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Facebook, Google et Twitter: les nouveaux flics du web ?

Rédigé par leral.net le Mercredi 20 Mai 2015 à 11:27 | | 0 commentaire(s)|

Le chanteur Jean-Luc Lahaye a été condamné lundi 18 mai à une peine d'un an de prison avec sursis pour corruption de mineure, après des échanges sur Facebook. L'alerte avait été donnée grâce à un algorithme du réseau social.


Facebook, Google et Twitter: les nouveaux flics du web ?

[Jean-Luc Lahaye a été condamné à une peine d'un an de prison avec sursis]url:http://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/jean-luc-lahaye-condamne-a-un-an-de-prison-avec-sursis-pour-corruption-de-mineure_1680291.html  par le tribunal correctionnel de Paris pour corruption de mineure. Les faits remontent à 2013, lorsque l'ancienne vedette, âgée de 62 ans, [réclamait à plusieurs reprises à une jeune fille de 15 ans des photos d'elle nue]url:http://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/proces-de-jean-luc-lahaye-une-simple-relation-sexuelle-virtuelle-defend-son-avocat_1664082.html , par messages privés échangés sur Facebook. Il a cependant été relaxé pour les chefs d'accusation de "proposition sexuelle" et "détention d'images pédopornographiques". 

Jean-Luc Lahaye a immédiatement fait part de sa "consternation", après ce jugement. Pour sa défense, il rappelle sur les ondes de [RTL]urlblank:http://www.rtl.fr/actu/societe-faits-divers/jean-luc-lahaye-est-l-invite-de-rtl-7778403264  que la jeune fille est "majeure sexuelle". Et le chanteur de tenter de se "justifier": "J'ai toujours aimé les filles plus jeunes et je ne suis pas le seul! (...) Je vais quand même pas me taper Julie Pietri! (sic)" En réaction, cette dernière a annoncé ce mercredi vouloir porter plainte contre son ancien acolyte de la tournée "Star 80". 

Facebook fouille dans vos messages privés

 
 

D'après Jean-Luc Lahaye, il n'y aurait "aucune victime" dans l'affaire de corruption de mineure, puisqu'il "n'y a aucun plaignant". C'est en effet toute la spécificité de ce dossier. Aucune plainte n'a été déposée. Au cours de l'audience, la jeune fille a même expliqué qu'elle trouvait "grave" que la justice puisse avoir de telles photos en sa possession. En réalité, c'est la responsable du service de sécurité du siège européen de Facebook qui s'est chargée d'alerter elle-même les autorités françaises, rappelle [Rue 89]urlblank:http://rue89.nouvelobs.com/2015/05/18/jean-luc-lahaye-a-corrompu-mineure-sen-prend-a-facebook-259211 .  

Les échanges privés avaient été préalablement détectés par un algorithme spécialement conçu [pour déceler les infractions liées à la pédopornographie]url:http://www.lexpress.fr/actualite/monde/un-bouton-facebook-pour-lutter-contre-la-pedophilie_912151.html . Les algorithmes, les réseaux sociaux et les moteurs de recherchent connaissent bien. Ils sont l'essence de leur modèle économique, pour analyser et traiter la masse de données récoltées sur leurs utilisateurs, à des fins publicitaires. La technologie a donc été redéployée, non plus à des fins économiques, mais pour détecter les délinquants sexuels, y compris dans les conversations privées. 

Le justicier Facebook

 

Les géants de l'internet ne communiquent que très peu sur leurs pratiques en la matière. [On est loin des suppressions de contenus]url:http://lexpansion.lexpress.fr/high-tech/facebook-interdit-l-anonymat-pour-les-contenus-haineux-et-offensants_387216.html#xtor=AL-189  ou [des déréférencements]url:http://lexpansion.lexpress.fr/high-tech/pour-google-la-france-est-championne-d-europe-du-droit-a-l-oubli_1610333.html  mis en oeuvre après des signalements d'internautes ou des requêtes gouvernementales. 

L'algorithme évoqué dans l'affaire Jean-Luc Lahaye est exclusivement dédié à la lutte contre la pédopornographie. La raison est simple: [la législation américaine]urlblank:https://www.law.cornell.edu/uscode/text/18/2258A  oblige les réseaux à dénoncer ces délits. Dans le cas de l'ancienne vedette, Facebook n'a donc fait qu'appliquer la même procédure avec les autorités françaises. 

"Toute personne témoin d'un délit doit en dénoncer l'auteur auprès des autorités", explique Me Olivier Iteanu, avocat spécialisé en droit de l'informatique, des télécommunications, de la communication audiovisuelle et d'Internet. "Jusqu'à présent, [Facebook avait plutôt tendance à refuser ces prises d'initiative en France]url:http://www.lexpress.fr/actualite/societe/facebook-plus-tolerant-avec-la-decapitation-qu-avec-les-poils-pubiens_1293420.html . C'est assez contradictoire avec le discours tenu ces dernières années, notamment sur la suppression de contenus", ajoute-t-il. 

Désormais, Facebook assume totalement son nouveau rôle et le revendique. "Notre équipe travaille très dur pour faire de ce monde un endroit meilleur pour les enfants et un lieu abominable ("miserable place") pour tous ceux qui voudraient leur faire du mal -- c'est quelque chose dont nous sommes très fiers", commente le siège parisien auprès de Rue 89. 

Comment un algorithme peut-il détecter une infraction?

C'est en 2012 que Facebook a pour la première fois communiqué sur cet algorithme. Joe Sulivan, en charge à l'époque de l'équipe de sécurité du réseau social, en détaillait en partie le fonctionnement auprès de [Reuters]urlblank:http://www.reuters.com/article/2012/07/12/us-usa-internet-predators-idUSBRE86B05G20120712

Une multitude de critères sont pris en compte pour détecter les infractions. Rue 89 donne trois exemples, comme le fait de modifier régulièrement sa date de naissance, "particulièrement au-dessus et au-dessous de 18 ans". Des hommes peuvent être aussi ciblés lorsque 80% des demandes d'amis sont adressées à des femmes. Mais surtout, Facebook mise sur un outil conçu par Microsoft, PhotoDNA. Un logiciel capable de repérer des photos à caractère pédopornographique, également utilisé par Google et Twitter.  

Aux États-Unis, cet outil a permis à Google de signaler aux autorités les pratiques d'un homme de 41 ans, fiché comme délinquant sexuel, pour des échanges de photos à caractère pédopornographique sur son service Gmail. Facebook avait fait de même en 2013 avec un homme d'une trentaine d'années, qui avait donné rendez-vous à une fillette de 13 ans sur le réseau social. 

>> Aller plus loin:[Pédopornographie: Google a-t-il le droit de se faire justicier?]url:http://lexpansion.lexpress.fr/high-tech/pedopornographie-google-a-t-il-le-droit-de-se-faire-justicier_1564388.html  

Des interrogations

[Dans son communiqué]urlblank:http://jeanluclahaye.fr/communique_de_presse.html , Jean-Luc Lahaye emmène désormais le débat sur un autre terrain: la violation par Facebook du secret des correspondances, défini dans le code de la sécurité intérieure. Seule une autorité publique peut en théorie attenter à son plus strict respect. Dans le cas de Facebook, l'algorithme ne fait pas tout le travail. Les équipes en charge de la sécurité, alertés par l'algortithme, prennent le relai pour apprécier eux-mêmes la teneur des messages, avant de se tourner éventuellement vers les autorités. Une violation pure et simple du droit français? Sur ce point, Me Iteanu nuance quelque peu: "le juge pourrait aussi apprécier les faits au regard des enjeux, de la gravité des actes commis."  

Pour l'avocat, c'est surtout la portée prédictive des outils développés par le réseau social qui pose problème. "Il faut se rappeler que les réseaux sociaux misent sur ce qu'on appelle le "marketing prédictif". En l'appliquant au droit, cela pourrait conduire à des dérives. Il faut à tout prix veiller à ne pas traiter de la même manière la constitution d'une infraction avec un simple comportement à risque." 

Au-delà du cas Jean-Luc Lahaye, le réseau social n'a donc pas intérêt à commettre un seul impair, prévient Me Iteanu. "En cas d'erreur, un utilisateur pourrait très bien attaquer Facebook pour dénonciation calomnieuse". 

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