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Gabon : Une réussite scolaire en forte hausse, catalyseur d'un nouveau cycle éducatif

Rédigé par leral.net le Vendredi 20 Juin 2025 à 18:42 | | 0 commentaire(s)|

Entre 2023 et 2025, le système éducatif gabonais a connu une progression remarquable du taux de réussite au Certificat d'Études Primaires (CEP), passant de 82,24 % à 98,70 %. En l'espace de deux ans, c'est un gain cumulé de plus de seize points de pourcentage, qui reflète l'effet conjugué d'une volonté politique forte, d'une meilleure structuration institutionnelle et d'un pilotage plus rigoureux des politiques éducatives. Cette évolution est d'autant plus significative, qu'elle s'inscrit (...)

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Entre 2023 et 2025, le système éducatif gabonais a connu une progression remarquable du taux de réussite au Certificat d'Études Primaires (CEP), passant de 82,24 % à 98,70 %. En l'espace de deux ans, c'est un gain cumulé de plus de seize points de pourcentage, qui reflète l'effet conjugué d'une volonté politique forte, d'une meilleure structuration institutionnelle et d'un pilotage plus rigoureux des politiques éducatives. Cette évolution est d'autant plus significative qu'elle s'inscrit dans le sillage des réformes entreprises dans le contexte de la Cinquième République naissante, où l'éducation de base constitue une priorité de développement humain.

Le CEP, premier diplôme du parcours scolaire, joue un rôle fondamental dans l'évaluation des compétences de base, l'orientation des flux vers le secondaire, et la mesure de l'impact des politiques éducatives à moyen terme. Les performances observées ne traduisent donc pas seulement un effort en matière d'apprentissage, mais relèvent également d'un repositionnement stratégique de l'action publique en éducation.

L'introduction progressive de l'Approche par Compétences (APC), la modernisation du Système d'Information pour la Gestion de l'Éducation (SIGE), ainsi que les démarches d'audit de l'offre scolaire, ont contribué à cette dynamique d'ensemble.

Au niveau territorial, les neuf provinces du pays affichent toutes une amélioration significative, réduisant l'écart entre la province la plus faible et la plus performante à seulement 3,59 points en 2025, contre plus de 14 points un an plus tôt.

Cette convergence territoriale laisse entrevoir un rééquilibrage progressif de l'offre éducative, soutenu par une gouvernance plus attentive à l'équité. Le taux de participation aux examens, resté supérieur à 98 % sur la période, renforce par ailleurs la crédibilité des résultats observés.

Toutefois, cette massification réussie pose de nouveaux défis, notamment pour le secondaire qui doit désormais accueillir plus de 45 000 élèves admis au CEP chaque année. Il devient alors indispensable de projeter les besoins avec précision : constructions de nouvelles salles de classe, déploiement d'enseignants qualifiés, équipements pédagogiques adaptés, et mécanismes d'accompagnement ciblés pour éviter les risques de saturation.

Une estimation prudente évoque la nécessité de créer au moins 1 500 salles de classe supplémentaires d'ici 2030, sans compter les ajustements en termes de cartographie scolaire et de planification des ressources humaines.

Ce tournant doit aussi s'accompagner d'un renforcement de la qualité des apprentissages. Si les taux de réussite traduisent un effort collectif, la pérennité des acquis passe par une évaluation plus fine des compétences réelles. Il serait utile de mener des enquêtes "à froid" pour évaluer les savoirs effectivement mobilisables par les élèves dans des situations nouvelles. La fiabilité des évaluations et la régularité des audits pédagogiques sont des leviers essentiels pour asseoir la crédibilité des diplômes nationaux sur le long terme.

Dans cette perspective, plusieurs orientations stratégiques apparaissent nécessaires. Il s'agit notamment de poursuivre la modernisation des outils de planification, de renforcer les capacités d'analyse et d'anticipation au niveau local, d'actualiser la carte scolaire en fonction des flux réels, et de consolider les pratiques pédagogiques à travers des formations continues centrées sur les fondamentaux.

La décentralisation de la planification scolaire apparaît également comme une piste à privilégier, pour mieux adapter les réponses aux réalités spécifiques de chaque territoire.

La position actuelle du Gabon, au-dessus de la moyenne régionale CEMAC en matière de réussite scolaire, offre au pays l'opportunité de devenir une référence dans la sous-région. Mais ce leadership appelle une exigence accrue : celle de transformer les succès quantitatifs en véritables progrès qualitatifs, durables et mesurables. Une telle ambition nécessite un pilotage fondé sur les données, l'expérience de terrain, et la concertation entre les acteurs.

Les résultats du CEP 2025 doivent ainsi être lus non comme une fin en soi, mais comme un signal de départ vers une nouvelle étape de transformation du système éducatif. Former, évaluer, anticiper : telle est la voie à suivre pour un système plus juste, plus fort, plus humain, à la hauteur des aspirations de la jeunesse gabonaise.

Par Eugène-Boris ELIBIYO,
Spécialiste des politiques éducatives
et de la planification stratégique
Représentant pour le Gabon de l'ONG
Internationale Francophonie sans Frontières (FSF)



Source : https://www.gabonews.com/fr/actus/education/articl...