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Mercredi 23 Mai 2018

Ramadan- Produits de grandes surfaces recyclés : Les « Goorgoorlou » s’offrent un « Ndogou » royal


Le mois de Ramadan oblige beaucoup de Sénégalais à vouloir s’offrir avec le moins de sous possible, un repas de roi. A la rupture du jeûne, le pratiquant souhaite mettre sur sa table une diversité d’aliments pour satisfaire sa gourmandise. Aussi , ceux-là voulant satisfaire ce besoin, s’orientent vers les petits coins du marché Sandaga ou de Petersen. Dans ces lieux de commerce, se développe une activité de vente des produits recyclés des superettes et autres grandes surfaces. Et, les « goorgoorlou », peinant à joindre les deux bouts, se ravitaillent de ces produits, dont hélas, la durée de vie n’est plus d’actualité. Décryptage…



Le Ramadan, une recommandation divine este un moment de dévotion et de dévouement au Créateur. Les Sénégalais qui se privent du plat de midi, rivalisent ici et là d’ardeur durant tout un mois de diète. Mais, le « goorgoorlu » à revenu financier faible, ne veut point être en reste quand il s'agit de récupérer des forces à la rupture du jeûne. Pour ce faire, il se donne les moyens au quotidien pour satisfaire autrement ses besoins alimentaires. A défaut de pouvoir se ravitailler en produits de qualité dans les supérettes et autres grandes surfaces, le « goorgoorlu » choisit les ruelles du marché Sandaga ou de Petersen pour garnir sa table, à l’heure du« Ndogou ».
 
Alors, il a été constaté que le pouvoir d’achat des fidèles n’est  pas identique. Chacun,  en fonction de sa fortune, choisit son marché. Au moment où les bourgeois partent dans les grandes surfaces, les « goorgoorlou », arpentent les ruelles de certains marchés de la capitale à la recherche de produits consommables à moindre prix. Et, il s’avère dans cette quête de bien garnir sa table à la rupture du jeûne à peu de frais, que le type de marché qui s’offre le plus à ces gens se trouve à Sandaga et Petersen. 
 
Au centre-ville, la vente de ces produits recyclés étale ses tentacules tout au long de l’avenue Lamine Guèye. Très visibles de leur état, les commercants s’entassent pour constituer un cordon commercial au niveau de la devanture des magasins. Arpentant l’avenue, ils proposent ces produits à la clientèle sous un soleil modéré, une atmosphère empuantie de fumée asphyxiante en provenance des pots d’achoppement des voitures. L'appât du gain en bandoulière, les exposants d'en genre particulier, ne manquent pas de harceler les passants, leur proposant " la bonne affaire du jour". 

Manger copieux et moins chers
 
L’offre de ces produits recyclés est une réalité à l’avenue Lamine Guèye. Les devantures des magasins font office de réceptacle d’un autre commerce. Certains, en position assise devant leurs étals s’affairent tranquillement à leurs activités commerciales. D’autres, plus énergiques, adoptent une posture debout, hélant les passants à tout-va. Faute de place libre, des vendeuses, coincées entre les magasins, sont obligées de se recroqueviller sur de petits espaces. Elles occupent même le trottoir où les piétons sont obligés de se  faufiler pour contourner la marchandise tel un jeu d'obstacles.
 
Le seul décor sur les lieux de vente reste des tabourets sur lesquels trônent de petits plats, contenant différentes denrées alimentaires. Ici, la prédominance des produits se trouve être du saucissons, du jambon, du merguez, du fromage gruyère. Les articles s'offrent à tous, à des prix défiant toute concurrence.  De même le lait en poudre, les pots de café, les sachets de poudre de jus, entre autres, se cèdent à moindre coût.

Et dans ce commerce, destiné aux couches à bas revenu, le marchandage des produits recyclés est écarté.
 
Les produits se donnent à la fois en gros et détail dans des sachets. « Ici, nous avons tous ce qu’il faut pour concocter un « Ndogou » copieux. Et, le plus important, c’est que nos produits sont abordables pour toutes les couches. Ils coûtent moins cher qu’ailleurs », constate Fama, l’air taquin. La cinquantaine révolue, foulard bien noué à la tête, elle est  en train d’étaler ses produits à la hâte.
 
Apparemment sereine, Fama, ne manque néanmoins pas de constater la rareté des clients. Elle cache mal son inquiétude face à la rareté des clients en ce début du mois béni. « Le mois de Ramadan était autrefois, celle des grands achats. Mais aujourd’hui, nous n’avons pas encore vu les acheteurs venir en grand nombre», constate-t-elle. N’empêche que les vendeurs des produits recyclés gardent espoir de voir en milieu de Ramadan, l’affluence de leurs habituels clients.
 
« Ndogou » bourgeois

Les commercants des produits recyclés restent d’avis que tous ceux qui veulent un bon « Ndogou », à moindre coût et s’aligner au rang des nantis ou des bourgeois, devraient s’adresser à eux. « Nos clients n’envieront pas ceux qui fréquentent les supérettes et autres grandes surfaces », se glorifie cette commerçante, toute souriante, préférant garder l’anonymat.
 
A côté d’elle,  Aby, habillée en jean et « top noir », écouteurs scotchés à l’oreille, offre une variété de produits. Cette dernière, bien à l’aise dans son accoutrement, propose des tranches de fromage et de saucisson, du lait en poudre et quelques pots de lait. 
 
 D’après elle, ces produits ne sont pas coûteux pour une bonne rupture du jeûne en famille. «Je propose divers aliments qui pourront faire l’affaire. En plus, ils ne sont pas chers », promet-elle à la clientèle. Coura, venue se ravitailler, se réjouit des services proposés par les vendeuses de Petersen. « Je suis une fidèle cliente. Et, en ce moment de ramadan, je vais augmenter mes achats sans pour autant trop dépenser. Je suis sûre d’avoir un « Ndogou » digne d’un resto 5 étoiles avec les produits que je me paye ici », espère-t-elle. 
 
 Très modeste d’apparence, du haut sur son 1m 75, Coura se ravitaille à la va-vite avant de disparaître dans la masse. Idem, pour Abdou, un jeune homme, pain à la main,  venu compléter son petit déjeuner. Le jeune homme cherche de quoi se faire un petit sandwich à l’aide des produits recyclés, qu'il tient à se procurer coûte que coûte.  « Chaque matin, c’est ici que je paye mon petit déjeuner. C’est moins cher et les articles proposés sont de bonne qualité. On dirait même,  que ce sont les mêmes que ceux des supermarchés. Avec 500 Fcfa, j’ai du fromage et du saucisson. Et, je pense que je vais revenir ici, préparer mon ndogou », se projette-t-il déjà, se délectant à l'avance des promesses d'une rupture de jeûne...royale.





 
O WADE Leral