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SEYDOU KANTE, DOCTEUR EN GÉOPOLITIQUE, ANCIEN DIPLOMATE À L'UNESCO, CONSULTANT INTERNATIONAL, … SUR LE NOUVEAU CHEF DE LA DIPLOMATIE SÉNÉGALAISE « Fédérer un caucus africain sur la dette, le climat et l’énergie, renforcer la coordination entre tutell

Rédigé par leral.net le Samedi 18 Octobre 2025 à 17:15 | | 0 commentaire(s)|

SEYDOU KANTE, DOCTEUR EN GÉOPOLITIQUE, ANCIEN DIPLOMATE À L'UNESCO, CONSULTANT INTERNATIONAL, … SUR LE NOUVEAU CHEF DE LA DIPLOMATIE SÉNÉGALAISE « Fédérer un caucus africain sur la dette, le climat et l’énergie, renforcer la coordination entre tutell

 
 
Dans un contexte géopolitique mouvant et à l’aube d’une nouvelle ère énergétique, Seydou Kanté, docteur en géopolitique et ancien diplomate sénégalais à l’Unesco, analyse les défis et les opportunités qui attendent le nouveau ministre des Affaires étrangères du Sénégal. Entre diplomatie économique, intégration africaine et repositionnement stratégique vis-à-vis des partenaires traditionnels et émergents, il plaide pour une diplomatie cohérente, fonctionnelle et tournée vers l’impact.
 
 
 
Comment avez-vous accueilli la nomination du nouveau chef de la diplomatie sénégalaise ?
 
Très favorablement. La diplomatie est un domaine réservé du chef de l’État et l’arrivée de l’Ambassadeur Cheikh Niang apporte l’épaisseur opérationnelle qui donne corps à cette orientation. Son parcours multilatéral, sa présidence de la Deuxième Commission à l’Onu et ses postes à Washington, Tokyo, Pretoria et New York constituent un capital d’expérience rare. Dans un contexte où le Sénégal devient pays pétrolier et gazier, ce profil rassure les partenaires, crédibilise la parole de l’État et permet d’aligner l’action extérieure sur trois impératifs stratégiques : sécurité régionale, intégration africaine et diplomatie économique tournée vers l’énergie, les infrastructures et le capital humain.
 
 
 
Quels sont les défis qui se dressent devant lui ?
 
Il devra naviguer entre une recomposition sous-régionale marquée par des tensions sécuritaires (Sahel, terrorisme) et institutionnelles ((rapports entre la Cedeao et l’Aes) tout en préservant la centralité du Sénégal dans les mécanismes d’intégration (Zlecaf, mobilité, interconnexions). Sur le plan économique, la gestion des débuts de production pétrolière et gazière exige une diplomatie de marché et de financement qui sécurise les débouchés, la technologie et la stabilité réglementaire afin d’éviter la malédiction des ressources. À cela s’ajoutent la protection consulaire d’une diaspora dynamique, la consolidation de la réputation de prévisibilité juridique et la cohérence du message international avec les priorités fixées par le chef de l’État.
 
 
 
Quel rôle peut-il jouer auprès des institutions de Bretton Woods ?
 
Son ancrage onusien à dominante économique est un levier pour bâtir un récit macroéconomique lisible et vérifiable auprès du Fmi et de la Banque mondiale. Il peut articuler la trajectoire budgétaire avec des réformes ciblées, défendre des instruments adaptés comme la réallocation de Dts, les guichets climatiques et de résilience, et arrimer les financements aux priorités énergie, éducation et protection sociale. Dans un pays désormais producteur d’hydrocarbures, il est en position de négocier des cadres qui réduisent le coût du capital, améliorent la transparence des revenus et accélèrent la transition énergétique juste sans pénaliser la croissance.
Concrètement, il peut fédérer un caucus africain sur la dette, le climat et l’énergie, renforcer la coordination entre tutelles nationales et bailleurs, et exiger des matrices de résultats mesurables. L’objectif est double : améliorer le coût du capital pour le Sénégal et arrimer les financements à une gouvernance exemplaire.
 
 
La diplomatie sénégalaise serait à rude épreuve. Sur quels leviers peut-il jouer pour redorer le blason ?
 
Le premier levier est normatif et multilatéral afin de reprendre l’initiative sur des thèmes où la voix du Sénégal porte, notamment gouvernance, sécurité maritime, intégration économique et climat. Le deuxième est économique en privilégiant des accords de co-investissement assortis de contenu local, de transferts de compétences et d’indicateurs publics de performance. Le troisième est la diplomatie publique qui associe transparence, constance du message et mobilisation de la diaspora pour l’investissement et l’influence. La combinaison de ces leviers produit un effet de réputation mesurable et réinstalle la confiance des partenaires.
 
 
 
Peut-il être le cordon ombilical entre le Sénégal et la France face à la nouvelle politique des autorités ?
 
Il peut surtout être un pont fonctionnel : sécuriser les intérêts du pays tout en clarifiant les zones de redéfinition souveraine. Sa connaissance des usages diplomatiques et des équilibres politiques lui permet de mener un dialogue franc, sans surenchère, en alignant la relation bilatérale sur des objectifs mesurables et mutuellement avantageux. La relation gagnante n’est ni ombilicale ni exclusive, elle est équilibrée et fonctionnelle. Le ministre Cheikh Niang peut en être l’architecte technique en clarifiant des axes d’intérêt mutuel. Cette posture apaise les perceptions, évite les fausses alternatives et permet d’inscrire la relation franco-sénégalaise dans un cadre africain et européen plus large, cohérent avec la vision présidentielle.
 
 
 
La nouvelle orientation diplomatique des autorités peut-elle être favorable au Sénégal ?
 
Oui, si elle est cohérente et lisible. La diversification des partenariats - Afrique, Europe, Amériques, Golfe, Asie - peut réduire les risques de dépendance et améliorer l’accès au financement, à la technologie et aux marchés. Mais cette diversification ne vaut que si elle s’adosse à trois garde-fous : stabilité normative et sécurité juridique, hiérarchisation claire des priorités (énergie, agriculture, éducation, numérique), et évaluation continue des impacts. La diversification des partenaires doit aussi s’appuyer sur une stabilité normative qui sécurise l’investissement et sur une gouvernance des revenus pétroliers et gaziers pour financer l’éducation, la santé, l’agriculture et l’industrialisation. En articulant intégration africaine, énergie et climat, et en renforçant la capacité d’exécution de l’administration, le Sénégal peut convertir l’ambition politique en gains concrets de financement, de technologie, d’emplois et d’influence, avec un ministre qui met en musique la stratégie du chef de l’État dans les enceintes bilatérales et multilatérales.
Dans cette configuration, le nouveau ministre peut convertir l’ambition politique en gains concrets : accords commerciaux mieux calibrés, projets énergétiques accélérés, financements climatiques débloqués, capacités administratives renforcées et image internationale rehaussée. C’est la combinaison d’un art du compromis, d’une discipline d’exécution et d’une communication stratégique qui rendra cette orientation durablement favorable.
 
 
Recueillis par BMS
 
 
 
 



Source : https://www.jotaay.net/SEYDOU-KANTE-DOCTEUR-EN-GEO...