L'union du Waalo et du Trarza : Entre alliance dynastique et menace coloniale (1833-1886)

Une photo de l’émir du Trarza Ely wuld Muhammed El Habib wuld Amar wuld Moxtaar sur sa monture, publiée par le photographe Bonnevide vers 1884. Il était le fils de la Lingeer du Waalo Njëmbët Mbóoj, sœur germaine de la Lingeer Ndaté Yàlla, filles de Faatim Yaamar Xuuri Yaay, tombé à Ndeer lors du célébrissime mardi.

Le mariage entre la Lingeer du Waalo et l’émir du Trarza, scellé le 18 juin 1833, qui rétablissait la paix entre le Trarza et le Waalo, fut perçu comme une menace par l’administration coloniale, laquelle redoutait une possible union entre les deux royaumes et la conséquente perte des privilèges économiques acquis.

Le gouverneur Thomas Renault de Saint-Germain ne tarda pas à intervenir : il destitua le Braak Tejeeg Fara Penda Aram Sàll et favorisa la nomination de son rival, le Joos Xërfi Xaari Daaro.

Son successeur à la gouvernance de Saint-Louis, Eustache-Louis-Jean Quernel, lança une guerre contre les Tejeeg du Waalo et l’émir du Trarza, conflit qui causa d’énormes dégâts dans les terres du Waalo, mais se solda finalement par un échec, ne réussissant pas à toucher la force militaire du Braak et de l’émir.

Le gouverneur suivant, Pujol, en désaccord avec la politique belliqueuse de ses prédécesseurs, choisit la voie diplomatique. Il obtint ainsi la signature de deux traités : le premier avec l’émir du Trarza, qui s’engageait à renoncer à toute prétention sur la couronne du Waalo ; le second avec Fara Penda Aram Sàll, qui promettait de ne pas attaquer les Waalo-Waalo ayant soutenu Xërfi Daaro durant la guerre.

À la mort de Fara Penda Aram Sàll, n’ayant pas de candidat Tejeeg en âge de devenir Braak, la Lingeer Njëmbët opta pour soutenir l’intronisation du Loggar Maa Mbóoj Fanta, qui fut intronisé. Cependant, le pouvoir effectif resta dans les mains de la Lingeer, et à sa mort en 1846, sa place fut prise par sa petite sœur Ndata Yàlla.

L’invasion et la conquête du Waalo de la part de Faidherbe, furent aussi déterminées par la crainte d’un renforcement de l’alliance entre le Waalo et le Trarza, redoutant l’influence de Eli Njëmbët, qui était de meen Tejeeg.

Quant à Muhammed El Habib, il fut assassiné en 1860, et son fils aîné, Sidi, issu de son premier mariage avec sa cousine Mbaraika bint Omar, devint émir du Trarza. Outre la déjà citée Eli Njëmbët, Muhammed El Habib épousa également Fatma, fille du cheikh des Wulad Daman, dont il eut sept enfants : Ahmed Saalum, Brahim Saalum, Moxtaar Saalum, Lefja, Amar Saalum, Lobat et Muhammed El Habib.

Si Eli Njëmbët soutint la nomination de son frère Sidi, les fils de Fatma réclamèrent à leur tour le pouvoir, soutenus par les Wulad Daman : ils allèrent jusqu’à orchestrer la mort de Sidi Mbaraika en 1871, parvenant ainsi à imposer Ahmed Saalum comme nouvel émir.

Les fils de Sidi trouvèrent alors refuge au Waalo, où Eli Njëmbët réorganisa son armée avec le soutien de son clan maternel, les Tejeeg, et réussit finalement à reprendre le pouvoir, qu’il conserva jusqu’à sa mort en 1886.



Sources :
Barry B. 1972 Le Royaume du Waalo, François Maspero : Paris.
Marty P. 1910 L’Emirat des Trarza, Ernest Leroux : Paris.