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Gabon : 4 402 milliards de FCFA détournés, un scandale au cœur des inégalités sociales ?

Rédigé par leral.net le Jeudi 13 Novembre 2025 à 18:09 | | 0 commentaire(s)|

Alors que certains Gabonais font face à la cherté de la vie, au chômage et à la précarité sociale, l’affaire dite Bongo-Valentin continue de révéler l’ampleur d’un détournement estimé à 4 402 milliards de FCFA. Une somme vertigineuse, équivalente à près de 98 % du budget révisé de l’État pour le compte de l’année 2024, qui met en lumière le fossé grandissant entre les élites et la population.


Le procès ouvert le 10 novembre dernier à Libreville a fait éclater au grand jour l’un des plus grands scandales financiers de l’histoire du pays. Selon les enquêtes, l’ex-première dame Sylvia Bongo Ondimba et son fils Noureddine Bongo Valentin, aujourd’hui condamnés par contumace à « vingt ans de prison », auraient détourné des fonds publics d’une ampleur sans précédent.

« Ce montant est comparable à la totalité du budget révisé de l’État pour l’année 2024, ce qui souligne son caractère exceptionnel », explique Ghislain Mapangou Mapangou, analyste économiste statisticien, qui qualifie l’affaire de véritable crime financier contre la République.

Pour la population gabonaise, cette affaire sonne comme une humiliation nationale. Dans les quartiers populaires de Libreville, d’Oyem ou de Makokou, les témoignages se rejoignent : « comment comprendre qu’autant d’argent ait été volé pendant que nous manquons d’eau, de soins et d’emplois ? », s’interroge un compatriote.

Selon l’expert économique Ghislain Mapangou Mapangou, les 4 402 milliards de FCFA détournés représentent près de quatre fois le budget du secteur de la santé, évalué à 141,14 milliards de FCFA dans la Loi de Finances 2025. Avec une telle somme, le pays aurait pu réhabiliter les hôpitaux, construire des centres médicaux dans chaque province et équiper durablement les structures existantes.

Sur le plan macroéconomique, la somme détournée équivaut à « 22,7 % du Produit Intérieur Brut (PIB) nominal du Gabon en 2023, estimé à 19 388 milliards de FCFA ». Ce détournement représente donc près d’un quart de la richesse nationale, ce qui a fragilisé la croissance, limité les investissements publics et affaibli la confiance des partenaires internationaux.

Les conséquences sont directes : ralentissement des chantiers publics, augmentation du coût de la vie, pression sur le budget de l’État et perte de crédibilité institutionnelle. Selon l’économiste Mapangou, « ces pratiques ont drainé les ressources vitales de l’économie, impactant sévèrement la capacité du gouvernement à investir dans les services publics et le développement humain ».

La disparition d’un tel montant pourrait expliquer dans le quotidien des Gabonais une baisse du pouvoir d’achat, une dégradation des services publics et un ralentissement des opportunités d’emploi. Les familles les plus modestes peinent à se nourrir, à se soigner ou à scolariser leurs enfants. Les subventions étatiques, notamment sur les produits pétroliers, sont souvent fragilisées par le manque de ressources.

Le maintien récent des subventions par les autorités, malgré la pression budgétaire, apparaît dès lors comme un soulagement pour les ménages, mais aussi comme un rappel des déséquilibres créés par des années de détournements massifs. Ce procès, au-delà de ses implications judiciaires, ouvre une nouvelle page dans la lutte contre la corruption au Gabon. Pour de nombreux citoyens, il symbolise une volonté de rupture avec l’impunité d’hier.

Reste à savoir si cette volonté se traduira par des réformes structurelles capables de garantir la transparence, la bonne gouvernance et une redistribution plus équitable des richesses nationales. En attendant, l’affaire des 4 402 milliards de FCFA demeure le symbole d’un pillage d’État et d’une injustice sociale criante, dans un pays où la majorité aspire simplement à vivre dignement des fruits de sa richesse.