Leral.net - S'informer en temps réel

Nicolas Sarkozy joue son va-tout en pariant sur l'électorat FN

Rédigé par leral.net le Lundi 23 Avril 2012 à 11:05 | | 0 commentaire(s)|

On ne change pas une stratégie qui alimente le FN. Nicolas Sarkozy a décidé de poursuivre sa campagne comme il la mène depuis mi-février. A droite toute. Comme il l'avait fait en 2007, sur les conseils du politologue issu de la droite maurrassienne Patrick Buisson. Peu importe que les résultats aient été en deçà des espérances et qu'ils aient produit des effets contraires à ceux de 2007 : M. Sarkozy réalise un score mitigé tandis que le Front national s'envole. Le président sortant est arrivé deuxième derrière François Hollande, avec 27,06 % des voix, contre 31,18 % en 2007. Il n'a pas laminé Marine Le Pen : elle a presque doublé le score de son père en 2007, avec 18,03 % des voix.


Nicolas Sarkozy joue son va-tout en pariant sur l'électorat FN
Qu'importe également pour M. Sarkozy que les sondages du second tour réalisés dimanche soir le donnent largement perdant. Il veut faire croire que tout est possible, qu'une nouvelle campagne s'ouvre. "Demain, on reprend la route", a lancé Nicolas Sarkozy, qui tiendra meeting à Tours dès lundi après-midi puis à Longjumeau (Essonne), mardi, chez sa porte-parole Nathalie Kosciusko-Morizet. Confiant, il rêve de créer un précédent historique. Et de faire mentir l'histoire politique qui montre que les dés sont jetés le soir du premier tour.

Entre un François Bayrou à 9,1 % et une Marine Le Pen à 18,03 %, Nicolas Sarkozy a choisi. Dimanche, à la Mutualité, salle historique de la gauche, il a adressé un clin d'œil appuyé aux électeurs frontistes. "Il y a des inquiétudes, des souffrances, des angoisses face à ce nouveau monde en train de se dessiner. Ces angoisses, ces souffrances, je les connais, je les comprends. Elles portent sur la frontière, sur les délocalisations, sur l'immigration, la valorisation du travail et la sécurité", a lancé M.Sarkozy. Il a appelé "tous les Français qui mettent l'amour de la patrie au-dessus de toutes les considérations partisanes à [le] rejoindre". Sans faire la moindre exclusive. Le président sortant compte notamment agiter le droit de vote des immigrés aux élections locales proposé par François Hollande.

BESOIN D'AUTORITÉ ET DE PROTECTION

Seule concession à l'électorat centriste, Nicolas Sarkozy a lancé un appel à "tous ceux qui refusent la fuite en avant des dépenses publiques sans aucun contrôle". L'équipe de campagne fait peu de cas des électeurs de François Bayrou, estimant que celui-ci est redescendu à un étiage tel que ses électeurs sont principalement de droite et se reporteront sur le candidat UMP. Un conseiller du président diagnostique : "La stratégie de Buisson était la bonne : la France est très à droite et la gauche basse. Le problème, c'est que les deux candidats, Sarkozy et Hollande, vont être attirés par leurs extrêmes au lieu de se recentrer." L'équipe rapprochée de M. Sarkozy se réjouissait du score inattendu du Front national, qui rebat, selon elle, les cartes pour le second tour.

A l'Elysée, Patrick Buisson jubilait, jugeant sa stratégie confortée. Il a de nouveau mis en cause la porte-parole du candidat, Nathalie Kosciusko-Morizet, jugée trop centriste et trop bobo. "Jamais la droite n'a été aussi élevée, saluait Guillaume Peltier, conseiller national de l'UMP. Pour lui, les messages de l'entre-deux-tour doivent répondre à "un besoin d'autorité et de protection : protectionnisme européen, patriotisme économique, défense de l'autorité de l'Etat et de la République". "Toutes les thématiques de Nicolas Sarkozy sont celles des Français : l'immigration, la sécurité, le pouvoir d'achat", a renchéri Jean-François Copé. "Il faut surtout ne pas cacher les choses, assure Laurent Wauquiez, ministre de la recherche. Rien n'exaspère plus un électeur du FN qu'on ne prenne pas en compte un message qu'il a envoyé." "Les Français qui ont voté FN vont voter Sarkozy dans leur grande majorité, croit savoir Christine Boutin, ralliée à M. Sarkozy. La France est plus à droite qu'on ne le croyait."

La forte participation et le score très élevé de Marine Le Pen ont reporté les dissensions au sein de l'UMP à l'après-second-tour. Certains avaient prévu de dénoncer la droitisation excessive de la campagne si M. Sarkozy accusait un retard de trois ou quatre points sur François Hollande. Le succès de Marine Le Pen a transformé cette fronde mort-née en petites notes dissonantes. Jean-Louis Borloo, président du parti radical, a demandé "une France forte mais qui soit extrêmement juste". Le ministre de l'agriculture, Bruno Le Maire, estime que "si l'on veut convaincre les électeurs du FN, il ne faut pas leur faire des œillades mais montrer que nous sommes intransigeants sur les valeurs qu'on défend. Il faut y aller en ligne droite. Pas un coup à droite et un coup au centre".

VERS UN CHOC DES PROGRAMMES

Nicolas Sarkozy mise sur la confrontation directe avec François Hollande. Le candidat UMP a immédiatement proposé non pas deux, mais trois débats télévisés, convaincu qu'il écraserait son adversaire. Ce dernier a immédiatement refusé. Un seul duel aura lieu, mercredi 2 mai. "Le choc des personnalités peut faire la différence", espère le ministre de la défense, Gérard Longuet. "Il faut transformer une campagne de référendum anti-Sarkozy en un choix entre deux personnes. Les Français ne doivent pas juger celui des cinq ans passés, mais celui des cinq ans qui viennent", estime Benoist Apparu, le ministre du logement.

M.Sarkozy compte brandir la menace de la faillite, comme il l'a déjà fait en lançant : "Vous voulez la gauche ? Vous aurez la Grèce, vous aurez l'Espagne." François Fillon a joué le rôle habituel de Cassandre budgétaire, annonçant : "La crise des dettes n'est pas finie." L'idée est de revenir à un choc des programmes. "Projet contre projet, c'est la fin de la dérobade, de l'esquive, de l'édredon", annonce Luc Chatel, le ministre de l'éducation. "Est-ce qu'on veut sortir du nucléaire ? Le droit de vote des étrangers aux élections locales ou le vrai équilibre budgétaire : François Hollande est flou, Sarkozy est clair. Il faut entrer sur le ring."

Arnaud Leparmentier et Vanessa Schneider