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Mal gouvernance, précarité, tension sociale: les rappeurs apportent de la voix...

Il est de notoriété que les rappeurs ont participé à l’alternance politique au Sénégal. Ils se sont érigés en éveilleurs de conscience. Comme l’affirme d’ailleurs Makhtar Le Kagoulard « c’est grâce aux rappeurs que la grogne sociale a été audible ». L'histoire du pays semble se répéter celle de la musique rap aussi. Retour sur le même tempo!


Rédigé par leral.net le Vendredi 13 Août 2010 à 02:53 | | 0 commentaire(s)|

Mal gouvernance, précarité, tension sociale: les rappeurs apportent de la voix...
De 1998 à 2000, année des élections présidentielles ayant conduit Abdoulaye Wade à la tête de la nation, ces jeunes fougueux et engagés se sont unis afin de dire basta au régime socialiste. Ils ont crié, insulté et osé dire tout haut ce que tout le monde pensait tout bas. Différentes compilations dont brassards rouges ou encore politiciens ont été des moyens de sensibiliser les masses. Et ces rappeurs avaient réussi. Oui de près ou de loin, ils ont participé au « putsh démocratique » du régime socialiste.

C’est un groupe de jeunes rappeurs dénommé Rap’adio qui avait donné le ton en ces temps là. En effet, c’est après la sortie de l’opus « kou wet xam sa bop » que le rap a pris un autre élan. Le glas du rap inutile a sonné. Place à des textes engagés et utiles. C’est ainsi d’ailleurs que « beaucoup de groupes de rap ont disparu avec l’avènement de Rap’adio » informe Djily Bakhdad, membre de 5kiem underground, une formation médinoise.

Après l’alternance, les rappeurs se sont calmés savourant leur victoire. Ils ont été tendres ou observateurs avec le nouveau régime en place. Et de 2000 à 2005, pas de dénonciations, pas de cris du cœur. Rien sur le nouveau régime. « C’est une période pendant laquelle nous nourrissions l’espoir de voir un changement sur tous les plans » soutient Maxi Crazy. Ceci serait donc à la base du silence des hip-hoppeurs. Certains sont même allés jusqu’à faire du blow(amour, sexe, alcool dans la musique et les clips). Et c’est peut être ce chemin emprunté qui révoltera les uns. Comme le dit Makhtar Le Kagoulard (ex membre des groupes BMG 44 et Rap’adio), « les jeunes ne doivent pas copier les américains. Ce que les chanteurs là montrent dans leurs clips est différent de la réalité vécue. Ils doivent se chercher des sujets beaucoup plus intéressant il y a tellement à dire ».



En 2006, c'est la crise ouverte entre certains même si le mouvement n'est jamais comme un fleuve tranquille.. Awadi et compagnie sont accusés de compter désormais dans leur rang des griots du parti démocratique sénégalais. L’heure est grave. La chose est sérieuse. Réagir devient urgent. Même si ces derniers sont considérés par leurs compères comme des « traîtres qui ont vendu leur âme au diable », ils ont, aussi minime soit leur nombre, décrédibiliser le mouvement, X Side X , animateur à la radio Nostalgie les compare à des « rappeurs sans considération tant sur le plan personnel que sur celui musical». Aujourd'hui Maxi Crazy pense que dans leurs rangs se comptent toujours des « bagne kaat »(des partisans du refus). « Le régime a déjà essayé de nous corrompre, il nous a menacé et même empêché la sortie d’une de nos compilations mais ceci ne nous fait guère reculer on porte ce combat et nous l’assumons ». Des propos confortés par X Side X qui affirme que « les rappeurs sont les représentants des basses classes et lutteront jusqu'à "à leur dernière souffle pour ces dernières". Ainsi, le combat continue.

Depuis deux ans, le ton monte. Les textes sont plus durs. Le langage plus sec. Oui cela rappelle bien un temps. La veille des élections de 2000. Un retour dans le passé explique les choses à en croire le talibé de baye « c’est la situation de veille des élections 2000 qui s’impose encore à nous ». Encore que celle-ci est plus grave car assimilée à « un espoir déçu, une désillusion ». Désillusion car affirme X Side X « seul 1% des promesses faites par le régime en place a été tenu ». Donc « insolence et dureté reviennent dans les textes parce que le moment l’exige » continue Maxi Crazy.

Et comme chaque rappeur représente un quartier, ils ne font que transmettre les maux de leurs voisins se faisant la bouche de ceux qui n’ont point de bouche. X Side X et Djily Bakhdad listent ses maux qui sont « mal gouvernance, coupure de courant, vie chère, insécurité entre autres ». Makhtar reste convaincu que si « les populations sont tant soit peu informées de quelques notions de civisme, de patriotisme, elles prendront conscience de la nécessité de s’organiser pour devenir des acteurs sociaux et non de simples spectateurs passifs, devant le spectacle désolant de leur destin, afin de pouvoir agir légitiment avec les pouvoirs publics. Les politiciens comprendront alors que c’est le corps social qui donne du pouvoir à la classe politique car il n’y a pas de général sans soldats ». Dans cet éveil des consciences Djily de 5kiem Underground pense que « la pluralité des médias peut beaucoup y jouer et avec le développement des Tics la masse devient de moins en moins manipulable ». Comme en 2000 les rappeurs se veulent aussi en perspective de 2012 les délivreurs du peuple.

Cependant, Gaston alias Bandit cerveau prévient « à l'époque nous avions fait un bloc pour dire stop il faut que les rappeurs s’unissent pour arriver à l’exploit de 2000 et faire partir le régime ». Une autre inquiétude affirmée par X Side X est « la dislocation des grands groupes qui ont tapé fort en ces moments là ». Même s’il ajoute que « la relève commence à comprendre l’urgence du temps et tirent de plus en plus dans la même direction que les aînés ». Mais les rappeurs se veulent fermes des actions seront intentées. Bibson annonce une compilation qui sortira bientôt et dans laquelle l’on parlera des coupures d’électricité. Et d’autres actions suivront « nous avons beaucoup de choses que nous ferons bientôt mais dont je ne peux pas encore révéler la substance mais je peux vous dire qu’en 2012 nous manifesterons ». Les gars sont dans la place!




Bigué BOB pressafrik.com

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