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Promotion de l’agroécologie au Sénégal: Les mille et une difficultés pour faire du secteur un pilier du tissu économique


Rédigé par leral.net le Samedi 17 Décembre 2022 à 11:41 | | 0 commentaire(s)|

Promotion de l’agroécologie au Sénégal: Les mille et une difficultés pour faire du secteur un pilier du tissu économique
Les spécialistes soutiennent que les produits alimentaires issus de l’agriculture conventionnelle, sont de nature à mettre en péril la santé humaine et animale et constituent une réelle menace pour l’environnement.

C’est pour juguler ce mal que des organisations non gouvernementales (oNg) portent depuis près de 20 ans, le combat de la promotion de l’agro-écologie. Mais mille et une difficultés se dressent devant l’ambition d’en faire un pilier du tissu économique.

Les spécialistes en la matière, n’ont de cesse, de convoquer l’agriculture conventionnelle au banc des accusés, l’accusant de mettre en péril la santé humaine et animale, mais aussi un facteur de dégradation de l’environnement avec la sur-utilisation des produits chimiques, dans un contexte de changement climatique. C’est ainsi que des Organisations Non Gouvernementales (ONG) font, depuis près de 20 ans, la promotion de l’agro-écologie, considérée comme l’alternative capable d'inverser cette tendance.

Mais force est de reconnaître que cette ambition de faire de cette forme d’agriculture un pilier du tissu économique, est loin d’être totalement sur orbite, à cause de mille et une difficultés. En effet, le taux de pénétration est encore faible à l’échelle nationale, avec une estimation de 15%, pour environ 50.000 producteurs. Malgré la volonté affichée par l’Etat, la mise en place des instruments de politique nécessaires, pour assurer le déploiement de cette forme d’agriculture n’est pas encore effective. Et pourtant, de nombreux pays ont réussi le pari de faire de l’agro-écologie, le pilier de leur tissu économique.

En Afrique, c’est le cas de la Tunisie, où une délégation sénégalaise composée de représentants du gouvernement, du Conseil National de Concertation et de Coopération des Ruraux (CNCR), de ENDA Pronat, de la Fédération Nationale pour l’Agriculture Biologique FENABont, séjourné dans ce pays, pour apprendre des politiques publiques mises en œuvre en faveur de l’agriculture biologique.

C’est Thiès qui a abrité hier la rencontre nationale de restitution des résultats du voyage. Selon Ibrahima Seck, coordonnateur de la Fédération Nationale pour l’Agriculture Biologique (FENAB), la Tunisie fait partie des premiers pays d’Afrique en matière de développement de l’agriculture biologique. Aujourd’hui, plus des 20% de sa production agricole et surtout pour le secteur de l’exportation, sont issus de l’agriculture biologique. Il indique que cette performance est bâtie sur le socle d’une bonne charpente organisationnelle.

« Il y a la délégation générale pour l’agriculture biologique, qui se retrouve dans les 20 régions du pays, pour accompagner les promoteurs, les acteurs et les producteurs biologiques, pour le développement d’une chaîne de valeur biologique performante et qui donne beaucoup d’emplois, crée de la richesse et participe durablement à l’économie du pays. Pour atteindre ce résultat, ce pays a même créé le centre technique d’agriculture biologique, le conseil agricole en agriculture biologique et un plan d’action pour mettre en mouvement toute cette vision », a-t-il exposé.

Pour lui, il faut que de telles stratégies soient répliquées au niveau du Sénégal, d’autant plus que les autorités ont déjà donné le ton, en exprimant la volonté d’aller vers une transition écologique, un Sénégal émergent vert. Mais, il regrette que les actes pouvant permettre d’atteindre cet objectif manquent encore. «Toutefois, il y a lieu d’espérer, car depuis deux ans, le gouvernement subventionne les intrants biologiques, ce qui est une bonne chose, mais force est aussi de constater qu’il reste encore beaucoup de choses à faire. Le meilleur signal pour l’Etat du Sénégal serait par exemple, de faire en sorte que les 30% des produits agricoles consommés par l’Armée Nationale soient issus de l’agriculture biologique.

Ce qui serait une bonne incitation à la production et permettrait également à notre armée de consommer des produits, qui vont agir sur la santé, l’environnement, etc., et atténuer les changements climatiques. C’est parce que l’agriculture biologique permet la séquestration du carbone du sol, c’est dire que cette forme d’agriculture est un instrument d’atténuation et d’adaptation au changement climatique
», a-t-il expliqué.

«La nécessite de mettre en place un marché biologique stable

Doudou Diop, Président de la FENAB estime que le gouvernement a clairement exprimé, à travers le Plan Sénégal Emergent (PSE), la volonté de faire de l’agriculture, le fer de lance de l’économie nationale. De ce point de vue, l’agriculture écologique biologique devrait être au cœur des réflexions, pour atteindre cet objectif, parce qu’elle s’inscrit dans la durabilité, dans la résilience, ainsi que dans la sécurité et la souveraineté alimentaire et elle contribue à préserver la santé des populations et l’équilibre des écosystèmes.

Au Sénégal, dit-il, le potentiel est important dans ce domaine, aussi bien pour l’exportation que pour le marché domestique. Mais pour le développer, il faut définir des politiques publiques, renforcer la recherche et mieux accompagner les jeunes dans ce sens. C’est important à ses yeux, car l’agriculture écologique, biologique s’intéresse à la manière de gérer les sols, l’eau, les plantes et les animaux, afin de produire, transformer et distribuer des aliments et d’autres biens.

C’est dire que les agriculteurs écologiques utilisent les ressources naturelles, d’une manière dont ils bénéficient, tout en protégeant ces ressources pour les générations futures. Dans une période de changement climatique avec des pluies incertaines, il est d’avis que la sécurisation des récoltes devient un défi majeur.

« Dans ces circonstances, les agriculteurs biologiques ont réussi à améliorer leur vie, en s’appuyant sur le potentiel de la nature, en utilisant les ressources propres à l’exploitation familiale, des méthodes peu coûteuses et en établissant un écosystème agricole diversifié et stable. L’agriculture biologique est un moyen amélioré et abordable de produire des produits agricoles de bonne qualité, en harmonie avec la nature. Elle combine le meilleur de l’agriculture traditionnelle, avec des méthodes agricoles modernes et durables», a-t-il poursuivi.

Pour le coordonnateur de la FENAB, il faut maintenant que cela puisse être le levier par lequel, l’Etat va mettre sur orbite une véritable volonté politique, pour accompagner ce que font la société civile, les organisations paysannes à la base, pour le développement de la sécurité alimentaire et nutritionnelle, de la souveraineté alimentaire, par le biais de l’agro-écologie. Il s’y ajoute la nécessité de mettre en place un marché biologique, stable et pour ce faire, il faudrait faire en sorte que le secteur trouve de l’espace u niveau du marché d’intérêt national de Diamniadio.

Doudou Diop renchérit que la définition du paquet politique approprié devrait se faire au moyen d’un processus de planification stratégique, sur la base d’une loi de promotion biologique, un programme biologique national, un projet de développement national de l’agriculture biologique.

Ce processus doit aussi être bâti sur un socle solide avec des mesures hardies allant dans le sens du soutien à la recherche et au conseil agricole biologique, le soutien au développement et à l’utilisation des intrants biologiques, mais aussi à la certification, à la formation professionnelle biologique et aux programmes universitaires.

Il s’y ajoute des réductions fiscales pour les opérateurs biologiques, l’interdiction de l’utilisation d’un produit agro-chimique dans les zones sensibles, le soutien aux pratiques agro-environnementales compatibles avec la production biologique, la mise en place de projets de développement de la chaîne d’approvisionnement biologique, etc.







L’As

Mame Fatou Kébé