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La droite est menacée par une vague FN aux législatives

Rédigé par leral.net le Mardi 24 Avril 2012 à 12:17 | | 0 commentaire(s)|

Combien de circonscriptions seront concernées par des triangulaires, dimanche 17 juin, lors du second tour des élections législatives ? Le poids du FN lors du premier tour de la présidentielle, dans de nombreux départements français, laisse augurer un scrutin difficile pour de nombreux députés UMP.


La droite est menacée par une vague FN aux législatives
Le remodelage des circonscriptions auquel il a été procédé en 2009 a chamboulé la carte électorale. Pas moins de 285 d'entre elles, sur 577, ont été concernées par le redécoupage. Le premier tour de l'élection présidentielle, dimanche 22 avril, est le premier scrutin national dont le résultat peut être reporté dans le cadre de ces nouvelles circonscriptions.

Il convient évidemment de prendre ces indications avec précaution. Le résultat du premier tour de l'élection présidentielle ne donne pas celui des législatives. Le dénouement du second tour donnera une dynamique au camp du vainqueur. L'issue de la confrontation dans chacune des circonscriptions dépend aussi de la personnalité et de l'implantation des candidats en présence.



Les enseignements qui peuvent être tirés de ce scrutin présidentiel sont toutefois précieux. A commencer par le poids acquis par le Front national. Non seulement l'extrême droite conforte son enracinement à l'est d'une ligne de partage qui va du Pas-de-Calais et de la Picardie au Languedoc-Roussillon, mais il progresse également dans des terres de l'ouest qui, jusqu'à présent, lui étaient plus hostiles.

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Avec plus de 6,4 millions de voix et 17,90 % des suffrages qui se sont portés sur Marine Le Pen, l'ancrage du FN a gagné en homogénéité. Il franchit le seuil de 20 % des suffrages exprimés dans 43 départements contre 25 en 2002, quand Jean-Marie Le Pen s'était qualifié pour le second tour.

Le scrutin du 22 avril fait ressortir nettement la coupure entre le vote des villes, d'une part, et celui des zones périurbaines et des campagnes, d'autre part. Si, dans les grandes villes, le score du FN plafonne, voire est en recul, il enregistre en revanche une spectaculaire percée dans les zones rurales, où il n'est pas rare que la candidate du FN dépasse les 30 % ou, même, les 40 %.

Voir aussi la carte interactive : Les rapports de force entre les candidats au premier tour

Cette double caractéristique - géographique et sociologique - a pour conséquence que Marine Le Pen recueille les voix de plus de 12,5 % des électeurs inscrits dans 353 circonscriptions, selon le décompte effectué par Le Monde. Un niveau jamais atteint, qui permet de mesurer le rôle que peut jouer le FN aux législatives et la menace qu'il fait peser sur l'UMP.

Le seuil de 12,5 % des inscrits est celui qu'il faut franchir aux législatives pour se maintenir au second tour. Ce n'est pas parce que Marine Le Pen dépasse cette barre dans 353 circonscriptions au premier tour de la présidentielle que le FN en fera autant aux législatives. Tout d'abord parce que ses candidats ne retrouveront pas automatiquement le niveau atteint par leur championne. Ensuite parce que l'abstention aux législatives sera probablement plus forte. Ce qui rend plus important encore le score nécessaire pour franchir le seuil de 12,5 % des inscrits est élevé.

Toutefois, le résultat obtenu par Marine Le Pen ouvre à son parti la perspective de dépasser ses précédents résultats aux élections législatives et d'avoir une présence au second tour supérieure à tous les scrutins antérieurs.

"ACCIDENT DE PARCOURS" DE 2007

En 1993, le FN, avec 12,4 % des voix, avait pu se maintenir dans 101 circonscriptions. En 1997, après la dissolution voulue par Jacques Chirac, il recueillait 15 % des suffrages et pouvait se maintenir dans 133 circonscriptions. Aux élections législatives de 2002, marquées par un contexte particulier après la qualification de Jean-Marie Le Pen au second tour de l'élection présidentielle, le FN, concurrencé par le MNR de Bruno Mégret, obtenait 11,11 % des suffrages, et ne pouvait se maintenir que dans 37 circonscriptions.

Le scrutin de 2007, après l'élection à la présidentielle de Nicolas Sarkozy, était un "accident de parcours" pour le FN. Il ne recueillait que 4,3 % des voix aux législatives et Marine Le Pen était la seule rescapée au second tour.

DEUXIÈME FORCE POLITIQUE

La reconduction de ce cas de figure apparaît hautement improbable. Les scores obtenus au premier tour de l'élection présidentielle par Marine Le Pen semblent mettre le FN à l'abri d'une telle déconvenue. La présidente du parti d'extrême droite dépasse 25 % des suffrages exprimés dans 59 circonscriptions et 30 % dans trois autres : la 3e du Vaucluse et les 11e - celle de Marine Le Pen - et 12e du Pas-de-Calais.

Sur les 353 circonscriptions où Marine Le Pen dépasse 12,5 % des inscrits, elle arrive en tête dans 23 d'entre elles, et en deuxième position dans 93 autres. Dans certains départements, le Front national devient pratiquement la deuxième force politique. Dans l'Aisne, sa candidate arrive en première position dans deux circonscriptions, et en deuxième position dans deux autres, sur les cinq que compte le département.

GARD, VAR ET MOSELLE

Dans les Alpes-Maritimes, elle est en deuxième position, derrière Nicolas Sarkozy, dans huit circonscriptions sur neuf. Dans les Bouches-du-Rhône (16 circonscriptions), elle arrive en tête dans trois circonscriptions et en deuxième position dans sept autres. Elle est en deuxième position dans trois des quatre circonscriptions corses. Le Gard la place en tête dans deux de ses six circonscriptions et en deuxième position dans les quatre autres. Elle arrive en deuxième position, derrière l'UMP dans toutes les huit circonscriptions du Var.

En Moselle, elle est en tête dans un tiers des neuf circonscriptions. Sur les 21 circonscriptions du Nord, elle arrive en deuxième position dans huit circonscriptions et en tête dans une autre. Tandis que, dans le département voisin du Pas-de-Calais (12 circonscriptions), elle est en deuxième position dans sept circonscriptions et en tête dans celle d'Hénin-Beaumont, où elle compte se présenter. En Alsace, elle arrive en deuxième position dans 10 des 15 circonscriptions du Bas-Rhin et du Haut-Rhin.

CONSOLIDATION

Le premier tour de l'élection présidentielle démontre la consolidation des positions du FN. Il est très probable qu'il dépassera le record de 133 circonscriptions où il avait pu se maintenir au second tour des élections législatives de 1997. A l'UMP, pour l'heure, on se refuse à croire à cette perspective.

Alain Marleix, expert de la carte électorale et ancien secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'intérieur, affirme ne pas croire à un nombre élevé de triangulaires. Il compte sur une participation aux législatives inférieure de 15 points à celle de la présidentielle et relativise le risque pour la droite. Celui-ci est cependant réel : en 1997, sur les 76 circonscriptions où les candidats du FN s'étaient maintenus dans le cadre de triangulaires, la gauche en avait remporté 47.

Le scrutin de dimanche recèle un autre enseignement. Pour la gauche, le total de voix recueillies passe de 13,4 millions en 2007 à 15,7 millions, soit 43,7 % des votes, contre 36,5 % cinq ans plus tôt. Dans le même temps, la droite - hors FN - passe de 12,7 millions (34,6 %) à 10,4 millions (29 %) des suffrages.

Toutefois, l'addition des voix de droite et d'extrême droite (Nicolas Sarkozy, Nicolas Dupont-Aignan, Marine Le Pen), passe de 16,5 millions en 2007 à 16,8 millions. Ainsi, le total des voix de droite et d'extrême droite est supérieur à celui de la gauche et de l'extrême gauche dans 349 des 577 circonscriptions.

Patrick Roger
LeMonde

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Voir la carte : Législatives : le FN pourrait provoquer plusieurs dizaines de triangulaires