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Promotion de l’agro-écologie en Afrique de l’Ouest : Djimini ou le refus d’un néocolonialisme par le biais de la semence

Si l’on tient compte de l’accès aux infrastructures socioéconomiques de base, le village de Djimini ressemble, à bien d’égards, à toutes les autres bourgades du département de Vélingara, dans la région de Kolda. Seulement, la spécificité de ce patelin situé à quelques encablures de Vélingara, réside dans la tenue de sa Foire ouest-africaine des semences paysannes (FOASP). Pour la promotion de l’agro-écologie en Afrique de l’ouest, Djimini est le refus d’un néocolonialisme par le biais de la semence. "Enquête"


Rédigé par leral.net le Vendredi 25 Mars 2022 à 08:54 | | 0 commentaire(s)|

Cette foire qui a fini de se confondre avec le nom de ce village, en un laps de temps, se transforme et devient la capitale ouest-africaine de la “Bourse semencière paysanne”, renseigne Mamadou Danfakha, en charge de programme à Fahamu Africa, par ailleurs coordonnateur du mouvement panafricain des femmes rurales “Nous Sommes la Solution”.

Entamée en 2007, cette foire est devenue au fil des ans, un “lieu de pèlerinage”, où les pays de la sous-région africaine, notamment, et de certains pays d’Europe, se donnent rendez-vous, pour “redynamiser les circuits d’échanges et de plaidoyer pour les systèmes semenciers paysans (SSP), mais aussi, pour renforcer les compétences des plateformes de promotion de ces SSP, afin qu’elles puissent engager les débats au niveau local, national et régional.

La foire de Djimini est également un rendez-vous pour contribuer à la médiatisation des systèmes semenciers paysans (SSP), pour un meilleur soutien politique
’’, explique Famara Diédhiou, en charge des programmes à l’Alliance pour la Souveraineté alimentaire en Afrique (AFSA).

Cette année encore, le monde paysan Ouest-Africain a sacrifié à la tradition qui voudrait que, chaque deux ans, il se retrouve pour s’abreuver aux sources du patrimoine génétique semencier légué par les ancêtres, dont les rideaux, ouverts ce 15 mars, sont tombés le vendredi 17 mars dernier.

Près de 500 participants en provenance de douze pays africains, composés d’institutions de recherche, d’organisations paysannes, de groupements de femmes et de jeunes, des services étatiques, des programmes et projets de développement venus plus nombreux que les dernières éditions, ont pris part à cette 7e édition de la Foire ouest-africaine de semences paysannes de Djimini (FOASPD), pour échanger leurs expériences et aussi, faire des recommandations pour la promotion et la préservation de la semence paysanne.

Il y a eu aussi des échanges de semences entre producteurs, des échanges sur les techniques de production, de conservation, d’amélioration des semences, en lien avec la transition agro écologique. Car, l’on ne peut absolument pas parler de transition écologique, sans la semence paysanne’’, indique M. Danfakha de Fahamu Africa, partie prenante de cette foire.

Pour une agriculture qui respecte l’environnement et la biodiversité…

Au-delà de la promotion de la semence paysanne et des valeurs sociales, culturelles et médicinales qu’elle (la semence) renferme, cette foire constitue un véritable cri du cœur contre le “néo colonialisme par le biais de la semence”, souligne Ibrahima Seck de la Fédération nationale pour l’agriculture biologique.

Elle est également “une profession de foi paysanne sans cesse renouvelée, pour une agriculture saine, qui respecte l’environnement et la biodiversité”, ajoute Mariama Sonko, la présidente nationale du Mouvement panafricain des femmes rurales. Selon qui, la femme rurale joue un rôle incontournable dans la protection et la valorisation des semences paysannes.

Communications et expositions de semences paysannes, ateliers thématiques, projections de films et causeries, ont rythmé ce rendez-vous de la semence paysanne ouest-africaine. Les échanges ont porté, entre autres, sur l’implication des jeunes sur la protection et la promotion des systèmes semenciers paysans en Afrique, la gestion naturelle de la fertilité des sols, des ravageurs et des maladies des plantes et le rôle des femmes dans la conservation des semences.

Le document de l’Union africaine (UA) relatif au développement de lignes directrices continentales pour l’harmonisation des cadres réglementaires de semences en Afrique, a aussi fait l’objet de large partage, à l’occasion de cette édition, dont le thème est axé autour de la question suivante : “Quels systèmes pour une vraie transition agro écologique ?”

Portée par l’Association sénégalaise des producteurs de semences paysannes (ASPSP) et le Comité ouest-africain de semences paysannes (COASP), en partenariat avec l’Alliance pour la souveraineté alimentaire en Afrique (AFSA), cette foire de Djimini se caractérise par son “authenticité” et son “originalité”, estime Kamano Sia Anne Marie, coordonnatrice du mouvement panafricain des femmes rurales “Nous sommes la solution” de la Guinée.

La foire est une manière d’exprimer ce que nous sommes, elle est un espace pour extérioriser ce que nous pensons, pour exprimer notre façon de concevoir les choses, de ressortir la valeur de ce qui fait de nous ce que nous sommes, c’est-à-dire notre identité, qui est cette semence paysanne. Je prie qu’elle se pérennise”, a-t-elle dit.

Omer Agoligan du Bénin, membre du Comité Ouest Africain des semences Paysannes (COASP), pense, quant à lui, que “nous devons retourner à la terre tout ce qu’on lui prend et cette foire constitue un cadre de prise de conscience face à la colonisation alimentaire imposée par l’agro-business.

Tirant le bilan de cette 7e édition de la foire de Djimini, Famara Diédhiou, chargé de programme basé en Afrique de l’Ouest de l’Alliance pour la souveraineté alimentaire en Afrique (AFSA), a soutenu que celle-ci a obtenu les résultats escomptés, en termes de mobilisation d’organisations. Selon lui, les participants ont su faire le lien entre les semences et le paquet technologique qui les accompagne.

La semence ne pouvant pas être prise de façon isolée. Elle est liée, dit-il, par des politiques ou des programmes de fertilisants et des questions alimentaires. Selon lui, les débats ont démontré que les participants ont pris conscience de tout cela. L’autre élément de satisfaction, ajoute M. Diédhiou, est la compréhension des législations ou des politiques en vue. Dans la même veine, Mamadou Danfakha en charge des programmes à Fahamu Africa, soutient que le bilan est très positif au regard de la mobilisation (plus de 500 participants de 12 nationalités), mais également, en termes de contenu. Selon lui, 12 ateliers ont été organisés en seulement trois jours de foire.






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