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Ultime débat musclé entre les candidats républicains

Rédigé par leral.net le Vendredi 20 Janvier 2012 à 15:39 | | 0 commentaire(s)|

L'ultime débat télévisé de la campagne pour la primaire de Caroline du Sud, prévue ce samedi, a été animé. Les deux favoris, Romney et Gingrich, ont multiplié les piques.


Ultime débat musclé entre les candidats républicains
Attaques, indignations, slogans, plaisanteries et gros éclats de rire. L'ultime débat télévisé de la campagne pour la primaire de Caroline du Sud, prévue ce samedi, a été animé jeudi soir. Dans l'immense salle du «Colisée», un grand complexe situé à côté de l'aéroport de Charleston dans le sud de l'état, des centaines de personnalités républicaines et de militants du Tea Party sont réunis, enthousiastes. Ils crient avec chaleur quand le Congressman Ron Paul entre en salle, puis l'ancien speaker Newt Gingrich, l'ex-gouverneur du Massachusetts Mitt Romney et enfin le sénateur Rick Santorum. Les candidats ne sont plus que quatre en piste pour ce troisième scrutin. Plus tôt dans la matinée, le gouverneur texan Rick Perry a jeté l'éponge, appelant à soutenir la candidature de l'ancien speaker Newt Gingrich. Une chorale «de cadets de la citadelle», en uniforme gris, se met à chanter l‘hymne national américain. Les candidats ont la main sur le cœur et chantent à l'unisson des élèves officiers. Cela paraît un peu insolite dans un débat télévisé mais on est en Amérique, et surtout en Caroline sud, où état particulièrement sourcilleux en matière de respect des traditions.

C'est le commentateur John King, de la chaîne organisatrice de l'événement CNN, qui dirige les débats. Le débat commence en fanfare par une mise en cause de Gingrich sur sa vie privée, plus que houleuse. Mitt Romney vient de souligner en guise d'introduction qu'il est marié depuis 42 ans à la même femme, une pique évidente à son principal rival Newt Gingrich, marié trois fois, et dont la vie privée a été étalée au grand jour, ce même soir, sur une autre chaîne de télévision par sa deuxième femme Marianne Gingrich, dont il a divorcé en 1999. Celle-ci a raconté comment après 18 ans de mariage, l'ancien speaker lui avait proposé un «mariage ouvert», en tentant d'imposer sa maîtresse Callista dans la boucle (elle est depuis devenue sa troisième femme). «Je l'ai regardé stupéfaite, j'ai refusé», a-t-elle raconté. Marianne Gingrich a raconté que l'ancien speaker l'avait quitté alors qu'elle venait d'apprendre qu'elle était atteinte d'une sclérose en plaques. Elle a affirmé que son ex-mari n'était pas l'homme des valeurs morales qu'il prétend défendre. Le politicien conservateur avait déjà quitté sa première femme Jackie alors qu'elle était atteinte d'un cancer (à sa demande selon lui). Des affaires personnelles pour lesquelles il dit s'être «repenti» mais qui risquent de lui coûter cher, surtout en Caroline du sud, un état très religieux et très conservateur, où les valeurs familiales sont très importantes.
«Voulez vous parler de ces accusations ce soir ?»

Le journaliste saute sur l'occasion: «Voulez vous parler de ces accusations ce soir?», demande John King. «Non», répond Gingrich furieux. Il s'en prend à la nature «destructrice des médias» et parle de mensonges. «Je suis horrifié que vous commenciez un débat télévisé par une telle question. Chaque personne ici a quelqu'un qui a traversé des moments douloureux. Utiliser une ex-femme pour mettre un candidat en difficulté, est écœurant…Tout est faux».

King se défend mollement: «Cette histoire est passée sur une autre chaine». «J'en ai assez des médias qui protègent Barack Obama!», insiste Gingrich, affirmant que la presse n'attaque que les Républicains. Applaudissements de la salle.

«Pensez vous que cette affaire soit un sujet pour la campagne?», demande King aux autres candidats. Santorum répond que «les électeurs regarderont ce que «chacun a fait. Mais que ce pays est un pays qui pardonne». Romney, lui, la joue, grand seigneur au dessus de la mêlée et des ragots: «John, parlons des choses réelles», dit-il. Ron Paul, rieur, salue sa femme avec lui «depuis 52 ans».

On parle évidemment beaucoup de la manière de relancer l'emploi et l'économie, alors que le chômage est à plus de 9% en Caroline du sud, l'un des taux les plus élevés du pays. King cite une femme qui parle du chômage à 9,4%. Ron Paul répond que le gouvernement fédéral doit «dégager de notre chemin». Il répète, comme il fait depuis le début de la campagne, qu'il ne faut plus permettre à l'Etat fédéral d'accroître la dette nationale. Il est visiblement très apprécié par la salle, qui aime son humour et ses petites phrases qui tuent. Les autres sont d'accord sur l'essentiel. L'Etat fédéral est le diable chez les Républicains et cela plaît à l‘auditoire qui en redemande.

Beaucoup d'autres sujets sont évoqués pendant le débat, sans apporter de vraies surprises. Le capitalisme financier pratiqué par Romney, accusé par ses adversaires de ne pas être en prise avec l'industrie manufacturière. L'immigration illégale, que chacun promet de réduire. La réforme de la santé d'Obama que tous promettent d'abroger mais qui permet de mettre encore une fois Romney, le favori sur la sellette. Le sort de l'industrie de défense. Le droit à la vie. Fait non surprenant dans une Caroline du sud où l'importance du secteur militaire est forte, presque tous les candidats promettent de garder un budget de défense massif, critiquant avec virulence les initiatives d'Obama pour le réduire. Tous sauf Ron Paul, le libertarien qui affirme qu'il faudra bien réduire les bases en Corée ou au Japon si l'on veut payer pour les autres dépenses, alors que l'Etat est plongé dans une «montagne de dette». Tonnerre de cris le soutenant.A Charleston, beaucoup d'observateurs lui prédisent un très bon score même s'il est quatrième dans les sondages avec 13% des intentions de vote.
«Gingrich a beaucoup d'idées mais il ne les réalise pas »

Une question sur la nécessité de publier les déclarations d'impôts des candidats, met soudain Romney sur la défensive. Depuis quelques jours, il est sous forte pression pour publier la sienne. Il ne cède pas aux cris de la salle et affirme qu'il publiera celle-ci «en avril», pour ne pas prêter le flanc aux critiques des démocrates. Ce n'est pas vraiment convaincant car on comprend que c'est surtout à l'électorat républicain que l'ancien gouverneur veut dissimuler ses revenus pour le moment pour ne pas compromettre sa nomination. Mais Romney insiste. «Je n'ai pas honte de ma réussite, car ce n'est pas la réussite qu'il faut attaquer» pour remettre d'aplomb ce pays, dit-il, critiquant les démocrates qui veulent «en finir avec la méritocratie et transformer l''Amérique en nation d'assistés». Un point que la salle approuve.

Dans l'ensemble, le candidat, qui caracole en tête de la course à l'approche du vote, se tire plutôt bien de l'exercice. Gingrich, qui connaît depuis deux jours une hausse dans les sondages, n'a pas pris nettement l'avantage pendant le débat, même si ce bon débateur a surfé efficacement sur les questions comme à son habitude. Santorum lui, a fait plutôt une performance assez authentique et efficace, notamment quand il a attaqué l'ancien speaker avec lequel il est en compétition pour le vote chrétien conservateur. «Les rêves de grandeur n'ont jamais été en reste chez Gingrich…il a beaucoup d'idées mais il ne les réalise pas» a ironisé l'ancien sénateur de Pennsylvanie, s'étonnant de la condescendance de Gingrich qui lui demande de quitter la course à son profit. Il accuse son rival de «manque de discipline» et affirme qu'il n'a «jamais eu le courage» de s'opposer à la direction du parti pour freiner les dépenses. Gingrich proteste, parle de son bilan «reaganien». Mais Romney prend le relais et l'attaque sur son bilan d'insider de Washington, éloigné des réalités du pays. Il ironise sur le fait que Gingrich tente de donner l'impression qu'il a été l'architecte de la révolution conservatrice sous Reagan. «Vous êtes cité une seule fois dans ses carnets», dit-il, suscitant l'hilarité de la salle.

Au fond, on a l'impression que chaque candidat a finalement tiré son épingle du jeu, dans un débat musclé, mené comme un sport de contact. Mais chacun est reparti avec ses failles. Qui a gagné? Réponse ce samedi dans les urnes de Caroline du sud.
Le Figaro