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Innocence Ntap Ndiaye, présidente du Hcds: «Le leadership du Sénégal en matière de dialogue social est reconnu»

Rédigé par leral.net le Lundi 17 Mai 2021 à 20:22 | | 0 commentaire(s)|

Le dynamisme du dialogue social est incontestable. C’est la conviction de la Présidente du Haut conseil pour le dialogue social, Innocence Ntap Ndiaye. Dans cet entretien, elle revient sur les résultats en matière de dialogue et les défis à relever. Elle évoque également les positions du Chef de l’État lors de la remise des cahiers […]

Le dynamisme du dialogue social est incontestable. C’est la conviction de la Présidente du Haut conseil pour le dialogue social, Innocence Ntap Ndiaye. Dans cet entretien, elle revient sur les résultats en matière de dialogue et les défis à relever. Elle évoque également les positions du Chef de l’État lors de la remise des cahiers de doléances des centrales syndicales le 1er mai dernier.

Vous avez remis récemment un rapport au Chef de l’État. Quelles sont les grandes lignes ?

Le rapport couvre la période allant du 1er juin 2017 au 31 décembre 2019. Il fait suite aux deux premiers élaborés par le Haut conseil pour le dialogue social depuis le 27 mars 2015, date de l’installation officielle de ses membres. Ce dernier rapport sur l’état du dialogue social comporte une cartographie des acteurs parties prenantes au dialogue social tripartite, ceux du dialogue social bipartite dans le secteur public de l’éducation et de la formation ainsi que de huit familles d’acteurs de l’économie informelle. La réalisation de ce volet «cartographie» répond au souci de contribuer à une bonne lecture du paysage des relations professionnelles et des rapports de force entre les acteurs ainsi qu’à une meilleure maîtrise de la configuration des unités de production informelle. Le rapport aborde aussi les avancées notées dans le cadre de la négociation collective dans le secteur privé. Dans l’optique de rendre compte de nos activités durant la période de référence, les initiatives nationales du Haut conseil pour le dialogue social en matière de promotion du dialogue social et celles auxquelles il a été associé au niveau international y sont présentées.
Dans ce rapport, nous nous sommes également attelés à soumettre au Chef de l’État, au Gouvernement et aux partenaires sociaux, des recommandations au nombre de dix pouvant concourir à l’instauration et à la consolidation de relations professionnelles apaisées. Il me plaît de préciser aussi que nous avons transmis à la haute attention du Chef de l’État une contribution à l’évaluation de l’impact de la pandémie de la Covid-19 en milieu de travail et un rapport sur la situation du dialogue social depuis la survenue de la pandémie de la Covid-19 au Sénégal.

Récemment, dans une contribution, vous louez les vertus du dialogue tripartite. Pourtant, dans de nombreux secteurs (hydrocarbures, santé, éducation…), les grèves et les menaces de grève ne manquent pas. Pourquoi ?

Notre pays bénéficie d’une notoriété incontestable en matière d’approfondissement de la démocratie sociale et de dynamisme du dialogue social tripartite. Ce contraste entre la situation du dialogue social au niveau tripartite et celle qui prévaut dans les divers secteurs révèle les efforts qu’il convient de déployer pour consolider les acquis qui sont corroborés par l’engagement des mandants tripartites. Ces efforts ont jusqu’ici mis à l’abri notre pays de grèves générales dont la survenue peut compromettre la stabilité sociale, la croissance économique durable et le développement social. À travers le Pacte national de stabilité sociale et d’émergence économique (Pnssee) signé depuis avril 2014, d’importantes avancées ont été notées en matière de progrès social au niveau interprofessionnel. Il s’agit notamment de la réactualisation de la Convention collective nationale interprofessionnelle ; la revalorisation des barèmes de salaires catégoriels dans le secteur privé ; celle du salaire minimum interprofessionnel garanti et du salaire minimum agricole garanti ; l’instauration d’une pension minimale pour les pensionnés de droit direct ; la mise en place d’un régime complémentaire obligatoire au Fonds national de retraite (Fnr).
Au niveau sectoriel, ces avancées se sont traduites par la rénovation des cadres conventionnels des relations professionnelles dans le secteur de l’enseignement privé et la conclusion de conventions collectives dans les secteurs du pétrole et du gaz et de la sécurité privée. Dans le secteur du pétrole et du gaz, il reste à poursuivre les initiatives pour parachever les négociations qui doivent aboutir à la conclusion d’une Convention collective dans le secteur du transport des hydrocarbures. Et, en perspective à la future exploitation des ressources pétrolières et gazières, il convient d’anticiper pour définir les relations de travail dans l’amont pétrolier.
Toutefois, dans le secteur public qui enregistre un niveau de conflictualité plus accentué par rapport au secteur privé, un regain d’intérêt doit être accordé à la mise en œuvre d’initiatives concourant à promouvoir la stabilité dans l’éducation et la formation, l’enseignement supérieur et la santé qui conditionnent fortement l’avenir de notre Nation. Nous y attelons par la mise en place de comités de dialogue social adaptés et par le renforcement de capacités des partenaires sociaux de ces secteurs.

Le Président de la République, en recevant les cahiers de doléances des centrales syndicales le 1er mai dernier, a rappelé que le dialogue reste toujours au cœur de ses priorités. Que vous a inspiré une telle déclaration ?

Le Président de la République est toujours demeuré constant sur la place primordiale qu’il accorde au dialogue. En attestent les multiples initiatives qu’il a développées dans le domaine du dialogue sous toutes ses formes que sont le dialogue civil, le dialogue politique, le dialogue interreligieux et le dialogue social. Il a traduit, encore une fois, son intérêt particulier au dialogue à l’issue du Conseil des ministres du 6 mai 2021 en nous instruisant, en relation avec le Ministre du Travail, de lui soumettre un Plan national de renforcement du dialogue social.
La mise en œuvre dudit plan consolidera, à coup sûr, le leadership de notre pays en matière de dialogue social suite notamment à l’organisation des deux conférences sociales et à la signature du Pacte national de stabilité sociale et d’émergence économique qu’il a initiées. À titre de rappel, la première conférence sociale, qui s’est tenue du 14 au 15 avril 2014 sur le thème «Dialogue social, Travail décent et compétitivité», a débouché sur la signature, le 15 avril 2014, du Pacte national de stabilité sociale et d’émergence économique. La deuxième conférence sociale tenue du 24 au 25 avril 2017 sur le thème de «la réforme des retraites au Sénégal : vers des régimes viables et inclusive» a permis d’atteindre des résultats probants en matière de revalorisation des pensions de retraite dans les secteurs public et privé.

À l’occasion, il a demandé au secteur privé de respecter la loi sur l’âge de la retraite qui est de 60 ans tout en refusant son allongement à 65 ans comme le souhaite une centrale. Comment analysez-vous une telle position ?

La question de la retraite constitue une préoccupation majeure des travailleurs. Cette épineuse question de la retraite doit être appréhendée par rapport aux causes qui incitent les travailleurs à poursuivre leur activité. Parmi les causes qui poussent les travailleurs à souhaiter poursuivre les relations de travail au-delà de l’âge légal de la retraite qui est de 60 ans, on peut identifier la modicité de certaines pensions de retraite; les difficultés rencontrées par les fils de ces derniers pour accéder à un emploi. Au-delà de la dynamique régulière de revalorisation des pensions de retraite, le Gouvernement a décidé récemment d’amplifier les initiatives pouvant contribuer à la promotion de l’employabilité et de l’entrepreneuriat des jeunes à travers le Programme d’urgence pour l’emploi et l’insertion socioéconomique des jeunes. Par ailleurs, la problématique du renouvellement des générations doit être prise en compte pour mieux mettre à profit le dividende démographique.

Le Président se dit libéral, mais d’aucuns le considèrent comme socialiste au vu des nombreux projets et programmes sociaux qu’il a initiés. Qu’en pensez-vous ?

À travers le monde, les idéologies ne sont plus tellement de saison. Le développement n’est durable que s’il est centré autour de l’humain. Même si nous ne sommes pas encore parvenus à l’éradiquer, la pandémie de la Covid-19 a fini de nous le rappeler avec certaines priorités qui sont revenues au premier plan. Il s’agit, entre autres, de la santé, de la couverture sociale contre certains risques sociaux comme le chômage et de la nécessité d’accélérer le processus de transformation structurelle de l’économie, y compris les unités de l’économie informelle dont le caractère informel a influé sur la décision de ne pas procéder à un confinement strict dans le cadre de la lutte contre la propagation de la Covid-19. Au demeurant, le parcours politique d’un homme d’État déteint forcément sur la vision qu’il soumet au peuple avant de la mettre en œuvre. Sous ce rapport, les trois axes du Plan Sénégal émergent (Pse) accordent tous une importance à l’humain ; l’axe 1 à l’amélioration des unités de création de richesses ; l’axe 2 au capital humain et l’axe 3 à la gouvernance inclusive avec une grande place réservée au dialogue.
Propos recueillis par Daouda MANÉ



Source : http://lesoleil.sn/innocence-ntap-ndiaye-president...