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MADAGASCAR : DE QUOI RAVATOMANGA EST-IL LE NOM ?

Rédigé par leral.net le Vendredi 7 Novembre 2025 à 01:00 | | 0 commentaire(s)|

EXCLUSIF SENEPLUS - Le milliardaire malgache symbolise la permanence d'un régime politico-affairiste dont la chute n'aura été qu'une parenthèse dans la captation des richesses de la Grande île

En 2007, pour invoquer les inspirateurs du nouveau président français, Nicolas Sarkozy, le dernier grand philosophe français, Alain Badiou, inventait ce titre promis[1] à un grand succès,  De quoi Sarkozy est-il le nom ? Ravatomanga, bien moins connu, en particulier en Afrique continentale, est le personnage éponyme qui désigne le système oligarchique malgache. Cet ensemble prédateur s’épanouit à partir de 2009 à Madagascar. Et les deux noms, Sarkozy et Ravatomanga, sont d’autant moins étrangers que le gouvernement de Sarkozy et son administration vont soutenir le coup d’État de Rajoelina, le suppôt étatique d’une hyper élite d’accaparement fusionnant ses composantes contradictoires dans un programme d’exception intégral et permanent.

On a voulu longtemps nous faire croire qu’il y avait un particularisme malgache qui en ferait une société un peu archaïque où même les dérives les plus odieuses se clôturaient dans le culte de la réconciliation entretenu par les élites[2], y compris religieuses. Qu’il y aurait un splendide isolement insulaire qui déconnecterait les pratiques extractivistes malgaches des réseaux africains de fuite des capitaux internationalisés maintenant mieux connus.  Avec Mamy Ravatomanga, la figure sombre du régime Rajoelina qui vient de sombrer, se révèle l’enchâssement d’une partie du capitalisme malgache dans le système globalisé d’extraction criminelle des ressources et de financiarisation frauduleuse de leur produit.

De la vice-présidence malgache…

En octobre 2025 débute la décomposition rapide d’un régime politico-affairiste personnalisé par un Janus dont une des faces était peu visible. Pour la partie visible de la monnaie on avait, de nationalité française, l’ex-président Rajoelina exfiltré par un avion militaire français, sur ordre du président Macron. Lors d’une première étape, le DJ Andry Rajoelina prend le pouvoir par un coup d’État, en 2009. Il y revient légalement et s’y maintient, jusqu’en octobre 2025, par de successifs hold-up électoraux avec la complicité de la communauté internationale et de ses représentants à Madagascar.

La résistible ascension du DJ malgache a été l’œuvre d’une camarilla d’hommes d’affaires. Ils en ont profité pour s’installer et se consolider à la tête de réseaux d’extraction mafieuse des richesses d’une île dont la population s’enfoncait dans la pauvreté. Mamy n’est jamais nommé directement mais plutôt par des noms de code[3]. Cependant chacun sait que le maitre d’Andry Rajoelina est le milliardaire Ravatomanga qui pour financer son coup d’État a fédéré en 2009 les patrons mécontents de la tentative d’instauration d’un marché concurrentiel par Marc Ravalomanana. Le vice-président, un des titres fantomatiques de Mamy Ravatomanga aurait dû être, au mois d’octobre 2025, le bouclier du fantoche Andry Rajoelina, mais il cède assez vite devant la colère urbaine. La violence de la répression le met au premier rang car les manifestants et les pillards sont tués, soit par les hommes de Richard Ravalomanana, le général-président du sénat, l’homme fort de Rajoelina, soit par les miliciens de Mamy Ravatomanga. Ce dernier dans son académie de sécurité (Malagasy Security Academy) abrite 25 hommes de Wagner habitués des boites de nuit et de grandes beuveries. En 2025, la création de la milice de Ravatomanga, dirigée par un officier français de gendarmerie, Bruno Lemasson[4], vient compléter la milice de Rajoelina, animée depuis 2020, par un français, Bruno Bertagna, administrateur général de la société de sécurité VIGIE High Tech Security.

A côté de ce rôle de sécurocrate en costume civil, Mamy Ravatomanga conduisait la véritable diplomatie de l’État malgache, pour sa part officiellement en constante hésitation sur ses alignements (Ukraine ou Russie par exemple). Un an exactement avant l’effondrement de la coterie Rajoelina, une importante délégation émiratie était présente à la première édition du Forum du Programme d’échanges d’Expériences Gouvernementales (GEEP), tenue le 25 octobre 2024 à Antananarivo. Un mois avant, en septembre 2024, une première ligne aérienne opérée par Emirates entre Dubaï et Antananarivo s’ouvrait. Véritable joyau du soft power des Émirats à travers le monde, la prestigieuse compagnie émiratie avait initialement tablé sur quatre vols par semaine. Avant d’annoncer, face au succès de l’initiative, un cinquième vol hebdomadaire entre les deux pays, rendu nécessaire par les taux de remplissage des avions reliant la capitale économique des EAU à la Grande Île. La compagnie aérienne du Golfe rendait visible l’attraction de Dubai pour tous les membres de l’hyper élite de Tananarive qui agrège de nombreux non-malgaches. A Dubai, véritable Hub des trafics, en particulier d’or africain, les exportateurs et les intermédiaires des mines malgaches ont trouvé un hyperespace global de marché sans questions sur l’origine des minerais et où les transactions sont immédiatement masquées dans des comptes secrets.

A l’occasion d’un déplacement aux EAU, en marge du World Governments Summit 2024, le président malgache, Andry Rajoelina, a en février 2024 transmis une lettre au ministre émirati des Affaires étrangères formalisant la demande d’ouverture d’une ambassade de Madagascar à Abu Dhabi. En retour, le chef d’État malgache s’était officiellement vu remettre, à la fin du mois d’août 2024, les lettres de créances du tout premier ambassadeur des EAU à Madagascar, le docteur Salim Ibrahim Bin Ahmed Mohamed Alnaqbi. Une bonne partie des enfants de l’élite étrangère et nationale de Madagascar faisait déjà ses études à Dubai et l’or comme les pierres précieuses de l’île prennent alors directement le vol Emirates vers Dubai…

…à la fuite précipitée…

Pris de cours par l’accélération de la révolte malgache, Ravatomanga prend un de ses propre jet pour partir à Maurice, emmenant son homme à tout faire[5], l’ex-Premier ministre Christian Ntsay qui aura tenu le gouvernement de Rajoelina durant 8 ans. Les passagers de ce vol du rapace partent dans des conditions rocambolesques qui sont ci-après racontées dans la presse mauricienne. « Ivato (l’aéroport de la capitale malgache), fin d’après-midi. Plus rien ne fonctionne. L’aéroport est fermé. Juste en stand-by. L’avion, les pilotes de SODIAT Aviation sont prêts. Les passagers arrivent, la peur aux trousses. Ne voulant pas risquer d’être bloqués et qu’on leur fasse du mal, ils n’osent rien entreprendre à partir de leur pays et signalent leur départ aux autorités mauriciennes une fois sur place seulement. Chargent leurs bagages. Ces familles craignent les militaires. Les voyant arriver, elles précipitent leur départ et décollent. «Une troupe de militaires courait après l’avion pendant que nous roulions sur la piste», confie un des passagers. La demande d’autorisation est envoyée à l’aviation civile mauricienne trois minutes avant le décollage. 21 h 57 de Maurice pour être plus précis. «Il n’y en aura qu’une», le reste ce seront des conversations en vol. L’avion devait décoller d’Ivato à 22 heures (de Maurice) et atterrir à 23 h30. «Il n’y a pas eu de demande médicale et le plan de vol a été Plaisance dès le départ, pas La Réunion.» SODIAT Aviation a l’habitude des vols privés. «Ce n’est pas 48 heures à l’avance mais 24 heures pour ceux qui ont un visa. Mais nous avons demandé de l’aide car nous étions dans un cas d’extrême urgence.» Ils craignent de se faire descendre dans les airs aussi s’ils allument le transpondeur. Au-dessus de l’océan Indien. Samedi soir. Échanges radio entre la tour de contrôle à Maurice et le cockpit. L’aviation mauricienne dit qu’il n’y a pas de demande et pas de plan de vol. Puis, les pilotes demandent de vérifier une deuxième fois, auprès de Jet Prime. Là, la demande est confirmée mais pas l’autorisation. La Réunion est informée car elle se trouve sur la route. C’est un aéroport de dégagement en cas de problème. L’avion est mis en circuit d’attente à ce niveau, en attendant d’avoir l’autorisation. La tour de contrôle de Maurice demande de combien de carburant l’avion dispose : «de trois heures. Il n’a jamais été question d’urgence. 45 minutes après, l’autorisation est accordée.[6]»

En îles de connaissances !

Mamy Ravatomanga, très investi dans l’aérien (voir l’affaire des cinq Boeings exportés frauduleusement vers l’Iran[7]), fréquente, dès 2009, les places financières off-shore de Dubai et de Maurice. Il va y transférer à cette époque, avec un autre confident de Rajoelina, Patrick Leloup, le fruits des détournements et des rentes de Rajoelina, le chef de l’État installé par la force. De même l’exil de Rajoelina en 2025 à Dubai a été préparé par Ravatomanga qui, pour sa part, comme de nombreux millionnaires en dollars US de Madagascar, dispose de comptes en banques, de sociétés écrans, d’investissements et de résidences dans les Émirats du Golfe.

Sur place, à Maurice, l’officiel et le clandestin s’enchevêtrent au service des intérêts de Mamy Ravatomanga. Camille Vital, l’ambassadeur de Madagascar est un comparse des farces électorales de Rajoelina et même un de ses anciens Premiers ministres. Il dispose de nombreux avoirs à Madagascar qu’il gère de sa légation mauricienne. C’est aussi un associé de Ravatomanga et aussi un vecteur d’influence des Russes dans l’océan indien. L’autre agent visible du réseau de Ravatomanga est Edgard Razafindravahy, secrétaire général de la Commission de l’Océan Indien (COI) dont le siège est à Maurice. Edgard Razafindravahy est très riche, non du fait de ses entreprises (il est l’imprimeur du président Rajoelina et de l’administration), mais comme ex-ministre du commerce. C’est lui qui donne (vend) les licences d’importation, le riz par exemple, mais aussi la farine et octroie les quota d’exportations des filières à devises : litchi, vanille, poivre, clous de girofle, etc. Il doit peaufiner le dispositif qui consiste à encaisser à Maurice en dollars US le produit des exportations malgaches. Cela évite les droits et accises, le fisc et la curiosité du personnel dans les banques malgaches. Quand les choses se gâtent à Tana, Edgard Razafindravahy s’envole vers une des multiples conférences à laquelle il participe comme patron de la COI et profite des joies romaines en attendant que les remous de l’arrivée de Mamy, son comparse, ne soient apaisés…

Piqures de rappel pour la place financière mauricienne

L’arrivée rocambolesque[8] de Mamy Ravatomanga à Maurice oblige très vite les autorités mauriciennes à dévoiler le pot aux roses. Selon la Financial Crimes Commission (FCC), l’homme d’affaires de 56 ans, résident de Belle Vue Harel (quartier chic de Maurice), a été placé en état d’arrestation le vendredi 24 octobre dans le cadre d’une enquête pour blanchiment d’argent présumé. Les enquêteurs se sont rendus dans la clinique où il est hospitalisé pour lui notifier sa mise en état d’arrestation. Son hospitalisation se poursuit désormais sous étroite surveillance de la FCC. La FCC fait la part des choses entre les entités mauriciennes de Ravatomanga et la possession de fonds soupçonnés de représenter le produit d’activités criminelles. Une ordonnance de gel des avoirs criminels (Criminal Attachment Order) a été cependant émise par la Cour suprême pour l’ensemble de ses comptes et de ceux de ses entreprises.

Toujours selon la FCC, l’enquête a permis d’identifier des protagonistes locaux impliqués dans ce vaste réseau de blanchiment d’argent à grande échelle. Deux autres arrestations sont déjà intervenues : celle de David Jean Christian Thomas, 38 ans, employé du groupe SODIAT (le groupe de Mamy Ravatomanga), inculpé de conspiration pour avoir tenté de dissimuler des avoirs d’environ 20 milliards USD via le système informatique d’une banque, et celle de Nasser Bheeky, interpellé dans la soirée du 24 octobre. Originaire de Belle-Vue-Calodyne (Maurice), Thomas se retrouve face à des accusations graves en vertu de l'article 48 de la Financial Crimes Commission Act de 2023.

Cependant le volet dit licite des activités de Mamy Ravatomanga suscite de nombreuses questions et dévoile les ramifications africaines du magnat malgache. Mamy Ravatomanga a structuré une partie de ses opérations malgaches et internationales via des sociétés enregistrées officiellement à Maurice. Auto-Diffusion été enregistrée le 8 avril 2009 à Maurice. De même, First Class Immobilier Ltd, une autre société à responsabilité limitée par actions, l'a été le 9 juin 2010. Ces entités, dont Mamy Ravatomanga est le bénéficiaire ultime, opèrent respectivement au 4ème étage de la tour Hennessy, rue Pope Hennessy à Port-Louis, et au lot 15, rue Calcutta à Port-Louis.

Le travail de la FCC va être contrarié paradoxalement par l’intervention de la Mauritius Revenue Authority (MRA) concernant des sommes colossales localisées sur des comptes bancaires à Maurice. La MRA devra cependant que la Direction Générale des Impôts (DGI) de Madagascar établisse sérieusement les preuves de fraudes fiscales de SODIAT. Car il semble que SODIAT paye ses impôts à Maurice. Selon la Convention de non-double imposition signée entre les deux pays, la DGI malgache pourrait immédiatement demander à la MRA les informations bancaires nécessaires pour faire avancer l’enquête. Cela inclut les relevés bancaires, les identités des bénéficiaires effectifs ainsi que les historiques des transactions SWIFT des comptes concernés. Cette procédure est simple, rapide et parfaitement légale. Elle permettrait d’obtenir des preuves claires et vérifiables qui pourraient ensuite être utilisées pour renforcer l’enquête judiciaire. Cependant, il faut qu’une demande officielle d’échange d’informations soit formulée par les autorités malgaches. La DGI malgache doit agir en utilisant les mécanismes légaux disponibles pour faire avancer l’enquête. En l’absence de cette demande, l’enquête menée à Maurice ne peut pas se nourrir des éléments cruciaux nécessaires pour soutenir les accusations ou, au contraire, pour prouver que les fonds détenus par Ravatomanga sont légaux.

Les interactions africaines

Depuis 1995, les entreprises internationales de Mamy Ravatomanga «maintiennent des relations bancaires avec des institutions mauriciennes réputées : la State Bank of Mauritius Ltd, la Mauritius Commercial Bank, AfrAsia Bank Ltd, Wynyard Private Bank Ltd et Bank One Ltd ». Ces fonds, détenus à Maurice, proviendraient «exclusivement d'activités légitimes», souligne l'affidavit : «Il est établi que les fonds de l'Applicant[9] No. 1 et ceux de ses entreprises, à Maurice, sont pleinement dérivés des activités légitimes.» L’enquête de la FCC si elle va à terme confirmera ou pas cette pétition de principe.

En attendant, la démarche, entamée par la FCC, révèle la toile financière de Mamy Ravatomanga tissée avec son allié ivoirien. En effet, en 2024, le magnat ivoirien Bernard Koné Dossongui s’est appuyé sur l’influence de l’homme d’affaires malgache, Mamy Ravatomanga, pour étendre son empire à Madagascar. La filiale locale d’AFG Bank, appartenant au conglomérat Atlantic Financial Group (AFG), fondé en 2006, par Bernard Koné Dossongui, a officiellement déposé ses statuts à Antananarivo en février. Parmi les administrateurs de cette filiale figurent plusieurs piliers de la holding ivoirienne et proches du magnat, dont Léon Konan Koffi, Anatole Georges Wilson, Kouakou Anzoua Abissa et Gervais Atta. Un nom retient particulièrement l’attention : celui d’Andry Rabetokotany, gendre de Mamy Ravatomanga, figure influente auprès d’Andry Rajoelina.

Quant à AFG Capital Ltd, anciennement AFG Investment (Mauritius), filiale de la holding panafricaine AFG, se retrouve de nouveau au cœur de l’actualité mauricienne en raison de sa proximité supposée avec le milliardaire malgache, Maminiaina (Mamy) Ravatomanga. On se souvient de Bernard Koné Dossongui, qui avec son groupe financier AFG Holding avait tenté une percée à Maurice en négociant l’acquisition des 74,48 % du capital d’AfrAsia Bank détenus par IBL et la Banque Nationale du Canada. L’opération n’avait cependant pas abouti : selon des sources proches du dossier, un exercice de due diligence mené par la banque centrale de Maurice aurait soulevé des réserves sur les sources de financement envisagées par le groupe ivoirien pour financer cette opération.

Cependant l’île a trop besoin des apports en devises de l’extérieur pour se compromettre avec de l’argent qui contaminerait gravement la réputation de ses banques. Surtout que d’autres Africains et leurs fonds ont compromis la place financière de Maurice. L’opération mains propres, baptisée «Scorpion», à l’Ile Maurice, avait cité le beau-frère de Brice Laccruche[10] Alihanga, Raphaël Nze Minko, et son ancien collaborateur Gervais Martial Koulayo Houlpaye. Tous deux sous le coup d’un mandat d’arrêt international émis par le Gabon en 2020. L’enquête de la Commission indépendante contre la corruption (ICAC) de l’île Maurice débutée en 2022, avait permis d’identifier sept comptes offshores des deux indélicats présentés comme des «hommes d’affaires». La première saisine de l’ICAC a concerné les comptes à AfrAsia Bank et a gelé plus de six milliards de francs CFA qui serait le butin de délit de corruption, détournement et de blanchiment d’argent.

Mamy Ravatomanga n’est de loin pas le seul malgache impliqué dans la fuite des capitaux vers Maurice et il a su comme de nombreux autres Malgaches recouvrir d’un voile légal les prolongements de son empire. Il rejoint des experts kleptocrates du continent africain.

L’éphémère effet litchi ?

Après l’arrestation, vendredi 24 octobre, de Mamy Ravatomanga à l’île Maurice, le tout-puissant patron de l’ère Rajoelina, les cartes sont rebattues à Madagascar dans la filière litchi, l’une des filières d’exportation les plus rémunératrices du pays. SODIAT, l’entreprise de l’homme d’affaires malgache, qui raflait jusqu’alors la plus grosse part des quotas, a été exclue du groupement des exportateurs du fruit saisonnier. À quelques semaines du début de la campagne, les acteurs se réorganisent. Après des années de peur devant les sicaires de Mamy Ravatomanga qui mobilisait aussi les gendarmes pour menacer les exportateurs de litchi, son départ libère la parole et rend compte de sa mainmise sur les filières légales (vanille) comme sur les trafics illicites (bois de rose en particulier). Ravatomanga s’est approprié de nombreux immeubles, terrains de golf, plages et îles dans son pays. En France il possède aussi de nombreux avoirs. Le parquet financier français s’était un temps intéressé à lui, soupçonnant du « blanchiment en bande organisée » et des « fraudes fiscales » s’effectuant à travers une kyrielle de sociétés immobilières implantées au cœur de Levallois-Perret, fief à l’époque des époux Balkany. Depuis, faute d’éléments de preuve suffisants, une saisie des biens immobiliers en France a été annulée et l’enquête préliminaire du parquet a été annulée. Tout ça pour ça ? Selon les actes notariés matérialisant la cession en faveur de leurs trois enfants d’une partie des parts détenues dans ces sociétés par Mamy Ravatomanga et son épouse Ramy Rakotoniary, cet ensemble n’aurait quasiment aucune valeur (4 euros), en raison notamment d’un endettement important auprès d’entreprises mauriciennes.

La puissance des réseaux de Mamy Ravatomanga subsiste et se dessine à présent. Son armée d’avocats français recherche un compromis avec la FCC mauricienne. La fin des poursuites précédentes en France est invoquée par ses conseils juridiques à Maurice. La Côte d’Ivoire est prête à faire jouer une protection diplomatique pour son consul à Tananarive. Le président français qui est à Maurice dans 15 jours ne pourra nier qu’il connait Mamy Ravatomanga et qu’ils se parlent au téléphone. Le milliardaire malgache n'est pas le plus riche des 10 fortunes que Forbes recense dans l’île malgache. Il n’est pas le bouc émissaire d’un système de concentration du pouvoir et du capital mais la figure éponyme d’une époque qui n’est sans doute pas révolue. Litchi, vanille, bois de rose et or resteront, même sans Mamy Ravatomanga, le butin de quelques privilégiés qui achètent les monopoles avec les rentes qu’ils ont obtenues avec le recours aux politiciens sans morale et aux élites martiales cupides. La Refondation qui s’annonce à Madagascar doit répondre à des questions fondamentales sur la gouvernance malgache. Mais il sera difficile d’éviter des interrogations sur les mécanismes gémellaires de légalisation et de fraude bancaire entre Maurice et Madagascar que le cas de Ravatomanga a de nouveau mis en lumière.

[1] Alain Badiou, De quoi Sarkozy est-il le nom ? (éd. Lignes, 2007)

[2] Peter Kneitz (dir.), Fihavanana-La vision d’une société paisible à Madagascar-Perspectives anthropologiques, historiques et socio-économiques, Avant-propos par Françoise Raison-Jourde, 2e édition corrigée, Halle: Universitätsverlag Halle-Wittenberg, 2014

[3] Son nom continue à inspirer crainte et grande prudence : dans les conversations ou sur les réseaux sociaux, Ravatomanga Maminiaina, dit Mamy, n’était évoqué que par allusion, notamment à travers des surnoms ou des noms de code. Y compris un temps « Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom », par référence au personnage le plus maléfique de la saga Harry Potter. Au fur et à mesure que les rumeurs se sont étendues, un public plus large est passé à « Pierre Bleue » ou « PB ». Le communiqué d’une page publié mercredi soir par la Gen Z fait également une allusion non voilée au personnage, mais sans jamais prononcer son nom.

[4] https://www.africaintelligence.com/southern-africa-and-islands/2025/06/24/tycoon-mamy-ravatomanga-makes-a-move-into-private-security,110468267-art

[5] SODIAT prit en effet une part prépondérante dans le transport de carburant sur l’axe Toamasina Antananarivo, à l’époque où le Directeur général de la compagnie nationale pétrolière Solima était un certain Christian Ntsay, ex-Premier ministre. Mamy Ravatomanga fut également Président du conseil d’administration de la société nationale d’eau et d’électricité, la Jirama, ce qui a suscité des accusations de contrats abusifs et de détournements de fonds.

[6] https://lexpress.mu/s/les-militaires-couraient-apres-notre-avion-550487

[7]Il s’avère être lié au scandale des cinq gros-porteurs Boeing 777 obtenus en juillet par la compagnie aérienne iranienne Mahan Air, qui fait l’objet de sanctions américaines, grâce à des certificats d’immatriculation provisoires décernés à Madagascar.

[8] Mamy Ravatomanga, proche de l’ex-président Andry Rajoelina, et l’ancien Premier ministre Christian Ntsay étaient arrivés à Maurice à bord d’un jet privé immatriculé 5R-HMR, appartenant au groupe SODIAT , dans la nuit du 11 au 12 octobre 2025-un vol qui avait déjà suscité de vives réactions à Antananarivo comme à Port-Louis.

[9] Le défendeur Mamy Ravatomanga, in https://lexpress.mu/s/investissements-de-mamy-ravatomanga-les-centaines-...

[10] Ancien «tout-puissant» directeur de cabinet d’Ali Bongo, Brice Laccruche Alihanga aurait mis en place un système de prédation de fonds à la Société gabonaise de raffinage (SOGARA). Une stratégie ayant permis de siphonner 61 milliards de francs CFA au sein de l’unique raffinerie du pays, entre 2018 et 2019.  …

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