber à 45,3 % en 2021. Une embellie est notée en 2022 avec 51,9 %, mais cette tendance n’a pas résisté aux soubresauts politiques et sociaux des années suivantes. En 2025, le taux global se fixe à 47,7 %, avec seulement 20,8 % d’admis au premier tour. Les résultats désagrégés par série révèlent de profondes disparités. La série scientifique S1 affiche un taux de réussite exceptionnel de 97,6 %, dont 86,7 % dès le premier tour, portée par des effectifs réduits, un suivi individualisé et un respect rigoureux du quantum horaire. À l’inverse, la série littéraire L'1, qui concentre près d’un quart des candidats, n’enregistre que 38 % de réussite, avec un maigre 11 % au premier tour. La COSYDEP y voit le reflet d’un système d’orientation souvent subi, de classes pléthoriques et d’un encadrement insuffisant. Les séries S2, L2 et technologiques se situent dans une zone intermédiaire, confirmant que les filières scientifiques offrent globalement de meilleures perspectives que les littéraires.

Le rapport souligne également d’importantes disparités régionales. Dakar domine avec 60,4 % de réussite et 11,4 % de mentions, loin devant Ziguinchor (38,4 % et 1,7 % de mentions) ou Sédhiou (36,7 % et 1,3 %). Ce contraste reflète la concentration des ressources et des enseignants expérimentés dans les zones urbaines, laissant les académies périphériques dans une situation de grande fragilité. Un cas particulièrement remarqué est celui de l’Office diocésain de l’enseignement catholique (ODEC), qui atteint 91,7 % de réussite et plus de 32 % de mentions, preuve de l’efficacité d’un encadrement rigoureux, de classes moins surchargées et d’un environnement scolaire maîtrisé.

L’une des originalités de cette édition est l’analyse croisée entre le BFEM et le BAC 2025. Elle révèle que les taux de réussite au BFEM, largement supérieurs, ne se traduisent pas toujours par des résultats positifs au BAC. Certaines académies comme Ziguinchor, Tambacounda, Kolda et Sédhiou, bien classées au BFEM, chutent fortement au BAC, ce qui interroge sur la cohérence du système d’évaluation et la continuité pédagogique entre le cycle moyen et le cycle secondaire. L’académie de Matam illustre un contre-exemple : elle est première au BFEM et quatrième au BAC, malgré son isolement géographique et le faible nombre d’écoles privées. Ces constats, selon la COSYDEP, plaident pour une harmonisation des pratiques et une meilleure articulation entre les différents cycles.

Au terme de son analyse, la COSYDEP formule une série de recommandations. Elle appelle d’abord à renforcer la qualité des apprentissages dès le primaire, pour éviter les échecs en cascade qui fragilisent l’ensemble du parcours scolaire. Elle insiste ensuite sur l’urgence de réduire les inégalités territoriales, à travers une meilleure répartition des enseignants, des infrastructures et du matériel pédagogique. Elle plaide pour l’instauration de dispositifs de remédiation systématiques après chaque examen, afin de soutenir les élèves en difficulté et d’améliorer la transition vers le niveau suivant.

La Coalition suggère également de repenser le système d’orientation, d’encourager les filières scientifiques et technologiques, et de mieux accompagner les élèves orientés par défaut vers les séries littéraires. Elle souligne enfin la nécessité de consolider la formation continue des enseignants, de renforcer les liens entre l’école et la communauté et de préparer le système éducatif à faire face aux crises, qu’elles soient sanitaires, politiques ou environnementales.

À travers ce rapport, la COSYDEP lance un signal fort : malgré des progrès ponctuels, le système éducatif sénégalais demeure instable et inégalitaire. Les résultats oscillants du CFEE, du BFEM et du BAC traduisent moins une incapacité des élèves qu’une fragilité structurelle. Pour la Coalition, seule une politique éducative cohérente, durable et inclusive, qui place l’équité et la qualité au cœur de ses priorités, permettra de transformer en profondeur l’école sénégalaise et de la rendre véritablement au service du développement national.

Birame Khary Ndaw

Ousseynou Wade